Hommage aux peureux

17. Actualité archives 2007

Dans une entrevue accordée récemment à Paul Arcand, Jean-Pierre Ferland déplorait l'attitude des Québécois à l'égard du projet indépendantiste. Selon M. Ferland, les gens d'ici sont "un peuple de peureux": "Jamais ils vont dire OUI, ils ont bien trop peur. Ils ont jamais souffert eux autres, alors ils ont peur de la souffrance."
Plus tôt cet automne, Gilles Vigneault tenait des propos du même ordre à l'émission Tout le monde en parle: "On est pas mal frileux parce qu'on a peur de mettre une petite croix sur un bout de papier... des fois que ça pourrait nous ôter nos oranges."
Il y a dans ces déclarations une sorte de mépris pour un peuple dont ces souverainistes convaincus appellent pourtant la "libération". Ce mépris est le fruit d'une frustration compréhensible. Il n'en est pas moins regrettable.
Un peuple qui jouit d'une prospérité enviable, qui a su et pu protéger sa culture et développer ses institutions ne refuse pas de plonger dans l'inconnu parce qu'il a peur, mais parce qu'il est sage. Il n'y a aucun "déshonneur" à ne pas choisir l'indépendance, comme le soulignait hier dans nos pages Bernard Landry; en certaines circonstances, ce peut être la preuve d'un "réalisme élémentaire".
Les Québécois "ont peur de la souffrance", estime Jean-Pierre Ferland, peur de perdre "leurs oranges", dit Gilles Vigneault. On en saura gré aux deux artistes d'être plus francs que les politiciens souverainistes, qui refusent d'admettre que le passage à la souveraineté politique puisse provoquer de la turbulence. MM. Ferland et Vigneault concèdent au contraire que l'accession à l'indépendance pourrait nuire à court terme à la qualité de vie des Québécois. Simplement ils croient que c'est un prix que nous devrions être prêts à payer. Comme ce n'est pas le cas, ils nous traitent de poltrons...
Facile à dire! On n'est pas "frileux" quand on est certain d'avoir du feu dans la cheminée quoi qu'il advienne. Les gens ordinaires, qui ne roulent pas sur l'or, hésitent évidemment à faire une "croix sur un bout de papier" qui pourrait avoir des conséquences néfastes, au plan économique notamment.
Comme l'écrit le sociologue Jocelyn Létourneau (Que veulent vraiment les Québécois?, Boréal): "L'épanouissement d'individus formant une collectivité et trouvant en elle le lieu et le moyen d'un ressourcement concret de leur être est une finalité bien plus importante et louable que le fait pour cette collectivité d'être classée, dans le grand livre de l'aventure humaine, sous une entrée connue pays, État, nation, royaume, principauté, province, etc."
Les Québécois ont toujours su aller chaque jour un peu plus haut, un peu plus loin, sans aller plus loin qu'il faut. Ce que les idéologues de part et d'autre dénoncent comme une incapacité de se brancher constitue en réalité le trait central de notre génie politique, le secret de notre survie comme nation (dans un Canada uni...). Ceux qui aiment le Québec devraient être fiers de cette savante ambivalence au lieu de regarder de haut les gens de ce pays.

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André Pratte878 articles

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[une chronique intitulée « Tout est pourri » (critique de Anne-Marie Gingras) ->http://books.google.fr/books?id=EZWguAMXAtsC&pg=PA27-IA27&lpg=PA27-IA27&dq=pratte+Tout+est+pourri&source=bl&ots=MUti9NTQuH&sig=h2zgJlLgOg844j5ejxnUl4zH2_s&hl=fr&sa=X&ei=73RrT8aQEqnh0QHuh4GyBg&ved=0CEEQ6AEwBQ#v=onepage&q=pratte%20Tout%20est%20pourri&f=false]

[Semaine après semaine, ce petit monsieur nous convie à la petitesse->http://www.pierrefalardeau.com/index.php?option=com_content&task=view&id=30&Itemid=2]. Notre statut de minoritaires braillards, il le célèbre, en fait la promotion, le porte comme un étendard avec des trémolos orwelliens : « La dépendance, c’est l’indépendance ». « La soumission, c’est la liberté ». « La provincialisation, c’est la vraie souveraineté ». « La petitesse, c’est la grandeur ». Pour lui, un demi-strapontin à l’Unesco est une immense victoire pour notre peuple. C’est la seule politique étrangère qu’il arrive à imaginer pour le peuple québécois. Mais cet intellectuel colonisé type n’est pas seul. Power Corp. et Radio-Cadenas en engagent à la poche.





