L’impact de la délocalisation de la production sur la balance commerciale US. Liliane Held-Khawam

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Très pertinent dans le contexte de la renégociation de l'ALENA

Dans la série sur la balance des paiements et les zooms sur les balances commerciales, voici l’évolution de la balance commerciale américaine.


Nous voyons clairement qu’elle était neutralisée à 0 durant l’ère où les devises du monde devaient être arrimées, selon les Accords de Bretton Woods, au dollar qui lui-même était partiellement couvert par l’or.


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La valeur du dollar devait se référer à un prix fixe de l’or de 35 dollars américains. Le 15 août 1971, le président Nixon décide de suspendre la convertibilité-or du dollar. Le  18 décembre 1971, il signe à Washington au Smithsonian Institute la fin du système monétaire international tel que défini par les accords de Bretton Woods.


Et pourquoi donc a-t-il pris cette décision? Eh bien, les Etats-Unis présentaient pour la première fois une balance commerciale déficitaire, avec un effet de fuite de l’or hors du pays. Un certain général de Gaulle n’a eu de cesse de dénoncer le privilège détenu par la monnaie américaine. Du coup, il mettait la pression sur la Banque de France pour faire échanger au fur et à mesure ses réserves en dollars contre de l’or physique. « En 1968, De Gaulle s’était retiré du Gold Pool de Londres — un cartel gouvernemental qui travaillait activement à contrôler le prix de l’or pour le maintenir en ligne avec les 35 $/once ordonnés par le gouvernement US. « (cf ci-dessous)


Bref, la décision du président Nixon va lever les dernières contraintes à la création monétaire. D’où la pléthore de liquidités dont nous inondent les banques centrales… Enfin, dont elles inondent les circuits fermés de la haute finance internationale et de leurs places boursières fétiches.


La mondialisation de la production


Pourtant ramener toute la problématique de la balance commerciale déficitaire à la question de l’or semble insuffisante du moment que nous sommes dans un système complexe, globale ET financiarisé par des privés, dont le garant final est l’argent public de l’Etat.


Il y a eu autre chose au début des années soixante-dix. Cela correspond à une période-clé de la mondialisation de la planète. Et celle-ci correspond avec la mondialisation de la production. Cela signifie que des entreprises se sont mises à se délocaliser et à produire à l’étranger. Cela a fatalement un double impact sur la balance commerciale: une fois sur les exportations et/ou  une autre sur les importations.


Les entreprises qui délocalisent des bouts de leurs processus de production vont devoir réimporter vers les  Etats-Unis ces produits non finis  pour les intégrer à leurs produits finis. En clair, lors de délocalisation, une partie des coûts qui affectait l’entreprise-mère sur son sol national est dépensée à l’étranger. Le fruit de cette production intermédiaire va devoir traverser la frontière dans le sens étranger-USA, avant d’être incorporée dans le produit final à exporter. La croissance des importations devient alors inévitable. La désindustrialisation et le développement de l’économie de services accompagnent le mouvement général… (voir les graphiques Wikipédia qui malheureusement s’arrêtent en 2004)




Wikipedia





Wikipédia



En comparant simultanément l’évolution des exportations avec celles des importations, nous voyons que les américains importent de plus en plus de biens et des marchandises et exportent des services.


La délocalisation de la production industrielle affecte en quantité et en nature l’économie nationale. Nous voyons des services qui augmente au fil des années jusqu’en 2004.


La balance commerciale américaine globale


La balance commerciale américaine est déficitaire depuis le début des années soixante-dix (septante). Rappelons que ces déficits se transforment en monnaie scripturale bancaire (privée) qui sont autant de dettes pour le peuple américain et autant de bénéfices pour certaines banques commerciales, et non la Fed.



  • La balance commerciale des biens


Nous voyons de manière frappante et interpellante à quel point les deux courbes d’exportation et d’importation des biens sont ressemblantes. Nous n’avons pas d’explication probante à ce stade. Gardons dans un coin de la tête que les produits en cours de fabrication sont comptabilisés à l’entrée du pays au niveau des importations. Une partie de ces produits sera comptabilisée une deuxième fois dans le cadre des exportations. De là, à avoir une telle ressemblance…


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La courbe des importations est toutefois plus marquée, ce qui confirme le déficit de la balance commerciale.


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  • La balance des services est excédentaire


Les services sont le cheval de bataille des grandes multinationales américaines. Pour ce faire, elles ont besoin de la libéralisation des professions réglementées dans les différents pays de la planète. Des pays adeptes du processus se sont regroupés dans le cadre d’un accord appelé TISA qui est beaucoup plus révolutionnaire que ne peut l’être le TTIP ou le CETA.


C’est précisément ce sur quoi travaille actuellement en France le président Macron. Les choses sont différentes en Suisse qui avance dans ce domaine à grands pas grâce à une administration fédérale tout à fait acquise à la cause…


exportations en service américaines


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L’évolution de la bourse américaine


dow Jones hitorique


En fin connaisseur, le marché financier américain sait que les indicateurs de la balance commerciale ne sont pas représentatifs de la réalité économique des entreprises américaines qui se sont globalisées à travers la planète.


La flambée de la bourse est due donc à la rencontre entre des entreprises américaines qui ont conquis la planète et des investisseurs/ actionnaires qui bénéficient de la pléthore de cash qui découle de la création monétaire privée imposée aux Etats pour financer leurs déficits commerciaux par des… dettes publiques.


Les financiers/actionnaires/ gestionnaires d’actifs globalisant ont réussi l’exploit de globaliser les entreprises dont ils se sont emparés et de maintenir les Etats dans un carcan national quant à leur balance commerciale….


Au fait, le Boston Consulting Group nous promet que la concentration des richesses va s’accélérer avec les investisseurs américains en bonne position… http://www.zerohedge.com/news/2017-06-17/richest-americans-will-control-70-countrys-wealth-2021-bcg-says



Cela risque d’être accompagné d’une accélération de la paupérisation et de l’endettement public. Ainsi l’exige le modèle basé sur la monnaie scripturale.


Liliane Held-Khawam


Les exigences du général de Gaulle


« Rien qu’en 1965, il – le général de Gaulle– a envoyé la Marine française de l’autre côté de l’Atlantique pour emporter 150 millions de dollars en or; en 1967, les proportions des réserves nationales françaises détenues en or étaient passées de 71,4% à 91,9%. La moyenne européenne n’était qu’à 78,1% à l’époque.


En 1968, De Gaulle s’était retiré du Gold Pool de Londres — un cartel gouvernemental qui travaillait activement à contrôler le prix de l’or pour le maintenir en ligne avec les 35 $/once ordonnés par le gouvernement US. Trois ans plus tard, alors que l’or était transporté par voie aérienne depuis Fort Knox vers New York pour répondre à la demande étrangère de paiement en or, Richard Nixon mit fin au petit jeu de De Gaulle. Il cessa purement et simplement de payer en or. »


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