Ça doit être une sorte de potion magique. À moins que ce ne soit une incantation. En tout cas, tout le programme libéral en santé tient dans cette seule phrase que répète inlassablement Jean Charest : «Nous sommes le seul parti dont la santé est la première priorité».
Encore hier, alors que les urgences débordent et que les listes d’attentes sont toujours là, M. Charest répétait que le choix du 26 mars était de choisir «entre un gouvernement dont la première priorité sera de faire un référendum sur la souveraineté ou un gouvernement dont la première priorité est votre priorité, et c’est la santé».
Notons tout d’abord que la «première priorité», c’est déjà moins qu’en 2003 quand M. Charest était allé jusqu’à dire, dans l’une des ses publicités, que c’était sa «priorité absolue». On notera que les libéraux ont déjà baissé la barre de leur propre rhétorique.
Or, on voit aujourd’hui que la priorité absolue de 2003 n’a pas donné tous les résultats promis. Le taux d’occupation des urgences est à 150 pour cent, les listes d’attentes pour des chirurgies hors-délai médicalement acceptables restent élevées.
M. Charest aura beau dire qu’il a honoré tous ses engagements de 2003, ce n’est pas ce que la plupart des Québécois peuvent constater quand ils ont affaire au système de santé.
On peut se chicaner sur les chiffres – et sur les méthodes de calcul du gouvernement, qui ont commodément été changées au cours des quatre dernières années – mais il est difficile de dire que le réseau de la santé est aujourd’hui dans un état remarquablement différent de celui dont les libéraux en ont hérité en 2003.
Cela ne signifie pas que les libéraux ont hérité d’un réseau qui fonctionnait bien. Les mises à la retraite de médecins et d’infirmières pour en arriver au déficit zéro font encore mal, près de 10 ans plus tard. Il s’agissait aussi d’un réseau qui ne s’était pas remis des coupures importantes dans les transferts fédéraux à partir de 1995.
Mais, il faut aussi noter qu’au cours de son mandat, M. Charest a bénéficié de deux augmentations significatives des transferts fédéraux.
La première – de 2,8 milliards de dollars sur trois ans – avait été négociée par le gouvernement de Bernard Landry et celui de Jean Chrétien, juste avant le déclenchement des élections au printemps de 2003. La seconde – de 4,2 milliards sur six ans – résulte d’une entente entre les gouvernements Charest et Martin, conclue en septembre 2004.
Si le système a un peu plus d’oxygène, aujourd’hui, il faut convenir que c’est d’abord et avant tout grâce à l’arrivée de ces nouveaux fonds en provenance d’Ottawa.
Pour l’avenir, maintenant, force est de constater que les grandes orientations des trois partis sont assez similaires. S’il y avait une recette magique en santé, depuis le temps, ça se saurait. Or, tous ce que les partis peuvent faire c’est d’essayer de combler des besoins qui grandiront toujours plus vite que les ressources financières du gouvernement.
Mais que la santé soit la «première priorité» ou pas, tout le monde sait qu’on va finir par engager les 1500 nouveaux médecins qui sortiront de nos universités d’ici 2011. Et la pénurie est telle qu’on ne va pas laisser au chômage aucune des infirmières qui sortiront de nos institutions d’enseignement.
Tous les partis proposent d’améliorer la situation dans les urgences, d’essayer de les désengorger par des cliniques sans rendez-vous et de limiter les listes d’attente. On ne va pas y changer grand-chose en décrétant que ce sera la «première priorité».
En fait, en demandant aux électeurs de le réélire parce qu’il est le seul à faire de la santé sa «première priorité», tout ce que M. Charest va réussir, c’est de rappeler à tout le monde que c’était déjà sa promesse lors de la dernière campagne.
Or, en ces matières, c’est un terrible aveu d’échec que de demander une deuxième chance.
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