L’écrivain et militant russe Édouard Limonov, réputé pour ses romans sulfureux et la radicalité de ses engagements politiques favorables à l’opposition, puis au Kremlin, est mort mardi à Moscou à l’âge de 77 ans.
« Aujourd’hui, 17 mars, est mort à Moscou Édouard Limonov. Tous les détails seront transmis demain », a annoncé le parti Autre Russie, fondé par Édouard Limonov, dans un message sur son site Internet.
Le député communiste Sergueï Chargounov a confirmé à l’agence de presse publique TASS que l’écrivain était décédé dans un hôpital moscovite, sans préciser les causes.
« Jusqu’au bout, il gardait le contact et discutait. On pouvait lui écrire, il avait l’esprit clair », a ajouté Sergueï Chargounov.
Né en 1943 à Dzerjinsk, dans la région russe de Nijni Novgorod, Édouard Limonov, de son vrai nom Savenko, était né d’un père membre du KGB et avait grandi près de Kharkiv, en Ukraine.
Ses premières oeuvres remarquées sont des romans autobiographiques narrant son exil d’URSS, en 1974, vers les États-Unis, puis en France.
Le premier d’entre eux, Le poète russe préfère les grands nègres, traduit en 15 langues, raconte ses désillusions au contact de la vie américaine et ses aventures homosexuelles dans les bas-fonds de New York.
Dans les années 1980, Édouard Limonov, francophone, avait vécu à Paris et participé à des revues littéraires, se liant avec plusieurs figures montantes de la littérature.
Retourné en Russie dans les années 1990, après la chute de l’Union soviétique, cet auteur aux éternelles lunettes rondes — à la Trotsky — avait fondé un parti d’opposition « national-bolchévique », dont l’emblème fusionnait un drapeau nazi, un marteau et une faucille.
Limonov s’était également joint à des groupes nationalistes proserbes pendant la guerre de Bosnie, où il avait été filmé faisant feu à la mitrailleuse sur la ville assiégée de Sarajevo.
Il avait également collaboré un temps avec l’idéologue russe d’extrême droite Alexandre Douguine.
Arrêté en Sibérie en 2001, puis condamné en 2003 à quatre ans de prison pour détention illégale d’armes, Édouard Limonov avait bénéficié d’une libération conditionnelle au bout de trois mois.
Après l’interdiction du Parti national-bolchévique, en 2007, il avait créé Autre Russie et participé à de nombreuses manifestations réprimées par la police. Le parti avait compté un temps dans ses rangs l’opposant et champion d’échecs Garry Kasparov.
En 2012, la candidature de Limonov à l’élection présidentielle avait été rejetée par les autorités russes.
Sa critique du pouvoir s’était toutefois mue en soutien au Kremlin après la révolution ukrainienne de 2014, qu’il avait vivement critiquée. Il avait par ailleurs soutenu l’annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée par la Russie, la même année.
Devenu ensuite chroniqueur pour le journal pro-Kremlin Izvestia, Édouard Limonov était apparu ces dernières années dans des émissions et des débats politiques sur des chaînes d’État russes.
Sur la messagerie russe Telegram, le député ultranationaliste Vladimir Jirinovski a regretté « une grande perte pour la culture russe, et pour nous tous ».