Le gouvernement Legault réduira légèrement le nombre d’immigrants accueillis au Québec.
La principale vertu de ce petit ralentissement temporaire sera d’aller à l’encontre du dogme du « toujours plus ».
Sur cette question, il y a un canyon entre le sentiment populaire et la chorale du « toujours plus », dominante dans l’écosystème politico-médiatique.
Jovialisme
Un lecteur me demande que disent les « experts » sur le nombre « idéal ».
Il n’y a pas de nombre idéal dans l’absolu.
Selon que « l’expert » a un point de vue plus ou moins positif sur les retombées de l’immigration, il proposera un nombre plus ou moins élevé.
Dans ce domaine, beaucoup d’acteurs sont financés par le gouvernement fédéral.
Ils hésiteront à dire autre chose que ce que celui-ci veut entendre.
Cela dit, il y a peu de domaines où les résultats de la recherche sont aussi éloignés de cet omniprésent discours jovialiste, autistique et moralisateur.
L’immigration est-elle une solution à la pénurie de main-d’œuvre ? Pas sous sa forme actuelle.
Il faudrait un meilleur arrimage entre les compétences du nouvel arrivant et les exigences du poste à combler. Nous en sommes loin.
L’immigration permet-elle de rajeunir une société vieillissante ? Pas du tout.
L’âge médian des immigrants est trop proche de l’âge médian de la société d’accueil pour faire une différence significative.
Et la réunification familiale, contrôlée par Ottawa, permet de faire venir... les vieux parents de l’immigrant économique.
L’immigration génère-t-elle de la richesse ?
Oui, sauf que l’immigrant garde pour lui la quasi-totalité du gain économique, alors que les services publics dont il bénéficie, surtout pendant les premières années, sont à la charge de la collectivité.
Sur le long terme, les impôts et taxes versés sont-ils supérieurs ou inférieurs aux dépenses publiques ? Rien n’est clair.
Plus de diversité est-il synonyme de plus de créativité, d’inventivité, de dynamisme ?
Oui, si l’intégration fonctionne. Non, si chacun se replie sur sa communauté ethnique.
Sur le long terme, les États-Unis et le Canada ont tiré profit de l’immigration.
Le Japon, lui, ne veut pas d’immigration. Qui dira que le Japon n’est pas innovant et moderne ?
Lucidité
L’immigration comme moyen de freiner le déclin du poids du Québec dans le Canada est un pseudo-argument particulièrement savoureux quand il est utilisé par les tenants du statu quo constitutionnel.
Le poids du Québec dans le Canada décline depuis 1867.
Le Canada prévoit accueillir 330 000 nouveaux arrivants en 2019. Les neuf autres provinces reçoivent plus d’immigrants que le Québec en proportion de leur population.
Le Québec devrait augmenter spectaculairement son volume accueilli pour garder une proportion équivalente.
Si on se questionne sur 50 000, imaginez 70 000.
Et on n’a pas encore dit un mot des enjeux identitaires et politiques. Et on déplore ensuite la montée du populisme !
Je suis moi-même un immigrant, très reconnaissant pour l’opportunité offerte à ma famille.
Mais les bons sentiments et les raccourcis ne font pas de bonnes politiques.