Infrastructures

La route du diamant

Industrie du diamant


Au lendemain de l'effondrement d'une poutre à la sortie du tunnel achalandé, le premier ministre Jean Charest était à Chibougamau pour annoncer la construction d'une route de 243 kilomètres qui conduira directement à une mine, propriété de la Stornoway Diamond Corp. Aucun lien entre ces événements? Pas sûr!
Au bout de la route, le gisement de diamants. Sans la route, pas d'exploitation possible. La compagnie aurait pu construire sa route elle-même, mais comme toutes les sociétés d'exploration dans son genre, elle n'a pas le sou. C'est donc Québec qui le fera.
Pour cela, il faudra emprunter 332 millions dont 44 millions, soit 13 %, seront remboursés par la compagnie si le projet aboutit. Au total, en incluant l'entretien, Storneway déboursera environ 5 millions par année pendant 10 ans pour avoir accès à une richesse collective dont la valeur brute est estimée à 5 milliards, et la valeur nette après soustraction des coûts, à 900 millions.
De ces 5 milliards de ressources publiques extraites du sous-sol, combien les Québécois propriétaires recevront-ils? À peu près 16 % des profits nets de la mine, si on exclut les taxes et les impôts habituels que doivent verser toutes les entreprises. Des miettes, en somme.
Pourquoi un pourcentage sur les profits et non sur la valeur brute de la ressource? Parce que le Québec ne serait pas compétitif, répond le ministre des Finances.
Selon le ministère des Finances, malgré les derniers amendements apportés au régime de redevances, Québec ne retirera que 3,1 milliards en redevances de ses ressources en or, fer, diamant, zinc, nickel au cours des 25 années du Plan Nord. Combien pour les diamants? Quelques dizaines de millions, les meilleures années.
Si le projet de mine diamantifère ne voit jamais le jour parce que Stornoway ne trouve pas les capitaux, Québec assumera seul les coûts de construction et d'entretien de la route. À moins que d'autres sociétés ne s'installent au bout du chemin, ce qui est d'ailleurs prévu.
En revanche, si le projet aboutit, Investissement Québec (IQ) qui est actionnaire de Stornoway à hauteur de 37 % touchera sa part des profits, et une redevance de 2 % sur les ventes brutes de diamants. Ventes brutes, tiens donc! Ce qui n'est pas bon pour le gouvernement du peuple le serait donc pour les investisseurs plus délurés?
Cette participation directe d'Investissement Québec dans le projet Renard sera peut-être récompensée, on le souhaite, mais elle a son prix puisque la société d'État a beaucoup investi depuis 1996, en plus de prêter 100 millions à Stornoway. Un autre 100 millions qui s'ajoute à la dette du Québec, en sus des 330 millions pour la route.
Depuis toujours, l'exploitation des ressources fait partie de la vie du Québec. Malheureusement, même si elles génèrent des milliers d'emplois, la plus grande partie de la richesse directement créée par les mines est encore accaparée par les seuls actionnaires.
Le Québec a besoin de revenus pour entretenir ses infrastructures et fournir les services publics essentiels à sa population. Mais pendant qu'à Montréal on cède la construction et la gestion d'un nouveau pont et d'une autoroute à péage au secteur privé, au nord c'est l'État qui paie pour une route conduisant à la propriété d'une société minière. Cherchez l'erreur.


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