L’histoire, l’Europe et l’Euro

Lorsque les nains dansent sur la tombe des géants

Le livre que Jean-Pierre Chevènement vient de publier chez Fayard[1] est à remarquer, et à lire, pour au moins trois raisons. Tout d’abord, il est passionnant et, n’en doutons pas, va provoquer d’importants débat. Ensuite, ce livre montre une hauteur de vue, une capacité à envisager l’histoire avec recul et sagacité dont peu d’auteurs sont capables, et encore moins des hommes politiques de premier plan. Or, Jean-Pierre Chevènement n’est pas un scientifique, un historien ou un spécialiste des relations internationales. Il est un homme politique, que l’on peut apprécier ou critiquer, mais qui est inséré dans la vie politique actuelle. C’est ce qui rend d’autant plus intéressant cet ouvrage. Enfin, les fortes conclusions de ce livre impliquent que son auteur n’a pas encore renoncé à peser sur l’histoire qu’il sait si bien analyser. Chacune de ces trois raisons est amplement suffisante pour justifier la lecture de l’ouvrage. Leur réunion en fait véritablement un livre unique. À partir de la commémoration de la Première Guerre Mondiale (1914-1918), l’auteur dresse un tableau général de la fin du « siècle européen », siècle qui commença en fait dans les années 1850 et qui s’acheva avec la mise en place du « Marché Commun » qui préfigurait l’Union Européenne. En fait, ce livre interroge cet apparent paradoxe : comme se fait-il que la constitution de l’Union européenne, qui se voulait l’achèvement d’un mouvement commencé avec la CECA dans les années 1950 aboutisse à la disparition politique de l’Europe et des nations européennes.
La commémoration de 1914 et l’instrumentalisation politicienne de l’histoire
L’introduction qui ouvre cet ouvrage fera date car elle fait litière des errements de la pensée que nous subissons depuis maintenant plus de trente ans. En particulier se trouve ici épinglée l’idée fausse que le besoin d’Europe est une « réaction » à la guerre de 1914-1918. En réalité, la construction mythique de l’histoire à laquelle se sont livrés les thuriféraires de l’Union européenne est soigneusement, minutieusement, et pour tout dire brillamment déconstruite par Jean-Pierre Chevènement. Il faut, pour justifier les institutions actuelles de l’Europe, construire la thèse d’une guerre survenue « par hasard » ou par « accident »[2] et « par la faute des Nations ». Or, rien n’est plus faux, et l’auteur, s’appuyant sur de nombreux textes universitaires et les travaux de la recherche historiographique de ces quarante dernières années, le montre de manière irréfutable[3]. L’origine de cette guerre est bien à chercher non dans le « peuple » allemand, mais dans les élites allemandes qui ont délibérément choisi la guerre pour imposer leur domination tant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Et c’est Joschka Fisher, l’ancien ministre des affaires étrangères de G. Schroeder qui peut soutenir que, contrairement aux apparences, le Traité de Versailles n’était pas trop dur mais trop doux[4]. En fait, ceci peut s’expliquer par le fait que les structures tant économiques que politiques qui avaient produit la guerre en Allemagne survivaient. La question n’était donc pas tant celle des réparations, point sur lequel Chevènement donne raison à Keynes[5], que de la démocratisation en profondeur des structures sociales et économiques de l’Allemagne.
Mais l’origine de la « Grande Guerre » n’est hélas pas le seul point sur lequel joue une mémoire politiquement sélective qui n’hésite pas à faire disparaître les faits qui la gênent. Ce n’est pas seulement l’origine ou les cause du conflit qui ont été tordues et dénaturées par des politiciens ou des essayistes aux ordres. C’est aussi toute l’histoire de la guerre de 1914-1918 qui devrait être réécrite pour corriger les mensonges, soit directs soit par omission. Avec, pour commencer, le rôle de la Russie. La Russie n’est perçue qu’à travers l’alliance Franco-Russe avant 1914 et à travers la Révolution d’Octobre 1917. Mais qui se souvient que l’offensive des troupes russes contre l’Allemagne en août 1914 provoqua une telle panique à Berlin qu’elle imposa le retrait de nombreuses divisions du front occidental, ce qui rendit possible la victoire de la bataille de la Marne ? Si l’offensive russe fut un échec (ce que l’on ne pouvait prévoir) ce fut aussi à cause des divisions entre les généraux du Tsar.
