En rétrospective, faire l’exercice de déterminer quel fut l’évènement le plus important en 2020 semblerait trivial et, même, banal tant la pandémie a bouleversé notre quotidien. Évidemment, la Covid-19 est le lauréat du premier prix. Toutefois, au-delà de cette crise sanitaire et peu importe le sens à y donner, il pourrait être tentant de mentionner la victoire (?) de Joe Biden qui ouvrirait une nouvelle ère aux USA. Pas vraiment.
La montée de la Chine
En effet, le 15 novembre dernier à HanoÏ au Vietnam était signé l’accord commercial RCEP, soit le Regional Comprehensive Economic Partnership (RCEP), qui regroupera 15 pays au pourtour du Pacifique, dont la Chine, le Japon et l’Australie. Bref, la plus grande zone de libre-échange au monde qui représentera le tiers de la population mondiale et 35% du PIB mondial. Si l’Inde ne s’était pas retiré des discussions en 2019, c’est au-delà d’un PIB de 40% qui aurait été atteint. En comparaison, l’Union européenne représente un PIB mondial chiffré à 19%.
L’objectif avoué du RCEP est d’étendre cette zone d’échange pour inclure des pays comme le Pakistan, l’Iran, les pays est-africains et éventuellement les pays de la côte ouest de l’Amérique du Sud comme le Chili; inciter l’Inde à réintégrer les discussions demeurera la grande priorité alors qu’elle est destinée à devenir la troisième économie mondiale vers 2030. À terme, c’est au moins 60% du PIB mondial qui est visé.
Même si les grandes banques américaines persistent à déclarer que la Chine n’obtiendra pas le statut de puissance économique #1 avant 2028 en devançant les USA, il y a plusieurs autres indices qui laissent croire que la Chine deviendra la plus importante puissance économique mondiale bien avant 2025. Notamment, la Chine deviendra le plus important raffineur de pétrole dès cette année et aussi le plus grand consommateur en 2022. En ce sens, le retour du parti Démocrate à Washington consacre la Chine comme héritier du trône.
Un essor remarquable et incomparable sur deux générations qui va aussi permettre à la Chine de devenir la puissance technologique #1 vers 2025 dès qu’elle rattrapera son retard dans le domaine des semi-conducteurs et le militaire, soit les 2 seuls domaines qui lui manque sur les 12 secteurs de pointe (robotique, télécommunications, biotechnologies, nanomatériaux, etc..). La Chine sera à la fois la première puissance technologique et économique mondiale en conformité avec sa politique MIC25 (Made in China 2025).
Il y a deux objectifs principaux liés au RCEP : L’internationalisation du yuan et des autres monnaies au détriment du dollar américain et l’accroissement de la richesse des pays signataires avec des PIB en fortes hausses; ce qui viendra gruger des parts de marchés détenues par les pays occidentaux qui verront au mieux la stagnation de leurs PIB respectifs. Alors que le dollar américain possède encore le statut de monnaie de réserve avec plus de 60% des échanges mondiaux, malgré qu’il soit en baisse légère mais constante depuis 20 ans, le RCEP va accélérer la démission et le recul du dollar.
Et comme si cela n’était pas assez, la Chine vient très récemment de conclure une entente de libre-échange ce janvier 2021 avec l’Union européenne au grand dam de l’Administration américaine. Nul ne peut prédire de ce qu’il adviendra du statut de monnaie de réserve à court terme du dollar américain, mais il est fort à parier qu’il ne peut être que menacé. Entre temps, la Chine qui dispose de surplus commerciaux colossaux avec les USA qui avoisinent maintenant les 80 G $US par mois, soit un trillion de $ sur une base annuelle, continue d’utiliser le dollar contre le dollar : Ces surplus en dollars sont recyclés par la Chine pour acquérir des actifs (mines, terres agricoles, ports, aéroports, usines, centrales d’énergie, immobilier, etc.) payés en dollars américains partout sur la planète. Bref, les USA financent l’expansion internationale de la Chine.
Ainsi, la mise sur pied du RCEP viendra réduire l’utilisation du dollar dans les échanges mondiaux; ce qui aura pour effet de rendre l’achat de bons du trésor américains moins pertinent puisqu’en réalité le surplus de dollars américains est « transformé » en bons du trésor qui sont transigés sur les marchés obligataires mondiaux lorsqu’il faut débourser les dollars pour acheter les actifs convoités. Or, ces bons du trésor américains sont émis pour financer la dette américaine. Plus la dette augmentera, plus il y aura d’émissions de bons du trésor et plus il faudra des acheteurs. Et arrivera un moment où il y a une saturation du marché lorsque les institutions privées, les fonds d’investissement, les pays étrangers, etc. ne seront plus au rendez-vous, peu importe les raisons invoquées, d’absorber cette surdose de bons du trésor.
Vers la stagnation durable
La dette nationale américaine s’est accrue de 1,2 trillions de dollars en 2019 et, ce, bien avant la crise du coronavirus. En 2020, cette dette a encore augmenté de 4,2 trillions de dollars et cela a permis de connaître maintenant le niveau de saturation du secteur privé et des autres acheteurs, soit 1,4 trillions de dollars US; le « solde » de 2,8 trillions de dollars a été monétisé; ce qui s’est traduit par la plus forte augmentation de la masse monétaire de l’histoire américaine avec 25% de plus de monnaie en circulation. Le niveau de saturation de 1,4 trillions de dollars signifie que c’est le seuil à partir duquel les taux d’intérêt doivent augmenter pour absorber le solde de la dette à financer ou qu’il y ait une monétisation de celle-ci.
Pour 2021, cette dette devrait augmenter à 5 trillions de dollars et dépendra de l’ampleur que donnera l’administration Biden à son plan de relance économique et aux niveaux impôts sur les grandes richesses qui seront levés. Cela va entraîner encore plus de monnaie en circulation. Normalement, l’accroissement de la quantité de monnaie se traduit par de l’inflation des prix à la consommation à moins que cette nouvelle quantité de monnaie se retrouve « piégée » dans des actifs. C’est ce qui se passe actuellement : Une forte augmentation de la valeur des actifs avec l’envolée des Bourses et la flambée de l’immobilier. C’est la même histoire avec les métaux précieux, dont l’or, et la monnaie virtuelle (bitcoins).
Il y a tellement d’argent à placer que cela fait baisser les taux d’intérêt à des niveaux historiquement bas; plus de 90% des obligations dans le monde se transigent sous les 3% de rendement et plus de 80% d’entre elles sont sous les 2%. Mais tel que mentionné plus haut, il sera difficile de maintenir ces taux aussi bas car le seuil de saturation est atteint. Cette hausse fulgurante de la valeur des actifs a créé des bulles financières et immobilières sans précédent. Toutefois, une hausse des taux d’intérêt est impensable car elle ferait dégonfler très rapidement les bulles immobilières et boursières tout en détruisant les budgets des gouvernements avec une hausse du service de la dette qui deviendrait vite ingérable.
Ainsi, les pays occidentaux se trouvent dans la situation de devoir maintenir des taux historiquement bas quitte à laisser les actifs se gonfler à l’hélium et l’inflation se répandre progressivement. En ce moment, les taux d’inflation sont faibles en Occident; ce qui laisserait passablement de la marge de manœuvre pour monétiser davantage la dette occidentale toute confondue. En fait, si la hausse des actifs est carrément inflationniste, alors la délocalisation des chaînes de production vers des pays émergents a permis de faire baisser les prix à une foule de produits, notamment agricoles; le Québec ne produisant plus que 35% ce qui est consommé ici.
L’inflation se trouve donc à représenter un compromis entre les tendances mentionnées plus haut. Toutefois, sans entrer dans le sujet, il existe des vues divergentes qui affirment que le taux d’inflation est beaucoup plus élevé que les chiffres officiels ne veulent bien l’admettre. Si c’est le cas, on le verra bien assez vite d’ailleurs, le système deviendra vite instable. Une nouvelle république de Weimar presqu’un siècle plus tard n’est-ce pas ?
En fait, un taux d’inflation supérieur à la croissance de la dette serait idéal; cela permettrait d’escompter les dettes nationales pour pouvoir finalement emprunter davantage… Les faibles taux de croissance du PIB conjugués à un fort endettement en Occident sont le reflet direct d’un niveau de vie artificiellement élevé qui se maintient à peine.
Dans un contexte où les pays du RCEP occuperont une plus grande part du gâteau, la proportion du PIB mondial des pays occidentaux diminuera significativement d’ici 2030 avec l’arrivée de l’Inde comme troisième économie mondiale. Ce sont des parts de marché importantes que ces pays viendront grignoter des pays occidentaux actuellement incapables de se réinventer. Et ce ne sera pas uniquement des produits bon marché qui continueront à déferler dans les Wal-Mart, Costco et Canadian Tire de ce monde : Ce sera au tour du secteur des services (banques, assurances, construction, divertissement, etc.) d’être envahi. En somme, de la stagnation économique au menu en Occident pour cette décennie avec China Banking et India Computing…
Go West Young Man !
Plusieurs pays occidentaux connaissent des vagues migratoires qui se multiplient depuis la crise financière de 2008-2009. La démographie joue un rôle de premier plan dans l’économie et le déclin démographique généralisé de l’Occident a amené une forte réduction des tensions inflationnistes et, dans son sillage, la diminution continue, hormis certains sursauts, des taux d’intérêts depuis au moins 20; c’est une tendance lourde qui se vérifie aussi ailleurs comme au Japon qui flirte avec la déflation.
Pour l’Occident, l’immigration apparaît comme une solution pour renverser son déclin démographique et économique; ce qui se traduit par des pressions pour des salaires à la baisse en contrepartie d’un PIB à la hausse. De plus, ces nouveaux « arrivants » vont consommer des services offerts par l’État de sorte que le bilan de l’immigration reste ambigu : Si ces immigrants sont scolarisés, productifs et peuvent contribuer rapidement à la société, alors c’est généralement un avantage. Autrement, c’est un coût économique et social majeur qui nuit considérablement à n’importe quelle contrée. L’immigration pour qu’elle soit efficace doit être planifiée, évaluée et quantifiée.
Au-delà du bilan de l’immigration, la montée de la Chine et des pays du RCEP aura des conséquences certaines sur les flux de population. Au pourtour de l’océan Pacifique, c’est l’avenir économique et technologique mondial qui se joue pour au moins une génération, sinon deux. Cet espace économique va attirer des cerveaux et des capitaux en grande quantité tout en créant de la richesse pour des pays limitrophes. Des provinces comme la Colombie-Britannique ou des états comme la Californie ne tarderont pas à se tourner vers le RCEP comme vient de le faire l’Union européenne sous l’impulsion de l’Allemagne.
Plus de 50% des réfugiés syriens arrivés au Québec l’ont déjà quitté; plusieurs milliers d’immigrants quitteront le Québec et ce processus ne peut que s’accélérer à la mesure du déploiement du RCEP. Encore une fois, le Québec ne sera qu’une terre de passage. Même si actuellement l’immigration semble infinie, elle finira par s’estomper vers 2025. Pour accélérer les départs du Québec, il faudrait « durcir » la loi 101 ou, mieux, déclarer le français langue d’État; une grande partie de ces immigrants, souvent en provenance du Commonwealth britannique, ne veulent tout simplement pas apprendre le français.
De plus, une lutte sans merci pour empêcher les faux réfugiés peu ou pas scolarisés d’entrer au Québec en empruntant le chemin Roxham est de mise; c’est une simple question de justice et d’équité pour éviter des milliards de dollars de dépenses sociales. Le Québec ne peut certainement pas accueillir toute la misère du monde.
Le Québec doit se réinventer
La démographie est une question bien plus complexe qu’il n’y paraît. En fait, c’est un défi collectif qui devrait être parmi les plus importantes priorités. C’est un sujet délicat, mais il faut avoir le courage d’en discuter en toute franchise et sérénité. Si le Québec dispose d’un plan sur ses infrastructures (routières et autres), il devrait certainement être capable d’avoir un plan à long terme sur sa démographie. D’une pierre deux coups, ce serait également le temps d’élaborer un solide plan économique en concert avec la démographie.
Le Québec doit se tourner vers la valeur ajoutée, l’innovation et son riche terroir pour occuper une multitude de niches où la qualité sera plus importante que la quantité; nous ne serons jamais capables d’affronter la Chine et le RCEP sur le terrain de la production de masse.
Protéger et renforcer la langue française, mettre en place une politique démographique moderne, choisir et bien intégrer ses immigrants, se tourner vers l’innovation et son terroir plus que centenaire et mettre en place la stratégie pour parvenir à un Québec de l’avenir est la voie à privilégier malgré des choix déchirants et des décisions difficiles sans aucun doute.
Un projet susceptible de réunir et transcender toutes les générations. Ne serait-il pas le plus merveilleux des projets ?
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1 commentaire
Yves Legault Répondre
9 février 2021La Chine a compris!
La guerre se fait sous deux fronts: militaire et économique.
Dans ces deux mondes, on utilise les mêmes tactiques, le même vocabulaire et on vise les mêmes objectifs.
La guerre, sous ces deux formes, est une outil utilisé par l'oligarchie ploutocratique pour asservir les peuples et les nations du monde entier à ses objectifs d'hégémonie planétaire.
Les fameuses "Georgia stones" sont for éloquentes!
Voici ce que j'ai écris il y a plus de trois ans.
Il représente encore ce que je perçois de la société aujourd'hui.
Je considère que l'esclavage a maintenant revêtu un nouveau déguisement: L'endettement permanent!
L'existence même d'un monopole est contre les intérêts des peuples du monde!
Ça a toujours été ainsi!
C'est ainsi!
Ce sera toujours ainsi!
Il suffit de consulter la feuille de route de quelques uns d'entre eux pour saisir toute l'horreur que le monde subit sous leur autorité basée exclusivement sur le profit:
Nous avons eu les 4 cavaliers de l'Apocalypse 1.0 depuis plus de 3,000 ans: (La bible)
- Mort;
- Guerre;
- Pestilence;
- Famine,
Nous avons les 5 cowboys de l'Apocalypse 2.0 depuis 200 ans: (John Anthony West)
- Le capitalisme;
- La démocratie;
- Le patriotisme;
- La technologie;
- Le spectacle.
Maintenant, nous avons les 9 gardiens de l'esclavage universel avec l'Apocalypse 3.0: les monopoles, fossoyeurs du monde: (YLL)
- L'argent;
- Les armes;
- L'énergie;
- La santé;
- L'alimentation;
- La religion;
- L'instruction publique;
- Les médias;
- La politique.
Qu'est-ce que ça va prendre pour que les peuples du monde s'éveillent?
Il est déjà minuit et quart!