Le mot d'ordre est le même partout dans le monde. Les gouvernements doivent intervenir de façon énergique pour contrer les effets de la récession, quitte à produire des déficits. C'est ce défi qui dominera la rentrée politique en janvier, tant à Ottawa qu'à Québec.
Mais quoi faire? Comment stimuler l'économie? Rien de plus facile que de dépenser de l'argent, surtout quand la peur du déficit cesse d'être un obstacle. Avec le risque de gaspiller les fonds publics et de donner des coups d'épée dans l'eau. Pour éviter ces deux écueils, un certain nombre de critères devraient présider au choix des interventions.
Premier critère: le «timing». Le recul de l'économie, c'est maintenant, pas dans un an. Il faut donc des mesures qui agiront très vite et dont les impacts bénéfiques ne se feront pas seulement sentir quand le pire de la tourmente sera derrière nous.
Second critère: l'efficacité. Il faut que ça marche. Que l'impact de chaque dollar injecté soit maximal. Un exemple de mesure inefficace? La baisse de la TPS, très coûteuse et sans effet sur la consommation.
Troisième critère: le caractère ponctuel. Comme le recul économique est temporaire, les politiques de stimulation doivent l'être également, pour ne pas engager les gouvernements jusqu'à la fin des temps, si l'on veut revenir rapidement à une situation d'équilibre budgétaire.
Quatrième critère: les effets structurants. Les interventions ont un rôle défensif, atténuer les effets de la tourmente, mais elles doivent aussi avoir un caractère offensif, renforcer notre économie et nous préparer à l'après-crise.
À la lumière de ces critères, quelles sont les meilleures stratégies? La plus importante, puissante et aux effets rapides, dont on parle trop peu parce qu'elle échappe au pouvoir politique, c'est la politique monétaire, la baisse des taux d'intérêt, l'injection de liquidités dans le système, pour contrer le resserrement du crédit. Et les efforts pour tordre le bras aux banques et les forcer à prêter, comme a commencé à le faire le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty.
Le deuxième outil, qui fait l'unanimité, ce sont les travaux d'infrastructure. Chaque dollar investi a un fort impact, bien réparti dans les régions. L'effet est structurant, parce que les infrastructures sont là pour longtemps. Le problème, ce sont les délais de mise en oeuvre qui font que les investissements risquent d'arriver trop tard. Cela ne menace pas les projets québécois, déjà en route, mais le problème se pose avec les projets du gouvernement Harper, surtout quand on connaît la lourdeur bureaucratique fédérale.
Le troisième outil, c'est d'encourager la consommation, notamment par des baisses d'impôt, comme on le fait aux États-Unis. Le besoin est moins grand ici, parce que la baisse de la consommation est moins marquée et qu'elle ne s'explique pas par un appauvrissement des ménages. Les cadeaux fiscaux peuvent également avoir un effet pervers si les citoyens en profitent pour épargner. C'est une approche qu'il faut utiliser avec prudence, surtout en ciblant les ménages les moins fortunés, et en choisissant des approches qui mettront de l'argent rapidement dans la poche des gens. Il faut surtout éviter les gels des tarifs, parce que leurs impacts sont permanents sur les échelles des prix.
L'aide aux entreprises peut être efficace, surtout les mesures pour contrer le resserrement du crédit, comme le programme «Renfort» annoncé par le ministre du Développement économique Raymond Bachand, qui s'adresse aux entreprises en bonne santé. Le gros danger, c'est que la récession serve de prétexte pour les appels à l'aide de canards boiteux, que ce soient des entreprises ou des industries. Il faut penser à l'avenir. Aider la forêt, s'il n'y a pas de restructuration, c'est prolonger l'agonie. C'est également vrai de l'industrie automobile.
L'aide aux victimes, elle aussi, doit être tournée vers l'avenir. L'idée de mettre le paquet sur la formation de la main-d'oeuvre est très prometteuse, parce qu'on soutient les chômeurs et les travailleurs dans une période difficile, mais qu'on leur donne les outils pour mieux rebondir.
Le dernier élément, c'est le «mental». Outre le resserrement du crédit et l'affaissement du marché américain, l'économie canadienne souffre de la perte de confiance des consommateurs et des entreprises. Leur prudence est légitime, mais elle ne doit pas mener à la paralysie. Il faut donc aussi s'attaquer à la morosité, car, comme l'a dit cette semaine le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, «la crainte d'une récession nourrit la récession».
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