OTTAWA | Décidément, le sort continue de s’acharner sur Justin Trudeau sur la scène internationale.
Le premier ministre canadien accueillait jusqu’à hier à Montréal de hauts dirigeants européens.
Le 17e sommet Canada-Union européenne était l’occasion pour M. Trudeau et son invité, le président du Conseil européen Donald Tusk, de défendre un traité de libre-échange controversé.
Les deux hommes ont multiplié les poignées de mains chaleureuses. Ils ont trinqué à la santé des valeurs communes qu’ils partagent, comme la liberté, la démocratie, l’ouverture à l’autre. M. Tusk a encensé la politique étrangère de Justin Trudeau, qui avait bien besoin d’encouragement.
Mais à 6000 km de distance, les députés français leur ont fait de l’ombre.
La France avait la chance d’approuver officiellement le texte de l’Accord économique et commercial global (AECG) ce mercredi. Un vent de contestation a fait dérailler la manœuvre.
Un « oui » français serait tombé à point nommé pour Justin Trudeau.
D’abord, il aurait permis au premier ministre de mettre de la chair autour de l’os d’un bref sommet canado-européen au menu très léger.
Si léger qu’on peut se demander si la rencontre internationale, organisée dans le patelin de M. Trudeau à quelques mois des élections fédérales, ne relevait pas davantage de l’exercice de relations publiques.
Une ratification française aurait aussi donné à Justin Trudeau des munitions pour défendre l’AECG.
Le premier ministre a plutôt été contraint de jouer sur la défensive en clôture du sommet.
Résistance là-bas...
Ici comme en Europe, l’Accord économique et commercial global (AECG) continue de susciter de la grogne.
Jusqu’à présent, 13 des 28 États européens ont ratifié l’AECG. Plusieurs autres, et non les moindres, ne semblent pas pressés d’y apposer leur signature.
En plus de la France, l’Allemagne et l’Italie manquent toujours à l’appel.
Les Français se posent notamment des questions sur la qualité de notre bœuf. Le Canada permet l’utilisation de pesticides, d’herbicides et d’antibiotiques interdits en Europe.
Le Canada a quant à lui apposé son sceau d’approbation à la première occasion, il y a maintenant plus de deux ans.
... Et ici
Le traité est tout de même en vigueur en bonne partie à l’heure actuelle, puisqu’il a déjà été adopté par le Parlement européen, en 2017.
Depuis, le commerce entre le Canada et l’Europe a grimpé de plus de 9 %, selon Ottawa.
Sauf que les Européens semblent avoir profité plus que nous de l’abolition des barrières tarifaires.
Le Nouveau Parti démocratique rappelle que depuis la mise en œuvre de l’AECG, notre déficit commercial avec l’Europe s’est creusé de plusieurs milliards de dollars, et cela en seulement quelques mois.
Ce n’est pas banal. Un bilan commercial négatif (la différence entre les exportations et les importations) est susceptible de faire chuter la valeur d’une devise, en l’occurrence le dollar canadien.
Justin Trudeau a admis que les entreprises canadiennes ne suivent pas la cadence imposée par leurs compétitrices outre-Atlantique.
« Effectivement, on a encore du travail à faire pour qu’on puisse profiter pleinement des opportunités que nous avons », a dit le premier ministre en point de presse.
Avec un peu de chance, d’importants partenaires européens offriront à Justin Trudeau les petites victoires qu’il convoite sur la scène internationale avant les élections d’octobre.