Confiscation des passeports des apprentis djihadistes, assignation à résidence des suspects, contrôle policier des passagers en partance ou en provenance de Syrie et d'Irak... Le premier ministre britannique, David Cameron, doit détailler, lundi 1er septembre devant le Parlement, une nouvelle panoplie législative destinée, selon lui, à contrer la menace terroriste que font courir les jeunes Britanniques enrôlés par l'Etat islamique (EI) susceptibles de frapper leur pays d'origine.
Depuis la révélation des origines anglaises de l'homme qui apparaît comme bourreau du journaliste américain James Foley dans la vidéo revendiquant son exécution, les pressions se sont multipliées, à droite comme à gauche, sur le premier ministre britannique pour réclamer un durcissement de la législation. Le terrorisme « n'est pas un problème nouveau en Grande-Bretagne, a rappelé M. Cameron vendredi. Mais, avec l'Etat islamique, nous sommes confrontés à la menace la plus grave que nous ayons jamais connue. » Les autorités estiment à « au moins 500 » le nombre de ressortissants britanniques partis « en Syrie et potentiellement en Irak » tandis que quelque 250 autres seraient déjà rentrés au Royaume-Uni.
« DES TROUS DANS NOTRE ARSENAL » JURIDIQUE
Au moment où le premier ministre annonçait ainsi, vendredi, son intention de proposer une nouvelle législation antidjihadistes, le Royaume-Uni relevait de « substantiel » à « grave » son niveau d'alerte de sécurité. Ce changement, non perceptible par le public, signifie qu'une attaque est jugée « hautement probable ». Il est lié aux projets terroristes de djihadistes européens combattants en Irak ou en Syrie, même si la ministre de l'intérieur, Theresa May, a affirmé ne disposer d'aucun renseignement précis à ce sujet.
« Il est évident qu'il y a des trous dans notre arsenal » juridique, a admis David Cameron en annonçant un projet de loi destiné notamment à « faciliter la confiscation des passeports » et donc à empêcher les départs vers les zones de combat. Selon des informations divulguées par la presse, les dispositions qu'il doit annoncer lundi viseraient aussi à obtenir la collaboration de l'Allemagne et de la Turquie pour empêcher le retour des jeunes djihadistes et à faciliter la communication aux services de renseignement des identités collectées par les compagnies aériennes.
Un autre volet viserait à renforcer les possibilités d'assignation à résidence de suspects. Sur ce point, David Cameron doit obtenir l'accord des Libéraux démocrates (LibDem), avec lesquels il gouverne et qui sont particulièrement pointilleux sur la défense des libertés publiques. En 2011, sous la pression des LibDem, l'actuelle coalition a adouci les dispositions particulièrement répressives et contestées votées par les travaillistes en 2005, qui donnaient au ministère de l'intérieur le pouvoir d'assigner à résidence des suspects sur la base d'éléments non rendus publics et en dehors de toute procédure judiciaire.
« RÉACTION IMPULSIVE » DE DAVID CAMERON
Les projets actuels tendraient-ils à revenir à ces pratiques que M. Cameron avait critiquées lorsqu'il était dans l'opposition ? N'utilise-t-il pas la menace terroriste pour effrayer et mobiliser l'opinion à l'approche des élections législatives de mai 2015 ? La retentissante tribune de Paddy Ashdown, ancien patron des LibDem, publiée dimanche dans The Observer, exprime ces craintes en critiquant la « réaction impulsive » du premier ministre. Comme d'autres conservateurs, M. Cameron « s'est jeté sur tous les micros pour nous expliquer à quel point nous devrions avoir peur et pourquoi il faut lui confier de nouvelles prérogatives », raille M. Ashdown. « La meilleure défense ne consiste pas à agir au niveau intérieur, mais sur le plan international. »
Etrillant l'appel de M. Cameron à défendre les « valeurs occidentales », l'ancien haut représentant de l'ONU en Bosnie écrit :
« Je ne vois aucune phrase, à part celles de George Bush pendant la guerre en Irak, qui mette davantage en cause notre capacité à gagner cette bataille. Parce qu'elle confirme le discours manichéen des djihadistes selon lequel il s'agit véritablement d'une lutte entre l'Occident et eux et qu'elle aliène les musulmans modérés dont nous avons le plus besoin pour vaincre l'Etat islamique. »
Cette bataille, conclut-il, « ne se gagnera pas au nom de nos “valeurs occidentales”, mais au nom des valeurs universelles qui sous-tendent et unifient toutes les grandes religions, y compris l'islam. »
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