Harel affrontera Tremblay

Benoit Labonté accepte de s'éclipser en échange de la présidence du comité exécutif

Montréal - élection 2009


Jeanne Corriveau - Louise Harel tentera de conquérir la mairie de Montréal le 1er novembre prochain à la tête du parti Vision Montréal. Le chef de l'opposition, Benoit Labonté, a accepté de s'éclipser devant l'ancienne ministre péquiste en échange de la présidence du comité exécutif advenant l'élection du tandem à l'automne.
Mme Harel a mis fin au suspense qu'elle entretenait depuis des jours sur son avenir. Au terme d'une rencontre tenue hier matin, Louise Harel et Benoit Labonté ont scellé une alliance qui donnera une nouvelle impulsion à la campagne électorale à la mairie. En après-midi, ils ont tenu une conférence de presse conjointe au marché Bonsecours.
Souriante, Mme Harel a affirmé que les vives réactions des citoyens à l'égard de ses récentes déclarations publiques sur la désorganisation de Montréal l'avaient convaincue de se lancer dans la course.
Benoit Labonté, qui avait pris la tête de Vision Montréal en mai 2008, a offert à Mme Harel son parti sur un plateau d'argent. S'effaçant devant elle, il a renoncé à briguer la mairie et lui cédera sa place de chef. Un congrès spécial du parti se tiendra prochainement pour permettre à Mme Harel d'officialiser son statut. «C'est avec beaucoup d'enthousiasme et d'énergie que j'appuierai la candidature de Mme Louise Harel à la chefferie de Vision Montréal», a-t-il dit.
Il y a une semaine, M. Labonté avait pourtant rejeté catégoriquement la possibilité de laisser sa place à l'ancienne ministre. Pour expliquer sa volte-face, il a fait valoir que les ambitions personnelles qu'on lui prêtait ne reflétaient pas la réalité. «J'ai toujours dit que j'avais beaucoup plus d'ambitions pour Montréal que pour moi-même», a-t-il indiqué.
Plusieurs obstacles
Mme Harel a répété être préoccupée par les problèmes de gouvernance à Montréal et par la décentralisation des pouvoirs qui a transformé les arrondissements en «quasi-villes». «Il est grand temps de simplifier l'administration et la gestion de Montréal», a-t-elle indiqué.
Elle a toutefois reconnu que les fusions municipales de 2001, qu'elle avait pilotées à titre de ministre des Affaires municipales, et sa connaissance approximative de l'anglais pourraient lui nuire auprès de l'électorat anglophone. «Je n'ai pas peur de faire des erreurs grammaticales quand je parle anglais, mais j'ai peur de faire des erreurs politiques. C'est mon dilemme, mais j'en ai parlé très ouvertement à M. Labonté.» Elle a promis de suivre des cours d'anglais pendant l'été, comme elle l'avait fait l'an dernier.
Mme Harel, qui avait aussi été courtisée par Projet Montréal, le parti dirigé par Richard Bergeron, a lancé un appel aux militants de cette formation. «À tous ceux qui veulent un profond changement à Montréal, je leur dis que nous sommes ouverts à un dialogue constructif qui pourrait conduire à une alliance commune», a-t-elle fait savoir.
Les allégeances des deux nouveaux alliés -- la péquiste Louise Harel et le libéral Benoit Labonté -- ne seront pas un obstacle, estime la conseillère Noushig Eloyan: «Je suis très enthousiaste parce que c'est un tandem que je souhaitais depuis fort longtemps et parce que je suis convaincue que pour réunir les forces vives de Montréal, ça prend une équipe bleu-blanc-rouge», a-t-elle dit.
Mme Harel avait quitté la vie politique l'an dernier après avoir siégé 27 ans à l'Assemblée nationale comme députée de la circonscription d'Hochelaga-Maisonneuve. Elle disait alors souhaiter «un train de vie moins trépidant». Présent à la conférence de presse, son conjoint Edmond Omran s'est fait discret. A-t-il encouragé Mme Harel à se lancer dans la course à la mairie? «C'est une femme indépendante. Je lui souhaite bonne chance!» a-t-il lancé.
Projet Montréal
Le tandem Harel-Labonté risque de faire mal à Projet Montréal. En échange de son appui, le chef Richard Bergeron avait réclamé, mardi, que Mme Harel se présente à titre d'indépendante et qu'elle adhère intégralement au programme de Projet Montréal. Hier, Richard Bergeron n'a pas voulu commenter la décision de Mme Harel avant d'en discuter avec les membres du comité de direction du parti, qui se réunissaient en soirée. Un militant de Projet Montréal, sous le couvert de l'anonymat, a reconnu que le geste de Mme Harel allait changer le cours de la campagne et risquait d'ébranler l'enthousiasme des troupes.
Le maire Gérald Tremblay, qui sollicitera un troisième mandat à la tête d'Union Montréal, n'a pas voulu faire de commentaires. Il a confié à son attaché de presse le soin de livrer son message. «Après plusieurs mois de spéculations, nous sommes heureux que Mme Harel ait enfin pris une décision, a indiqué Martin Tremblay. Mme Harel n'est pas encore chef de Vision Montréal que déjà, elle nous annonce un immense rebrassage de structures et de longs débats sur la gouvernance. Pour notre administration, dans le contexte actuel de crise économique mondiale, la priorité est de garder le cap sur la priorité économique et l'amélioration de la qualité de vie des citoyens.» Rappelons qu'un récent sondage accordait à Mme Harel 45 % des intentions de vote, contre 26 % pour M. Tremblay lorsque les deux candidatures étaient proposées aux répondants.
L'arrivée de Louise Harel dans l'arène municipale n'a pas semblé ébranler la fidélité d'André Lavallée envers Union Montréal. Maire de l'arrondissement de Rosemont-La Petite-Patrie, M. Lavallée avait été directeur de cabinet adjoint de Mme Harel, entre 1999 et 2003, alors que celle-ci était ministre des Affaires municipales. «Ça a l'apparence d'un gros mariage forcé. Louise Harel est quelqu'un que j'estime beaucoup. Mais ma plus grande surprise, c'est l'alliance entre Louise Harel et Benoit Labonté au niveau des valeurs», a-t-il expliqué.
L'arrivée de Mme Harel pourrait changer les plans du député bloquiste d'Hochelaga, Réal Ménard, qui envisageait de faire le saut dans l'arène municipale en briguant la mairie de l'arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve avec Union Montréal. Joint hier soir, il a indiqué que sa décision n'était pas encore prise.


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