Volonté d’ignorer le rôle de la Russie, escamotage des responsabilités des élites allemandes au profit d’une responsabilité des « nations », tel est le bilan, et il est lourd et significatif, de l’instrumentalisation politique de la mémoire aux fins de l’européisme. Le manuel franco-allemand pour les classes de premières en fournit d’autres exemples[6]. C’est ce qu’établit précisément Jean-Pierre Chevènement[7]. Et l’on peut y trouver l’origine de cette hubris fédéraliste qui pousse à la construction d’une Europe non-démocratique comme on le voit depuis le référendum de 2005 sur le projet constitutionnel. Car, pour les partisans du rêve fédéral, il est clair que « la souveraineté nationale, voilà l’ennemi »[8].
La question du « Sonderweg » et la place de l’Allemagne en Europe
Tout cela est juste. Il fallait le dire, et la manière dont c’est dit dans l’ouvrage est certainement un de morceaux de bravoure de Jean-Pierre Chevènement. Il ne s’en tient pas là. Suit alors une réflexion tout aussi intéressante sur la question de l’identité, tant politique, culturelle qu’économique de l’Allemagne. Le lecteur y découvrira un Chevènement attentif aux débats d’outre-Rhin, maîtrisant à merveille les basculements que l’on a connus depuis 1820 dans l’histoire allemande. En tout les cas, ces pages prouvent combien sont fausses et dénuées de tout fondement les accusations d’anti-germanisme qui ont été parfois portées contre l’auteur quand ce dernier s’autorisait des critiques justifiées de la politique allemande.
Si l’on peut risquer une critique sur ce point c’est peut-être quant à la place prise par la dimension culturelle dans l’explication du Sonderweg allemand qui me semble un peu excessive. Cette question de la spécificité de la trajectoire de l’Allemagne a soulevé de nombreux et virulents débats. Les bifurcations et les ruptures ont aussi existé à l’intérieur même de cette trajectoire. La première est liée aux conditions de l’accession de l’Allemagne à la modernité du capitalisme. On oublie trop souvent que ce pays s’est engagé dans la révolution industrielle après la Grande-Bretagne et la France et que la pression exercée par ces deux pays l’a contrainte à prendre une voie spécifique. Ce fut magistralement démontré par un de ces grands auteurs oubliés et qui pourtant reste d’une étonnante actualité, Alexandre Gerschenkron[9]. La constitution d’entreprises de grande taille qui fut une des caractéristiques du développement industriel de l’Allemagne à la fin du XIXème siècle en découle directement. On retrouve cette question d’ailleurs dans la deuxième partie du livre, qui est consacrée à la « mondialisation ». Jean-Pierre Chevènement cite le livre de Suzanne Berger[10]. Mais cette vision oublie que la diversité des capitalismes fut le produit du développement du capitalisme lui-même. De ce point de vue, la normalité c’est la spécificité et la particularité de la trajectoire. Le développement mondial du capitalisme, c’est l’histoire de vagues successives d’entrées dans le monde marchand et salarial et dans l’industrie. Les rapports de forces spécifiques entre pays « premiers » et pays « seconds » sont ici déterminants. Il faut alors comprendre comment ces rapports de forces incitaient les « seconds » à adopter des formes du capitalisme différentes de celles des « premiers ». C’est la réaction des États-nations, menacés pour certains dans leur puissance et pour d’autres dans leur existence même par les pays « premiers », qui a engendré le développement mondial du capitalisme. Il ne faut chercher ici nulle rationalité économique désincarnée. Si les élites japonaises ou russes se décident pour d’ambitieuses réformes structurelles entre 1860 et 1880, ce n’est pas parce qu’elles sont convaincues de la nécessité théorique du capitalisme. C’est pour sauver leur peau, à travers la survie de l’État-nation qu’elles contrôlent. La première mondialisation, celle qui va du milieu du XIXème siècle (avec l’accord franco-britannique dit Cobden-Chevalier sous le second Empire) à la guerre de 1914-1918, a été portée essentiellement par des politiques publiques. Même dans le cas des États-Unis, que l’on perçoit à tort comme un produit du libéralisme, ce sont des politiques interventionnistes et protectionnistes mises en œuvre par l’État fédéral qui assurent le véritable démarrage de l’économie capitaliste américaine[11]. Dans le cas japonais ou russe, l’action de l’État est encore plus visible.
