Vastel, comme on l'appelait, a provoqué hier sa dernière onde de choc. Le journaliste audacieux et le chroniqueur irrévérencieux est décédé à la suite d'un cancer.
Âgé de 68 ans, Michel Vastel s'est éteint entouré de sa famille, dans sa résidence de Bedford dans les Cantons-de-l'Est. La rédactrice en chef du magazine L'actualité, Carole Beaulieu, qui le connaissait de longue date, depuis l'époque où tous deux étaient journalistes au Devoir, était hier au chevet de Vastel. Elle assure qu'il est parti en toute sérénité, après avoir pris soin de scénariser son départ.
Mardi dernier, il a dicté à Mme Beaulieu un court texte à diffuser sur son carnet (blogue) le jour de son décès pour saluer ses lecteurs. «Allez! Je vous dis au revoir. On a tout de même fait du bon boulot ensemble!», peut-on y lire. «C'était un ami et une inspiration. Il avait une passion profonde pour son métier, et ce feu ne s'est jamais éteint», a souligne Carole Beaulieu.
Au fil de sa carrière, Michel Vastel a été de toutes les tribunes journalistiques. Il se multipliait à l'écrit, à la radio, à la télévision et plus récemment, sur son carnet de L'actualité. Il était un véritable bourreau de travail.
«Il était un scripto-moteur. C'était phénoménal. Il avait toujours l'esprit au travail», se rappelle Bernard Descôteaux, actuel directeur du Devoir et ancien collègue de Vastel. Reconnu comme un spécialiste au regard aiguisé de la politique canadienne, c'est au Devoir que Michel Vastel fait ses premières armes sur la colline parlementaire à Ottawa.
Par la suite, il passe à La Presse, revient au Devoir, travaille ensuite pour Le Soleil, Le Droit, Le Quotidien et termine sa carrière en signant une chronique dans le Journal de Montréal. Durant toutes ces années, il commente de façon régulière l'actualité à la radio et à la télévision.
En plus de ses activités journalistiques, il est auteur. Il publie ainsi un livre sur la mafia, en 1987 (Le Neveu), puis des biographies politiques: celles de Pierre Trudeau, de Robert Bourassa, de Lucien Bouchard et de Bernard Landry. En 2005, il signe un livre sur le cauchemar vécu par Nathalie Simard, victime d'abus sexuels lorsqu'elle menait une carrière artistique.
Né en France en 1940, Michel Vastel immigre au Canada en 1970, après avoir tâté du journalisme au Nord Éclair. Il deviendra attaché de presse de Bernard Pinard, ministre des Transports sous le gouvernement libéral de Robert Bourassa. Puis, il passera au Conseil du patronat avant de revenir au journalisme.
Newsgetter
Il était ce qu'on appelle un newsgetter, profitant d'un large réseau de contacts pour débusquer la nouvelle. Sans compromis, il décortiquait avec impertinence l'actualité, forçant le débat.
Par exemple, en pleines élections fédérales de 1997, il publie des extraits d'un livre de Jacques Parizeau, qui est à paraître. Le chapitre s'intitule «La reconnaissance internationale d'un Québec souverain». La perturbation de la campagne du Bloc, québécois déjà mal en point, est immédiate. La famille souverainiste est ébranlée.
Avec son «front de boeuf», comme plusieurs journalistes qui l'ont connu le soulignaient hier, Michel Vastel avait la réputation de parfois tourner les coins ronds. Du coup, une expression était née dans la profession: la «vastelisation de l'information».
«C'était un casse-pied professionnel, mais surtout un être d'exception», lance avec affection Luc Lavoie, vice-président chez Quebecor et ami de Vastel depuis trente ans. «Je lui ai rendu visite la semaine dernière. On savait que c'était la dernière fois. On a pu se dire à quel point on s'étaient aimés», dit-il, la gorge nouée.
Manon Cornellier, chroniqueuse politique au Devoir, a également salué son ami et mentor, qui l'avait épaulée à ses débuts comme correspondante parlementaire à Ottawa. «Il avait une éthique de travail admirable: il commençait sa journée en lisant tous les journaux. C'était une religion. Il était toujours en train de s'informer», raconte-t-elle en soulignant toutefois que l'homme «avait brûlé la chandelle par les deux bouts». La voix rauque de fumeur de Michel Vastel ne trompait personne. «Il vivait comme dans la Formule 1, qu'il adorait, la pédale au plancher!», lance Luc Lavoie.
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