À l’occasion de sa première visite bilatérale en France, le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a rencontré longuement le président français, Emmanuel Macron, avec qui il a discuté de la mission de paix au Mali et de l’accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne.
Mais avant de gagner l’Élysée, il a tenu à réitérer sa confiance envers la secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie, Michaëlle Jean.
Alors que l’ancienne gouverneure générale du Canada a été ébranlée par plusieurs révélations sur son train de vie et sa gestion de l’OIF, le premier ministre a invité les dirigeants des 54 États membres de l’organisation à renouveler leur confiance à la secrétaire générale lors du Sommet qui se tiendra à Erevan, en Arménie, en octobre prochain.
« Je suis très heureux de venir voir en personne l’excellent travail de l’OIF et [de] la Francophonie dans son ensemble sous la conduite de sa secrétaire générale », a-t-il affirmé.
Ce soutien intervient alors que l’Élysée a jusqu’ici gardé ses distances avec Michaëlle Jean et que se multiplient depuis plusieurs mois les appels, publics et privés, au non-renouvellement de son mandat.
De passage à Paris le mois dernier, le premier ministre québécois, Philippe Couillard, avait publiquement critiqué la secrétaire générale en l’incitant à faire preuve de « davantage de rigueur et de transparence dans l’administration interne de cette grande organisation ».
Visiblement comblée, Michaëlle Jean a aussitôt exprimé sa satisfaction d’obtenir l’appui du second contributeur après la France au budget de l’OIF. « Le soutien du Canada est très important, a-t-elle déclaré, parce qu’il nous permet de poursuivre énergiquement notre action pour cette “Francophonie des solutions” pragmatique et concrète que nous développons depuis plus de trois ans ».
De source diplomatique, il semble que la nomination récente dans le cabinet de Michaëlle Jean du chevronné diplomate français Hervé Ladsous, pilier du quai d’Orsay et spécialiste des missions de paix, vise à répondre à certaines critiques.
Celles-ci laissent notamment entendre que la secrétaire générale, élue en 2014 sur division des pays africains, serait en délicatesse avec certains dirigeants du continent.
Trudeau reçu avec faste
Dans l’après-midi, Justin Trudeau a été reçu par Emmanuel Macron avec tous les égards possibles. Le premier ministre a eu droit à un déjeuner de travail à l’Élysée, un privilège auquel n’avait pas eu droit Philippe Couillard un mois plus tôt.
Avant de s’envoler pour Londres mardi, il sera aussi le premier représentant canadien à s’adresser à l’Assemblée nationale française. Une faveur qui n’a été réservée qu’à une vingtaine de chefs d’État et de gouvernement.
Cette allocution intervient après que le président français eut accepté l’invitation de Philippe Couillard de s’adresser à l’Assemblée nationale du Québec en juin prochain.
Dans leur entretien, Emmanuel Macron et Justin Trudeau se sont félicités de l’accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne (AECG) et de la participation canadienne à la mission de maintien de la paix de l’ONU au Mali.
Sur l’AECG, Emmanuel Macron a salué « le travail qui a été fait par nos gouvernements […] pour mettre en place un suivi afin de lever les doutes qui ont existé à un certain moment ». La France avait notamment exigé des garanties concernant l’impartialité du tribunal qui devra trancher les différends.
Tutoyant son hôte, Justin Trudeau s’est félicité de ce que, même si l’accord entré temporairement en vigueur doit encore être ratifié par chaque pays membre de l’Union européenne, les importations de la France au Canada ont augmenté de 4 % en 2017 et les investissements canadiens en France de 23 %. Il s’est montré confiant dans le fait que la France ratifiera l’accord, malgré les réticences exprimées par les partis d’opposition et dans la société civile concernant notamment l’absence d’un « veto climatique ».
« Si l’Europe, dit-il, n’est pas sûre qu’elle va faire un accord commercial avec le Canada, pays qui partage tellement les mêmes valeurs, les mêmes priorités sur l’environnement, sur la croissance inclusive, sur tout, avec qui signera-t-elle un accord ? »
Le Canada au Mali
Emmanuel Macron a salué l’implication du Canada dans la mission de paix au Mali (MINUSMA) même si, précise-t-il, « dans son mandat, il n’y a pas la lutte contre le terrorisme ».
Justin Trudeau a rappelé « le désir du Canada de se réengager dans les opérations internationales et de fournir pendant un an uneforce d’appui aérienne avec des hélicoptères. Il y a quelques jours, l’ONU avait exhorté le Canada à accélérer ce déploiement.
« On est très fiers de participer au Mali », a-t-il dit.
À l’occasion de cette visite, les ministres de chaque délégation ont signé un premier protocole d’entente sur la diversité culturelle et le numérique ainsi qu’un second sur l’environnement, qui prévoit notamment l’organisation d’un séminaire canado-européen sur la taxation du carbone.
« Nos relations ont profondément changé de nature », a souligné le président français, avant d’affirmer qu’elles portent « une vision progressiste du monde ».
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