DU NOUVEAU DANS LE CYBERESPACE QUÉBÉCOIS

« LA NATION » entre en scène

Le combat pour la survie, l'affirmation et l'épanouissement culturel, économique, social et politique de la nation québécoise

A6e612fe8c857a77ffa1872bb62f7605

Chronique de Richard Le Hir

De Vigile à La Nation


En 2010, quinze ans après le référendum de 1995 dans lequel mes fonctions de ministre délégué à la Restructuration responsable de la préparation des études référendaires m’ont propulsé bien malgré moi à l’avant-scène, j’ai repris contact avec l’univers politique en intervenant de plus en plus régulièrement sur le site Vigile, aux encouragements de son fondateur et animateur, Bernard Frappier, dont j’en profite pour saluer la mémoire.


En 2012, gravement malade et sentant sa fin proche, Bernard Frappier commença à m’associer au fonctionnement de Vigile avec l’idée de m’en confier la relève à son décès qu’il savait imminent et qui survint effectivement en septembre 2012, quelques jours après le retour au pouvoir du Parti Québécois sous la houlette de Pauline Marois.


L’animation d’un site comme Vigile est une tâche très lourde. Bernard Frappier y consacrait tout son temps, 18h/j, 7j/s, 12m/a. Revue de presse quotidienne des grands titres de l’actualité nationale et internationale, sélection des textes retenus, lecture et sélection des articles soumis par les lecteurs, modération des commentaires, mise en ligne du tout, un véritable esclavage si la tâche n’est pas morcelée et répartie entre plusieurs personnes.


Alimenter et faire fonctionner un tel site quotidiennement à un degré élevé de qualité, recruter, intéresser et motiver des collaborateurs sans moyen de les rémunérer, et se défendre contre les attaques en justice de ceux qui cherchent par leurs manœuvres à vous discréditer dans l’arène politique ou vous empêcher de diffuser des informations sur leurs magouilles ou leurs malversations en ne disposant que d’un budget famélique requière un niveau d’énergie et d’engagement qui use et désabuse rapidement même les plus résistants.


D’autant plus qu’il faut demeurer en tout temps à la fine pointe de l’information, à l’affût de la moindre évolution dans la dynamique des événements ou dans l’opinion publique, de manière à commenter intelligemment et rapidement les développements lorsqu’ils surviennent. Et le fait que ces événements puissent s’inscrire aussi bien dans le temps court que dans le temps long ne fait qu’ajouter au défi intellectuel de la tâche.


Mon départ de Vigile et le lancement de La Nation sont donc surtout le résultat de cette usure, d’un certain désabusement, du désir de ne pas m’encroûter ni de m’incruster, combinés à ma découverte d’un changement de la dynamique* en cours dans le temps long dont j’ai commencé à percevoir les effets il y a environ un an et demi, et que j’ai évoqué dans Le Québec tout détricoté.


La nation est en danger


Depuis cet article, ma compréhension de l’importance de l’histoire et de la démographie dans la définition de l’identité québécoise et de l’avenir de la nation s’est considérablement affinée, comme l’illustrent plus particulièrement quelques uns de mes éditoriaux parus sur Vigile au cours des derniers mois :



La nation est en danger, et il est devenu urgent de comprendre l’ampleur et la portée de celui-ci pour élaborer une stratégie qui permettra de le contrer, le maîtriser, et le retourner à notre avantage.


C’est cette urgence qui m’amène désormais à consacrer tous mes efforts à sa défense et son illustration, un peu comme les poètes de La Pléiade consacrèrent les leurs à la défense et l’illustration de la langue française (1549) pour en généraliser l’utilisation dix ans après l’Ordonnance de Villers-Cotterets qui en imposait l’usage devant les tribunaux et dans l’administration publique.


La Nation et le drapeau du Québec


C’est donc aujourd’hui, en ce jour du soixante-dizième anniversaire de l’adoption par l’Assemblée nationale du fleurdelysé comme drapeau du Québec, que je lance le site à partir duquel je m’exprimerai désormais. Et je profite de l’occasion pour illustrer immédiatement dans sa présentation visuelle la filiation qui existe entre le drapeau du Québec tel que nous le connaissons et le pavillon de la marine marchande de la Nouvelle-France dans la seconde moitié du 17e siècle.


