La loi 101 doit être appliquée au cégep, réclament les militants péquistes

Le colloque est le premier d’une série de trois qui préparent le XVIe congrès de la formation politique, prévu pour 2011.

Cégep en français

Montréal — La loi 101 devrait s’appliquer dans les cégeps du Québec. C’est la position qu’une majorité de militants du Parti québécois ont appuyée, lors du colloque que la formation politique tient à Montréal en fin de semaine.
Le thème en est le «développement culturel» et a révélé, d’une part, la grande inquiétude du PQ à l’égard de la situation du français à Montréal ; et, d’autre part, sa volonté de mettre l’accent sur les questions identitaires, entre autres en déposant de nouveau dès la semaine qui vient un projet de loi sur l’identité.
La présidente du parti (sic), ce matin, Jonathan Valois, a tenté d’illustrer l’inquiétude lancinante des péquistes à l’égard du français, en ces termes : «Des fois, ça nous énerve quand je ne suis pas capable de m’acheter un baguel en français. Ça m’énerve. Et ça fait partie du quotidien des Montréalais.»
«Juteuse question»
Les autorités du parti redoutaient la «juteuse» et «passionnelle» question — comme l’a qualifiée le député Pierre Curzi, responsable de la thématique — de l’application de la loi 101 au cégep. Elle a déjà déchiré la formation dans le passé, notamment lors de l’adoption du dernier programme, au Congrès de 2005. Mais ce samedi, il n’y eut que quelques interventions très nuancées en opposition à cette mesure, lors de l’atelier consacré à cet «enjeu».
Les militants n’ont toutefois pas entériné la mesure formellement, même si le Comité national des jeunes a demandé qu’un vote soit pris sur la question, ce qui leur a été refusé par le président d’assemblée. Il faut savoir que l’exercice de la fin de semaine demeure un colloque. «On n’est pas là pour décider quoi que ce soit », disait la députée Louise Beaudoin, jeudi, lors d’un entretien avec Le Devoir à propos du colloque (aussi qualifié de conseil national dans les papiers officiels). «On veut discuter, réfléchir, entendre : il n’y aura pas en sortant de là de prise de position», a-t-on insisté au parti. Le colloque est le premier d’une série de trois qui préparent le XVIe congrès de la formation politique, prévu pour 2011.
Lors de l’atelier intitulé «le renforcement de la langue française au Québec et à Montréal», Pierre Curzi a d’emblée affiché ses couleurs au sujet de l’application de la loi 101 au niveau collégial. «Je penche vers cette solution-là », a-t-il dit en soulignant que son comité avait fait des études sur la question et exploré une foule de solutions. «Il semble bien qu’on ait le choix entre ne rien faire ou appliquer la loi 101 au cégep», a-t-il résumé. Il a écarté la mesure proposée par l’ancien conseiller des Parizeau et Bouchard, Jean-François Lisée, soit d’unifier le réseau collégial et d’y donner 75% des cours en français et 25% en anglais. «Ça ne semble pas vraiment correspondre à tout ce qu’on souhaite», a tranché M. Curzi. Aucun des intervenants n’a d’ailleurs appuyé cette proposition.
Le président de la commission politique, Daniel Turp, s’est aussi montré favorable à une telle option qu’il a décrite comme «optimale» en ajoutant «c’est là où on est rendus». L’ancien député de Mercier en a profité pour dresser un portrait inquiet de la situation du français à la faculté de droit de l’Université de Montréal, où il est retourné enseigner après un intermède de près de six ans. «Je vis l’attraction de l’anglais», a-t-il témoigné. Le nombre d’étudiants lui demandant la permission de faire les examens en anglais a explosé, a-t-il soutenu, comme les conversations en anglais, même entre étudiants francophones, dans les couloirs.
Au reste, le nouveau président du Comité national des jeunes (CNJ) du PQ, Alexandre Thériault-Marois, a rappelé que c’est le CNJ, avec le Mouvement Québec français, SPQ-Libre et Bernard Landry, qui avaient tenu à «relancer ce débat». M. Thériault-Marois a rappelé que sur cette question, l’ancien premier ministre avait changé d’idée puisque lorsqu’il était au pouvoir, il avait rejeté cette solution. «Le fruit est mûr actuellement. On n’a plus le choix, les chiffres parlent d’eux-mêmes», a dit M. Thériault-Marois, résumant la position de M. Landry. Le président du CNJ a soutenu que 50% des allophones fréquentent les cégeps anglais. Par conséquent, «une grande partie de ceux-là qui vont ensuite travailler en anglais et utiliser l’anglais à la maison». De plus, à son sens, le moment est propice pour adopter une telle mesure autrefois qualifiée de «radicale» : «On n’a plus non plus un référendum imminent.» Autrement dit, les souverainistes ont moins de clientèles à effaroucher. «C’est un choix difficile. Mais c’est un choix qui est à faire», a-t-il insisté. D’autres péquistes qui ont refusé cette solution dans le passé, comme Camil Bouchard et Louise Beaudoin, ont admis aujourd’hui être prêts à s’y ranger.
Partisan de l’application de la loi 101 au cégep, le syndicaliste Marc Laviolette a expliqué qu’à son sens, il était temps d’adapter la loi 101 à son époque. Lorsqu’elle a été adoptée, en 1977, les niveaux d’enseignements nécessaires à l’obtention d’un emploi étaient principalement le primaire et le secondaire. «En 2009, ce n’est pas suffisant», a expliqué le vice-président du club politique péquiste SPQ-libre. Or, lorsqu’un jeune fréquente le cégep anglais dans le secteur professionnel ou général, les conséquences seraient risquées : «Si t’apprends ta technique en anglais, ce n’est pas vrai que tu vas travailler en français. Si [tu fréquentes le secteur] général en anglais, c’est pas vrai que tu vas aller à l’université francophone après. Tu vas continuer au niveau anglophone.»
Projet de loi sur l’identité
Qu’en pense Pauline Marois? Pour l'instant, on l’ignore. Elle s’y était opposée dans le passé, mais a soutenu cette semaine que des «électrochocs» étaient nécessaires pour relancer la défense de la langue française. Elle a même appuyé l’idée d’étendre l’application de la Loi 101 aux Centres de la petite enfance (CPE). Après son discours de clôture, qui commencera à 11 h dimanche, un point de presse devrait avoir lieu où elle pourrait préciser sa position.
Chose certaine, elle a signifié aujourd’hui vouloir remettre l’accent sur les questions identitaires.
Son parti déposera un projet de loi la semaine prochaine à l’Assemblée nationale pour forcer Jean Charest à se commettre sur ces questions. Le texte s’apparentera à l’autre projet de loi, sur l’identité, déposé en 2007. Comme à l’époque, a annoncé la chef péquiste, il «réaffirmera que nous sommes attachés à la laïcité de l’État, à l’égalité entre les hommes et les femmes et à la prédominance du français! Une loi qui s’assurera que cet état de fait soit connu de tous et qu’il soit respecté!» La laïcité serait toutefois interprétée en fonction du respect du patrimoine historique québécois. Autrement dit, la croix pourrait demeurer sur le Mont-Royal et le crucifix, au Salon bleu. «Les accommodements, quand ils sont déraisonnables, ils doivent être interdits et c’est l’État qui doit tracer la ligne», a-t-elle aussi déclaré. Selon Pauline Marois, il faut que le PQ défende les valeurs québécoises, «parce que personne ne le fera à notre place. Surtout pas Jean Charest».
Le Devoir


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