La seconde bifurcation au sein du Sonderweg est représentée par le basculement dans l’hitlerisme. Le filtre « racial »[12] induit rapidement une coupure avec la réalité. Ainsi, quand les démocraties parlementaires cèdent devant Hitler, au lieu d’analyser ces résultats comme traduisant une crise politique dans ces pays (crise qui peut être durable ou temporaire…), Hitler estime qu’il s’agit d’une confirmation de la supériorité raciale des Allemands. Les premiers succès d’Hitler valident donc en apparence ses hypothèses de départ, le conduisant à leur accorder de plus en plus de crédit. Mais ce processus ne se limite pas à Hitler. En effet, outre la dimension raciste de son idéologie, il est persuadé d’être le vecteur de la « Providence » (terme étrange dans une idéologie qui récuse en partie le catholicisme considéré comme un produit « juif »). Cela le conduit à détruire volontairement tout processus institutionnel au nom du « culte du chef » (le Führer Prinzip), encourageant par là même des comportements violemment antagoniques au sein de l’élite nazie.
En fait, l’État Nazi régresse vers un modèle archaïque, semi-féodal[13], alors qu’il doit gérer une économie et un système militaire développés. De ce point de vue, il est important de noter que si l’Allemagne nazie a pu donner l’illusion avant 1939 d’être un système « rationnellement organisé » pour faire la guerre[14], cette perception de la réalité a été mise à mal par les travaux exploitant les archives et les témoignages des acteurs. De ce point de vue, le travail pionnier de Berenice Caroll, exploitant les archives et témoignages des responsables de la planification industrielle militaire allemande[15], a été pleinement confirmé par les recherches historiographiques des trente dernières années. Le système nazi n’est pas seulement monstrueux par sa finalité, il l’est aussi et même en premier lieu dans son fonctionnement quotidien, qui est profondément pathologique. On est en présence d’une régression vers une forme étatique et administrative « pré-moderne » (au sens de Max Weber) appliquée sur une société et une économie « moderne ». Cette dimension pathologique du système nazi (et dont Hitler est une des sources, mais qui va largement au-delà de la personne du dictateur) a été bien analysée par Ian Kershaw, aujourd’hui reconnu comme la référence sur Hitler[16]. On comprend alors que l’Allemagne nazie n’est nullement une suite, radicalisée certes mais directement comparable, de l’Allemagne de Guillaume II. En réalité le nationalisme allemand s’est effondré quand il a capitulé devant l’idéologie raciale du national-socialisme[17]. Nous sommes bien en présence d’un système de type nouveau, même s’il emprunte à l’ancien nombre de ses formes.
Il y a ainsi deux Sonderweg qui cohabitent dans l’histoire contemporaine de l’Allemagne. Le premier est le produit de l’histoire de la constitution de la Nation allemande, et il n’est pas différent, en substance, de ce que l’on a connu en Europe. Assurément, l’histoire de l’Allemagne est spécifique, mais ni plus ni moins que toutes les histoires nationales. Et puis, il y a la rupture de 1933, qui produit un système qui est en réalité la négation de ce qu’il prétend. Loin de représenter une hypertrophie du nationalisme, le Nazisme en est en réalité sa négation. Pour Hitler, le sujet de l’histoire n’est pas la Nation mais la Race, peut-être parce qu’il pressent ce que la Nation doit à la démocratie et à quel point ces deux notions sont en réalité liées.
Une incompétence systémique allemande?
Il est de bon ton dans certaines élites françaises de vouloir toujours donner l’Allemagne comme modèle. C’est très souvent le cas dans les milieux européistes, et il ne faut jamais oublier que Robert Schuman, l’un des “pères” du projet européen, avait en son temps voté les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Un fil rouge permet de repérer ceux qui ont su faire confiance dans la France de ceux qui s’en sont toujours méfiés, peut-être justement parce que dans Nation il y a Peuple, et que la révolution française était l’un des aboutissements de la construction nationale multi-séculaire.