La croix blanche, c’est la croix de Saint Michel, un des symboles de la monarchie française. Voici qu’en dit Wikipédia :



Les croisades instaurent la coutume de se distinguer au combat par des croix de couleurs différentes, croix qui pour des raisons pratiques se réduisent bien souvent à des doubles sautoirs. À la croix guerrière, est associée la figure de Saint Michel « capitaine des armées célestes ». Invoquer pour son camp l’archange combattant Satan est une manière d’insulter son ennemi sinon de l’envoyer symboliquement au diable. À partir de 1300, au cours des campagnes de Flandre, les armées royales prennent l’habitude d’arborer sous l’invocation de saint Michel une croix blanche, d’abord en bande ou en croix latine. À la bataille de Mons-en-Pévèle en 1304, la tactique prévaut sur le symbole, la couleur sur la forme, et les chevaliers français se ceignent avant de partir au combat d’écharpes blanches de rencontre pour servir de signe de ralliement juste avant la charge.



La guerre de Cent Ans est l’occasion d’exalter le symbole de la croix blanche, opposée à la croix rouge d’Angleterre. En 1355, Jean Ier d’Armagnac, exige de ses soldats de porter une croix blanche sur la frontière de Guyenne. Durant l’été 1417, devant la menace des troupes anglaises d’Henri V qui combattent avec l’emblème de la croix rouge, les habitants d’Orléans en état de prendre les armes reçoivent l’ordre de porter notamment une heuque bleue. »


Et je rajoute que Saint Michel était l’inspirateur de Jeanne d’Arc.


Quant au blason sur fond bleu orné de trois fleurs de lys or, il s’agit de celui de la monarchie française.


Les origines françaises et catholiques du drapeau québécois adopté en 1948 ne peuvent traduire plus clairement la volonté du gouvernement de l’époque de revendiquer cette filiation. Ce drapeau se situe dans la continuité de la présence du crucifix que le premier ministre Duplessis avait fait installer au-dessus du trône de la présidence au Salon bleu de l’Assemblée Nationale, non pas tant pour marquer notre fidélité à la religion catholique que pour défier et, connaissant l’homme, peut-être même narguer la couronne britannique, également à la tête de l’église anglicane. Une façon pour Duplessis de dire « Notre Dieu est supérieur au vôtre ».


D’où la consternation que j’éprouve toujours devant ceux qui se réclament des Patriotes de 1837 et de leur drapeau vert blanc rouge, le vert symbolisant les Irlandais, le blanc les Canadiens-français et le rouge les Anglais, unis dans leur effort révolutionnaire pour renverser la couronne britannique et instaurer une république.


Et le pire, c’est que ceux qui le font n’ont jamais même pris la peine de lire attentivement jusqu’au bout le projet de la constitution dont les Patriotes souhaitait doter leur république.


S’ils l’avaient fait, ils auraient découvert en toute fin l’article 18 :


18. Que les langues française et anglaise seront en usage dans toutes les affaires publiques.


(sic)


Il faut croire que nos Anglos ne l’ont pas lu non plus. S’ils l’avaient fait, ils se seraient découverts une fibre de Patriotes, à moins que leur attachement à la couronne britannique ne soit plus fort que leur attachement à la langue anglaise.


Houhou la SSJB ! Il est temps d’allumer !


Mais blague à part, ce que nous révèle cette comparaison, c’est l’existence de deux grands courants dans la politique québécoise, un courant traditionnaliste et conservateur qu’incarnaient à la perfection Maurice Duplessis et son Union Nationale, et un courant révolutionnaire prétendument progressiste qu’on retrouve aujourd’hui chez les partisans de Québec Solidaire. Le PQ, la CAQ et le PLQ se cherchent entre les deux.


Quant à La Nation, son choix est clair, la fidélité à nos racines historiques et à un nationalisme culturel fondé sur l’usage exclusif du français comme langue commune et langue d’État. Sont Québécois à nos yeux tous ceux qui adhèrent à cette proposition, peu importe leur race, leur religion, leur origine ethnique ou leur langue maternelle.


Dans les prochains mois, nous approfondirons notre connaissance et notre compréhension de la situation actuelle en examinant aussi bien notre environnement interne que notre environnement externe, nous identifierons nos forces et nos faiblesses, nos défis et les occasions qui se présentent à nous, et nous tenterons de dégager les principaux axes stratégiques sur lesquels la nation québécoise devrait déployer son action.


Pour quiconque tenté d’en douter à la lecture de ce qui précède, l’indépendance politique est l’aboutissement normal de toute nation en pleine possession de ses moyens. Encore faut-il qu’elle se donne la peine de s’en doter. Et en guise de clin d’œil aux référendistes forcenés, l’aboutissement ne commence pas par un référendum. Il finit par un référendum, à la toute fin du processus.


21 janvier 2018



* En politique comme en physique, la dynamique est la résultante des forces en présence en fonction de leur poids relatif et de la vitesse à laquelle elles se déploient dans l’espace et le temps.



Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé