Tout était si clair avant que le mot «islamophobie» ne débarque en ville. Quand le mot «racisme», empreint de gravitas, savait si bien décrire le rejet de l’Autre, intolérablement perçu comme moins intelligent, plus violent, plus libidineux ou moins honnête, à cause de ses origines.
On s’accrochait parfois sur «antisémitisme», mais la plupart s’accordaient pour dire que la persécution millénaire d’un peuple ancien, coiffée de la torture et la mort de six millions d’innocents, était bel et bien un phénomène unique dans l’histoire qui méritait une appellation, néanmoins «contrôlée».
L’islam n’est pas un peuple
Au premier abord, «islamophobie suggère “qu’islam est un peuple et que la critique des religions est l’expression d’un racisme”».
Cette idée n’est pas de moi, mais du dessinateur Charb dans sa Lettre aux escrocs de l’islamophobie qui font le jeu des racistes, terminée deux jours avant sa mort dans l’attentat de Charlie Hebdo.
Mais dans la foulée de l’attentat de Québec, je n’ai trouvé rien d’autre «qu’acte islamophobe» pour qualifier l’assassinat de six Québécois musulmans, dans une mosquée, à l’heure de la prière. Cette fois, c’était le mot juste.
Lorsqu’une personne est victime de violence pour la seule raison qu’elle est musulmane, «racisme» est déficient. Quand on poignarde des juifs dans une synagogue de Jérusalem, ce n’est pas de l’antisionisme, c’est de l’antisémitisme. «Meurtre» n’arrive pas à décrire la décapitation d’un prêtre en train de dire la messe dans une église de France.
Un mot victime des islamistes
C’est l’absolue vérité que les manipulateurs islamistes utilisent «islamophobie» pour intimider, bâillonner les mécréants. Interdiction de questionner le dogme, de critiquer ou de se moquer du Prophète, sinon vous serez jugé islamophobe. Ou tué comme l’équipe de Charlie Hebdo.
Être musulman ne protège personne. Les 70 musulmans massacrés par l’État islamique dans un sanctuaire soufi – le soufisme est l’islam mystique – au Pakistan cette semaine, ils étaient islamophobes?
Sans sa manipulation langagière par les islamistes, le mot «islamophobie» aurait sa place dans nos analyses lorsqu’utilisé dans le bon contexte et non pas en tant qu’arme offensive pour tirer sur tout ce qui bouge.
La motion libérale M-103 condamne «l’islamophobie et toutes les formes de racismes et de discriminations religieuses». Or, personne ne sait exactement de quoi il s’agit, ni qui mérite d’être étiqueté «islamophobe», ni pourquoi.
Puisque nous sommes au Canada, pays de la tolérance à géométrie variable, le débat sur M-103 a viré à la foire d’empoigne au Canada anglais. D’un côté, les méchants Québécois, doublement confirmés racistes depuis l’attentat de Québec (les foules descendues dans les rues en soutien aux Québécois musulmans ne comptent pas), de l’autre, les bons Canadiens, prêts à tout sacrifier au nom d’un multiculturalisme passé au hachoir et transformé en relativisme culturel par les pense-mous.
«M-103 est devenu un panneau réclame sur lequel on affiche ses vertus», ironisait le chroniqueur Rex Murphy dans le National Post de samedi.
Tant que les libéraux refuseront de définir le sens exact du mot «islamophobie» tel qu’utilisé dans la motion M-103, elle va demeurer un miroir aux alouettes.
«Penser sera bientôt un piège», disait l’écrivain algérien Kamel Daoud, menacé de mort pour «islamophobie».
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