En présentant sa nouvelle candidate dans Charlevoix, Jean-François Lisée a parlé de souveraineté comme on ne l’avait pas entendu récemment. Un signe ?
La vague de départs au Parti québécois semble forcer Jean-François Lisée à adapter son discours. Même si ses troupes appuient l’idée de mettre temporairement de côté le référendum lorsqu’ils suivent leur logique, le résultat est que la passion s’effrite. La tête comprend, mais le cœur décroche.
La flamme
Faut-il s’en étonner ? La souveraineté a été la raison d’être de ce parti à toutes les époques. Lors des conseils nationaux, le discours de clôture du chef devait toujours contenir quelques lignes sur l’espoir du « pays à portée de main ». Même Lucien Bouchard, qui brandissait ses conditions gagnantes pour repousser l’idée d’un référendum, savait livrer aux militants les phrases motivantes sur le pays.
Mettre l’idée indépendantiste sur la glace, même pour un seul mandat, semble refroidir l’ardeur des péquistes. Le chef Lisée ne peut espérer reconquérir le Québec si ses propres troupes manquent de foi. Il ne peut pas reculer non plus sur sa promesse formelle aux Québécois de ne pas tenir de référendum dans le prochain mandat.
En somme, le PQ avait enlevé le chaudron de la souveraineté du poêle pour le mettre au frigo. Il faut maintenant le ressortir pour le remettre sur le poêle... mais seulement sur le réchaud. En promettant à la population de ne pas chauffer les ronds. Sur le réchaud, la souveraineté serait assez visible pour allumer les militants, mais la population comprendra qu’on ne chauffe pas le poêle pour vrai. Ligne fine.
Aussant
Pour compléter cette stratégie, l’entourage de Jean-François Lisée semble rêver de recruter l’indépendantiste pressé Jean-Martin Aussant. Sa présence aurait aussi pour effet de donner de l’espoir aux souverainistes. On se dira que si le cuisinier Aussant accepte d’entrer dans la cuisine, c’est qu’il a l’intention de chauffer le poêle incessamment.
La tentation de Jean-François Lisée de ramener un peu la souveraineté dans le décor revient à dire que la position actuelle est trop claire. Il faudrait y ramener une dose d’ambiguïté.
Il me semble que c’est exactement ce genre de flou qu’ont brillamment exploité les libéraux lors de la dernière élection. En jouant la menace référendaire à fond, les libéraux se sont positionnés dans la campagne comme l’alternative rassurante et ont gagné.
Philippe Couillard est devenu premier ministre non pas à cause de son programme ou de ses qualités d’orateur. Il a su profiter de la montée d’une « menace référendaire » après l’entrée en scène spectaculaire de Pierre Karl Péladeau.
Si monsieur Lisée ressort un peu la souveraineté et recrute Aussant pour garder le réverbère souverainiste allumé, les libéraux verront l’opportunité. Et même si Lisée jure qu’il ne veut pas faire de référendum dans le mandat, tous ceux qui ne veulent même pas en entendre parler vont finir par se demander si un vote libéral ne serait pas la chose prudente.
On a déjà vu ce film.