Pour être efficace, la lutte contre le racisme systémique doit pouvoir bénéficier de l’appui de politiciens qui en comprennent non seulement l’importance, mais la vraie nature et qui savent s’y référer de façon responsable.
Depuis plusieurs mois déjà, plusieurs groupes militants au Québec dénoncent le racisme systémique et demandent au gouvernement de mettre sur pied une commission sur ce phénomène. Du coup, ils ont permis d’attirer les projecteurs sur des faits qui méritent notre attention. Au cours des dix dernières années, la population carcérale autochtone a augmenté de 46,4 %. Celle des Noirs, de 90 %. Avec un même CV, un candidat au nom de famille québécois francophone a 60 % plus de chances d’être invité à une entrevue d’embauche qu’un candidat portant un nom à consonance étrangère.
Leur activisme a produit ses effets, au point où le phénomène du racisme systémique fait régulièrement l’objet de débats dans la sphère publique. En août dernier, Philippe Couillard a même promis une réflexion sérieuse sur la question. Des avancées concrètes se font attendre, mais, chose certaine, les politiciens au pouvoir ont tendu l’oreille. Ceux qui sont assis à la table avec ces politiciens devraient donc lâcher le mégaphone et établir le dialogue chirurgical susceptible de faire avancer le dossier.
Ceci est d’autant plus vrai que le concept même de racisme systémique n’est pas évident à articuler. Le racisme est imputé aux croyances et à l’attitude d’un individu, mais le même terme, lorsqu’on y ajoute le mot « systémique », ne concerne alors plus les croyances et attitudes individuelles, mais plutôt les effets discriminatoires qui résultent de la manière dont la société est organisée. Ces nuances sont mieux comprises par la société en ce qui concerne la discrimination faite aux femmes, tantôt individuelle, tantôt systémique.
Ceux qui dénoncent le racisme systémique ont la lourde tâche d’expliquer que les Québécois, à l’exception de certains, n’ont pas de croyances ou d’attitude racistes. Mais l’organisation de la société fait en sorte que les personnes racisées se trouvent à certains égards discriminées, sans qu’une personne en particulier puisse en être tenue responsable.
Ceci peut porter à confusion, surtout lorsque des individus dénonçant le racisme systémique illustrent leur propos par des exemples de racisme individuel. Voilà un beau cocktail pour que le commun des mortels s’y perde, et pour que certains chroniqueurs soulèvent l’épouvantail d’un complot des minorités contre le Québec. Il y a de quoi discréditer l’importance du sujet aux yeux de la population.
C’est pour cette raison que les leaders qui défendent le dossier n’ont pas droit à l’erreur. La semaine passée, Amir Khadir a été maladroit lorsqu’il a assimilé à du racisme systémique le fait que moins de 2 % des nominations du Conseil exécutif de Philippe Couillard proviennent des minorités visibles. Selon ses propos rapportés par La Presse : « Personne ne peut prétendre que Philippe Couillard est raciste. Mais même si le responsable ne fait pas de discrimination raciale, le résultat de l’administration, de la manière dont c’est conçu, ça néglige, ça ignore les problèmes de discrimination, ça fait en sorte qu’il y a exclusion systématique, ce qu’on appelle racisme systémique ».
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