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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    23 décembre 2006

    Ferland et Vigneault disaient bien autre chose que ce que veut nous faire admettre André Pratte.
    Hélas ! Le débat sur la nation québécoise prend des proportions curieuses et très ambigües. Il nous montre à quel point les Québécois-Français savent se tirer continuellement dans le pied.
    Au lieu de s’unir et de mettre au moins un site Internet à leur service comme, par exemple, Vigile.net par un financement adéquat et de ne pas parvenir à mettre en place un fonds d’un demi million de dollars pour affirmer et défendre l’indépendance du Québec, alors les Québécois font ce qu’ils font en ce moment : beaucoup de tapage et peu d’action.
    Pourtant, il y a 50 ans au moins, un historien, http://www.archiv.umontreal.ca/P0000/P0221.html Maurice Séguin, http://bilan.usherbrooke.ca/bilan/pages/biographies/421.html a étudié sur toutes ses coutures la pensée canadienne-française qui se prolonge dans la culture québécoise-française actuelle sans que nous y portions toute l’attention qu’il faudrait. Les Pratte, les Létourneau et combien d’autres seraient déstabilisés si les arguments qui se trouvent dans Les Normes http://www.rond-point.qc.ca/seguin/lesNormes.phtml étaient compris. De plus, les souverainistes seraient moins confus dans leur pensée s’ils savaient que le travail de déprogrammation mentale des Québécois-Français a commencé véritablement avec cet historien canadien-français. Son manifeste, si on peut l’appeler ainsi, dépasse de mille coudées Le Refus global dont on a exagéré l’influence sur la société québécoise. Le débat récent d’une semaine organisé par Radio-Canada sur la pensée de Hubert Aquin n’est rien à côté de celui que nous connaîtrions s’il s’agissait d’approfondir notre connaissance du phénomène d’indépendance des nations expliqué par Maurice Séguin.
    Avec Maurice Séguin, les souverainistes et les Québécois apprendraient à se défendre, mais surtout à agir par eux-mêmes collectivement. Ce qui fait toute une différence avec la pensée simpliste et fédéraliste de cet André Pratte de La Presse qui manipule avec opportunisme le point de vue de Bernard Landry à son avantage.
    Joyeux Noël à tout le monde.
    Bruno Deshaies
    Chroniqueur du jeudi http://www.vigile.net/spip/vigile3355.html
    Vigile.net

  • Archives de Vigile Répondre

    23 décembre 2006

    C'est à lire les arguments des adversaires de l'indépendance que des souverainistes en viennent à croire les Québécois peureux. Pendant des années, les fédéralistes ont émis des doutes sur la capacité des Québécois de réaliser un pays prospère. Ce n'est que récemment qu'un Charest admettait que les Québec en avait les moyens. Et que dire des arguments qui mettaient en doute l'existence même de la nation. Stéphane Dion disait dans les années de 90 que les Québécois, outre la question de la langue, ne présentait pas de différence culturelle importante avec les autres Canadiens. L'indépendance était donc une chimère. Jean Chrétien disait, quant à lui que ce désir d'indépendance n'était qu'une lubie de quelqu'élite hynoptisée par l'attrait des tapis rouges et des "flags sur le hood"...argument méprisant s'il en est un, auquel une part de la population francophone semblait accorder du crédit. Et les éditoriaux fédéralistes n'ont jamais souligné le caractère odieux de tels propos mais choisissaient d'en rire