Il faudrait aussi, et tout d’abord, pour que cela soit possible, que la clef du succès allemand soit disponible aux autres pays. Or, et c’est la thèse de Gerschenkron, ce qu’un pays a fait, ses voisins immédiats ne peuvent le refaire. Pour que l’Allemagne soit un modèle, il faudrait d’abord démontrer en quoi ses méthodes sont généralisables. Si tous les pays d’Europe avaient mis en œuvre en même temps les mesures Harz-IV allemandes, que croit-on qu’il serait survenu ? Une immense dépression européenne !
Mais l’on peut aller plus loin, et revenir sur la période nazie. Elle est caractéristique d’une double incompétence. Nous sommes en présence des bases de ce que l’on pourrait appeler une « incompétence systémique » allemande qui se manifeste à plusieurs niveaux, dès que l’on sort des éléments tactiques les plus étroits. De manière intéressante, ce sont les Italiens, au contact permanent des élites nazies, qui ont donné les meilleures descriptions de cette « incompétence systémique » ou « désordre structurel » de la prise de décision[18]. Le « Journal de Ciano », notes prises par C. Ciano et publiées après-guerre, montre d’ailleurs très bien comment un observateur, qui est pour le moins ambivalent vis-à-vis d’Hitler, observe la succession de décisions qui ne sont cohérentes que sur un espace limité et qui sont incohérentes entre elles. Mais il y a aussi une incohérence stratégique qui se manifeste clairement dès 1939 tout comme elle existait en 1914 ainsi que le montre Jean-Pierre Chevènement. L’appareil militaire allemand n’est pas prêt à une guerre contre la France et la Grande-Bretagne à cette époque. D’ailleurs, Hitler affirme – pour calmer ses généraux – que la France et la Grande-Bretagne ne se battront pas pour la Pologne. Le triste et révoltant éditorial de Marcel Déat (le célèbre Mourir pour Dantzig ?) l’a certainement conforté dans son opinion. Néanmoins, et la diplomatie allemande et la diplomatie italienne attirent son attention sur le fait que la détermination franco-britannique est cette fois solide. Dans ce contexte, la recherche d’un compromis aurait été logique, d’autant plus qu’Hitler avait indiqué 1942/43 comme date de la guerre qu’il voulait. Tous les plans de réarmement allemands, air, terre et mer inclus, étaient conçus en fonction de cette date et non d’une guerre en 1939. Pourtant Hitler attaque la Pologne car il « veut » la guerre, au-delà du gain qu’il attend de cette dernière. Il prend alors le risque d’une rupture avec Mussolini[19].
De manière caricaturale, une certaine historiographie occidentale reprend les thèses des généraux allemands qui, dans leurs mémoires, font porter la responsabilité de leurs défaites soit sur la « folie » de Hitler (certes, bien réelle), soit sur les Italiens. Cependant, une analyse réaliste des éléments factuels montre que ces mêmes généraux sont responsables de leurs défaites en dépit et même à cause de leurs succès tactiques. Ce fait a bien été établi par M. Geyer qui montre que, dès 1937/38, la pensée stratégique allemande se dissout dans la tactique[20].
