Conditions de travail inhumaines, personnel à bout de souffle et patients en danger : le système de santé québécois est gravement malade selon les centaines de personnes qui ont marché à Montréal samedi pour réclamer la démission du ministre Gaétan Barrette.
« La réalité horrible des travailleurs de la santé, je la vis tous les jours et j’ai peur d’y laisser ma peau », a lâché sans détour Cecilia Herrera, préposée aux bénéficiaires, alors que ses yeux se remplissaient de larmes.
« Jusqu’à maintenant, j’ai tenu le coup, a-t-elle poursuivi. Mais je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir le faire encore. »
Ce témoignage déchirant, Mme Herrera est loin d’être la seule à l’avoir livré samedi, alors que plus d’un millier de citoyens et de membres du réseau de la santé se sont rassemblés à la place Émilie-Gamelin pour entamer une marche organisée par Québec solidaire.
Les manifestants se sont calmement rendus jusqu’aux bureaux montréalais du premier ministre Philippe Couillard pour y déposer une pétition de 54 000 signataires exigeant le départ du ministre de la Santé Gaétan Barrette.
Correctifs urgents
Au cours des dernières semaines, de nombreux travailleurs de la santé ont pris la parole pour contester leur surcharge de travail. Alors que le ministre de la Santé disait être à leur écoute, le gouvernement a conclu une entente avec les médecins spécialistes prévoyant une hausse de leurs salaires de 2 milliards $ sur 10 ans.
Selon le député de Québec solidaire Amir Khadir, le ministre Barrette a « perdu la confiance de tout le monde, incluant les gens de son équipe ». Le premier ministre Couillard doit donc le remercier et apporter des « correctifs urgents » au système de santé.
« La responsabilité première doit reposer sur les épaules du premier ministre qui a nommé [Gaétan Barrette]. Le véritable responsable de la désorganisation actuelle, du découragement du personnel, de la détérioration des services dans le réseau de la santé, c’est Philippe Couillard », a-t-il déclaré samedi.
Intransigeant
Les manifestants n’y sont pas non plus allés de main morte pour dénoncer « l’intransigeance » du ministre Barrette et les effets néfastes de sa réforme.
« Quand j’ai commencé à travailler comme infirmière il y a 40 ans, on avait le temps d’écouter nos patients. Mais petit à petit, les libéraux sont arrivés au pouvoir, et les tâches se sont décuplées, alors que les ressources ont diminué », a raconté l’infirmière bachelière Suzanne Hudon.
Depuis l’arrivée en poste de Gaétan Barrette, qu’elle qualifie de « manipulateur narcissique », Mme Hudon dit ne plus compter le nombre de collègues qu’elle a vus « se brûler ». « J’en ai vu qui sont décédés aussi, à cause du stress et tout ça », a-t-elle mentionné.
Cri du cœur contagieux
Plusieurs travailleurs ont souligné que le cri du cœur de l’infirmière Émilie Ricard devenu viral sur Facebook récemment les avait encouragés à revendiquer de meilleures conditions de travail.
« Je me suis vraiment reconnue dans ce qu’elle disait. Je pense que ça a fait boule de neige, et c’est tant mieux », s’est réjouie la préposée aux bénéficiaires Coralie Dupuis.