L’homme de la situation

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Philippe-Flop a mené le PLQ au fiasco politique

En règle générale, le Parti libéral du Québec attend la dernière étape de la campagne électorale pour dépoussiérer l’épouvantail référendaire et battre le rappel des électeurs fédéralistes, comme s’il était à court d’arguments pour justifier le renvoi du Parti québécois dans l’opposition.

Philippe Couillard a jugé nécessaire de sortir le Bonhomme Sept Heures sans même attendre le déclenchement officiel des hostilités, accusant la première ministre Marois de cacher ses véritables intentions. Faut-il comprendre que le chef libéral ne trouve plus le terrain économique suffisamment sûr ?

Il est vrai que son opposition à l’investissement gouvernemental de 115 millions dans l’exploration pétrolière à l’île d’Anticosti risque d’en laisser plusieurs perplexes. Comment peut-il à la fois accuser le PQ de nuire à la création de la richesse et refuser de s’enquérir des possibilités d’exploitation d’une ressource qui a même fait la fortune de Terre-Neuve, jadis le parent pauvre de la fédération ?

Ce qui saute aux yeux ces jours-ci, c’est moins le fiasco économique et budgétaire dont M. Couillard tient le gouvernement pour responsable que le fiasco politique qui risque de maintenir le PLQ dans l’opposition durant les quatre prochaines années, comme le laissent prévoir les chiffres du dernier sondage CROP-La Presse.

À première vue, le PQ semble tout simplement avoir récupéré, à la faveur du débat sur la charte de la laïcité, 8 des 11 points que la CAQ a perdus depuis les élections du 4 septembre 2012. Dans son sondage de novembre, donc avant la présentation du projet de loi 60, CROP le créditait en effet de 32 % des intentions de vote, et le voilà maintenant à 40 %.

Le problème est que la déconfiture de la CAQ est antérieure au débat sur la laïcité. En août 2013, elle était à 20 %. En octobre, à 15 %. Léger Marketing faisait même remonter la dégringolade caquiste à février 2012. Pourtant, en octobre 2013, CROP accordait toujours 38 % des intentions de vote au PLQ, soit le même niveau qu’au lendemain de l’arrivée de M. Couillard à la tête du parti.

Que les libéraux n’aient pas été en mesure de récupérer à leur profit une partie du vote caquiste, on peut toujours le comprendre. Ce sont manifestement les éléments les plus nationalistes qui ont lâché la CAQ. Cela n’explique cependant pas que le PLQ n’ait pas été en mesure de conserver ses propres appuis.

Tout le monde reconnaît que Pauline Marois a été à la hauteur de ses responsabilités lors de la tragédie de Lac-Mégantic et que son gouvernement a finalement trouvé une cohésion qui lui faisait cruellement défaut durant la première année du mandat.

L’appréciation des qualités des différents aspirants au poste de premier ministre est cependant un exercice comparatif. Ce n’est pas tellement le manque de visibilité dont M. Couillard a souffert en ne siégeant pas à l’Assemblée nationale qui lui a nui le plus. C’est plutôt la performance décevante qu’il a offerte quand les projecteurs étaient braqués sur lui.

Le chef libéral est un homme intelligent qui est tout à fait capable d’apprendre, mais encore faudrait-il qu’il en ait le loisir. De toute évidence, Mme Marois n’entend pas lui laisser le temps de faire son apprentissage d’ici les élections. En faisant l’hypothèse qu’il l’emportera dans Roberval, la question est de savoir si son parti acceptera de lui en laisser après. Il n’a pas l’habitude de patienter avec les chefs vaincus. Depuis Adélard Godbout, Jean Charest a été le seul chef libéral à survivre à la défaite.

Il est loin d’être certain que le livre blanc sur la souveraineté dont Mme Marois a annoncé la publication débouchera sur un autre référendum. À cet égard, le dernier sondage CROP est assez paradoxal. En décembre, alors que le PQ recueillait 35 % des intentions de vote, le Oui était à 44 %. Depuis, le PQ a grimpé à 40 % et le Oui a baissé à 41 %.

Peu importe, l’élection d’un gouvernement péquiste majoritaire rendra théoriquement possible la tenue d’un référendum et déclenchera un branle-bas d’un océan à l’autre. Les références fédéralistes de M. Couillard sont certainement irréprochables, mais serait-il l’homme de la situation pour autant ? Après une défaite électorale, lui ferait-on confiance pour diriger le camp du Non ?

À l’occasion du symposium sur l’héritage de Claude Ryan organisé récemment par le groupe de réflexion « L’Idée fédérale », Jean Charest a adressé un clin d’oeil à son successeur. « Je n’ai pas toujours été le meilleur dans les sondages, mais je l’étais aux élections et je suis certain qu’il va arriver la même chose à Philippe », a-t-il déclaré.

Cela reste à voir. Certains ont vu dans la nomination de M. Charest au poste de président du Conseil des gouverneurs de « L’Idée fédérale » le prélude à un éventuel retour. Qui sait, l’homme au passeport redeviendra peut-être aussi l’homme de la situation ?


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