L’Euro et la mondialisation
La deuxième partie de l’ouvrage est certes intéressante mais incontestablement plus commune. La description des effets de la « mondialisation », que ce soit la première ou la deuxième, a déjà été faite dans plusieurs livres. Si l’ordre du XIXème siècle est contesté dès la guerre hispano-américaine de 1898 et l’émergence du Japon comme puissance régionale avec la guerre sino-japonaise de 1895, on peut considérer que la guerre russo-japonaise de 1904-1905 et les « camps de reconcentration » inventés par Lord Kitchener lors de la « seconde guerre des Boers » de 1899 à 1902 préfiguraient déjà certaines des horreurs du siècle à venir[21]. Pourtant, en réalité, rien n’est acquis avant 1914. Les anciennes dynamiques issues de 1815 sont rompues, de nouvelles ne se sont pas encore constituées en un ensemble cohérent[22]. Il y a donc quelque chose qui ressemble à un « intersiècle », comme on dit un interrègne. Il court de 1895 à 1914. Cette période est marquée par l’émergence de nouveaux facteurs, dont certains n’ont pas manqué de fasciner l’imagination des contemporains. Il y eut ainsi entre 1895 et 1901 la même illusion quant à l’émergence d’une forme radicalement nouvelle d’économie que l’on a connue entre 1995 et 2002 avec la bulle Internet. Autour de 1900, ce furent l’électricité et le téléphone qui portèrent cette illusion, et elle engendra, elle aussi, une vague spéculative[23]. Si les contemporains sont ainsi sensibles aux changements qui se dessinent, ils ne peuvent cependant en mesurer les conséquences et les implications. Ces « intersiècles » se révèlent alors des « temps des troubles ».
Elle pose néanmoins des problèmes essentiels, qu’il s’agisse de l’internationalisation du Yuan, ou du fait que les questions douanières ont été aujourd’hui supplantées par les questions monétaires, ou encore du rapport entre valeurs spécifiques (et nationales) et valeurs universelles.
La question de l’ordre monétaire qui prévalut dans la « première » mondialisation et celui qui prévaut aujourd’hui est une question clef, qui sera d’ailleurs reprise dans la troisième partie de l’ouvrage. En effet, comment ne pas voir que la monnaie unique, l’Euro, a les mêmes effets délétères désormais que l’étalon-Or ? De même qu’au tournant des années trente, l’Euro aujourd’hui pousse les pays que l’ont adopté vers des politiques de déflation dont les conséquences tant économiques que sociales sont absolument désastreuses. Les lecteurs de ce carnet connaissent mes opinions, et savent que je me bats pour que l’on dissolve la zone Euro. Ils ne seront donc nullement étonnés de me voir hautement apprécier les passages de la troisième partie du livre où Jean-Pierre Chevènement prend fortement position pour une semblable dissolution. Bien entendu, il ne s’agit pas de laisser les pays aller au gré des vents de la spéculation monétaire. Une fois retrouvées des monnaies nationales (mais nécessairement après cette dissolution de la zone Euro) on pourrait et l’on devrait penser à la constitution des formes de concertations monétaires pouvant déboucher sur une monnaie commune, utilisée avec les pays ne faisant pas partie de l’Europe. Jean-Pierre Chevènement va jusqu’à écrire :
« Mais il est des circonstances où l’exigence du salut public commande la décision »[24].
En d’autres termes, il n’hésiterait pas, s’il devait retourner au pouvoir, à agir unilatéralement si d’aventure nos partenaires devaient par trop traîner des pieds. C’est une véritable vision d’homme d’État qui se révèle au lecteur, d’un homme d’État averti des réalités de la politique tant intérieure qu’internationale, et qui sait ce qui peut être fait en concertation avec des partenaires européens et ce qui doit être fait par la France, quitte à devoir le faire de manière unilatérale.
Cette combinaison de vision historique, d’expérience et de volonté, est peu commune dans le monde politique. Pour tout dire, elle est unique en France où des nains dansent sur les tombes de géants. C’est cette combinaison qui laisse aujourd’hui une place à l’espoir.
[1] Chevènement J-P., 1914-2014 L’Europe sortie de l’histoire ? Paris, Fayard, octobre 2013, 341p.
[2] Comme le soutient Georges Ayache, Une guerre par accident, Pygmalion, Paris, 2012.
[3] Il faut ici citer l’ancien mais excellent Fischer F., Les Buts de guerre de l’Allemagne impériale – 1914-1918, préface de J. Droz, Éditions de Trévise, Paris 1970, 623p (traduit de l’allamnd).
[4] Fisher J. et Fritz Stern, Gegen den Strom. Ein Gespräch über Geschichte une Politik, C.H. Beck, Munich, 2013.
[5] Keynes, J.M., The Economic Consequences of the Peace, publié à compte d’auteur, Londres, 1919. Publiée en 1920 à New York par Harcourt Brace.
[6] Manuel pour les classes de premières L/ES/S, Klett et Nathan, 2008.
[7] Chevènement J-P., 1914-2014 L’Europe sortie de l’histoire ?, op.cit., p. 73-74.
[8] Chevènement J-P., 1914-2014 L’Europe sortie de l’histoire ?op.cit., p. 41.
[9] Gerschenkron A., Economic Backwardness in Historical Perspective, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1962.
[10] Berger S., Notre Première Mondialisation, Paris, Seuil, 2003.
[11].Par exemple, les tarifs douaniers fortement protectionnistes McKinley, où la décision dans les années 1880 de lancer un ambitieux programme de construction navale afin de fournir un débouché à l’industrie lourde. Sur ce point, voir Norman Friedman, U.S. Cruisers. An Illustrated Design History, Londres, Arms and Armour, 1985.
[12] M. Burleigh et W. Wippermann, “The Racial State – Germany 1933-1945”, Cambridge University Press, 1991.
[13] R. Koehl, “Feudal Aspects of National-Socialism”, American Political science Review, vol. 54, 1960, n°3, pp. 921-33.
[14] Thèse défendue par O. Nathan, The Nazi Economic System, Duke University Press, Durham, NC., 1944, et par L. Hamburger, How Nazi Germany has Controlled Business, The Brookings Institution, Washington, D.C., 1943.
[15] B.A. Caroll, “Design for Total War”. Arms and Economics in the Third Reich, Mouton, The Hague, 1968.
[16] Ian Kershaw, Hitler, a Profile in Power, Londres, 1991 ; “Nazi Dictatorship : problems and Perspectives of Interpretation”, Londres Oxford UP, 1993 ; “Working towards the Führer”, in I. Kershaw et M. Lewin (eds.) Stalinism and Nazism – Dictatorships in Comparison, Cambridge Univ. Press, 1997.
[17] W. Sheridan Allen, “The Collapse of Nationalism in Nazi Germany”, in J. Breuilly (ed), The state of Germany: the national idea in the making, unmaking and remaking of a nation-state, Londres, Longman 1992. Voir aussi W. Sheridan Allen, Une Petite Ville Nazie, ed. 10-18, UGE, Paris, 2003.
[18] J. Sadkovich, “German Military Incompetence Through Italian Eyes”, War in History, vol. 1, n°1, Mars 1994, pp. 39-62 ; du même auteur, “Of Myths and Men: Rommel and the Italians in North Africa”, International History Review, 1991, n°3.
[19] Max Gallo, « L’Italie de Mussolini », Marabout Université, Verviers, 1966, pp. 302-06.
[20] M.Geyer, “German Strategy in the Age of Machine Warfare”, 1914-1945, in P.Paret (ed.) Makers of Modern Strategy, Princeton University Press, Princeton, N.J., 1986.
[21].Ces camps avaient pour but de « reconcentrer » la population afrikaner civile, c’est-à-dire de la parquer afin de mieux la contrôler et de l’empêcher de soutenir la guérilla des combattants Boers. Cette pratique est la première occurrence du tragique couple « transport ferroviaire – enfermement de masse », même s’il est clair que la volonté n’est pas de tuer mais de produire du contrôle politique. La mortalité dans ces camps, compte tenu des conditions de surpopulation et d’hygiène, fut néanmoins importante, même si elle n’était pas intentionnelle.
[22] Berstein S. et Pierre Milza, Histoire de l’Europe contemporaine : le xixe siècle de 1815 à 1919, Paris, Hatier, 1992.
[23].Sur ce parallèle, voir R.J. Shiller, Irrational Exuberance, Princeton, N.J., Princeton University Press, 2e éd., 2005, chap. 1.
[24] Chevènement J-P., 1914-2014 L’Europe sortie de l’histoire ?op.cit., p. 327.

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Jacques Sapir142 articles

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Jacques Sapir est un économiste français, il enseigne à l'EHESS-Paris et au Collège d'économie de Moscou (MSE-MGU). Spécialiste des problèmes de la transition en Russie, il est aussi un expert reconnu des problèmes financiers et commerciaux internationaux.

Il est l'auteur de nombreux livres dont le plus récent est La Démondialisation (Paris, Le Seuil, 2011).

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