Rappelons d’abord que selon M. Charles Gaudreault, ingénieur chez H2O Innovation, la proportion de Québécois d’origine ethnique française chuterait de 79 % en 1971 à 45 % en 2050. Ce serait alors une perte de 35 points en 80 ans. C’est ce qu’il a prévu en 2018-2019 selon le seul scénario qu’il a élaboré et publié dans la revue Nations and Nationalism.
Ignorant notre critique parue dans Recherches sociographiques et résumée dans Le Devoir, M. Gaudreault a choisi, non pas d’en débattre, mais de déplacer son argumentation (4 mai 2023). En procédant ainsi, il est tombé de Charybde en Scylla.
Charybde
Affirmer à partir d’une lecture distraite d’une étude de généalogie (Vézina et al., 2005) « que les ancêtres des baby-boomers étaient à 95 % d’origine française », c’est confondre les personnes qui ont été recensées en 1971 avec leurs très nombreux ancêtres. C’est donner aux immigrants arrivés au XVIIe une avance « insurmontable » selon notre collègue démographe Hélène Vézina et ses collaborateurs.
Toute projection rétroactive permet de confronter les résultats obtenus avec les données probantes déjà observées, ce que Charles Gaudreault a omis de faire pour apprécier la justesse – ou non – de la partie historique (1971-2014) du seul scénario qu’il a élaboré.
Partant des résultats que M. Gaudreault obtient à propos du nombre des immigrants et de leurs descendants, nous les avons comparés à la population immigrée de la période 1971-2001 et recensée au Québec en 2001. Considérant le niveau de fécondité de cette période, nous avons calculé les naissances annuelles attribuables aux immigrantes en âges d’avoir des enfants.
Tous calculs faits, il s’est avéré que Charles Gaudreault a surestimé le nombre d’immigrants et leurs descendants d’au moins 39,5 %, ce qui n’a rien de négligeable. Précisions que, jouant de prudence comme il est recommandé de faire en prospective démographique, nous avons minimisé nos hypothèses. Par exemple, bien que les faits justifiaient de faire les calculs avec une fécondité de 1,7 enfant, nous avons opté pour 1,8.
Totalement silencieux sur notre évaluation, M. Gaudreault ne fait que réaffirmer que « le déclin de l’ascendance française […] est réel ». Oui, comme pour la langue française, il y a déclin, mais la question n’est pas là. Il s’agit d’en mesurer adéquatement l’importance.
Scylla
Croyant avoir échappé à Charybde sur la « pureté ethnique », M. Charles Gaudreault ne se doute pas que de recourir à des projections de Jacques Henripin et Louis Pelletier le conduit à Scylla.
Il retient que ces démographes ont montré « que les Québécois dont les ancêtres sont tous arrivés au Canada avant 1981 ne formeront plus qu’entre 25 % et 35 % de la population en 2081 ». Compte tenu des 45 % qu’il a prévu pour 2050, il en déduit que « le déclin obtenu par [s]es projections est conservateur ».
Gaudreault omet de préciser que les projections qu’il compare ont été conçues différemment. D’une part, M. Gaudreault a formé des groupes étanches basés sur l’origine ethnique des uns et la date d’arrivée des autres (les immigrants arrivés à partir de 1971 et leurs descendants). Au contraire, Henripin et Pelletier ont établi des groupes linguistiques ouverts les uns aux autres, notamment les immigrants de langues tierces susceptibles d’adopter le français ou l’anglais.
Par ailleurs, nos collègues démographes prennent en compte l’« enrichissement culturel » dû à l’immigration internationale, sans oublier les « tensions sociales » pouvant résulter de la question linguistique notamment. Au contraire, Charles Gaudreault ne fait entrer aucun immigrant scolarisé en français dans le groupe majoritaire réservé aux Québécois d’origine ethnique française, un groupe figé à partir de 1971.
S’il est un domaine où Jacques Henripin ne s’entendrait pas avec Charles Gaudreault, c’est bien sur la faiblesse de notre fécondité. Médusé par une « loi de puissance » inutile en démographie, Gaudreault a été amené à croire qu’une fécondité suffisante au remplacement des générations – 2,1 enfants par femme ou plus – puisse être sans effet comparativement à l’immigration internationale.
Conclusion
Faire l’hypothèse que la population du Québec d’origine ethnique française était intacte à 95% en 1971, c’est oublier l’apport de l’immigration catholique au Québec en plus de deux siècles (1763-1971). Il y a eu des mariages interethniques impliquant notamment des Irlandais, des Italiens, des Polonais catholiques, etc.
Refusant de « se retrancher derrière une forme quelconque de pureté doctrinale », Jacques Henripin et Louis Pelletier jugent leurs projections comme une « affaire de proportions ». En témoignent, les déclarations suivantes : « à vouloir pousser trop loin l’homogénéité ethnique, linguistique ou culturelle, on risque de se priver de précieux facteurs d’enrichissement » par l’immigration ; « le recours immodéré à [l’immigration pourrait nous] faire regretter la mise au rancard un peu trop allègre de nos berceaux ».
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1 commentaire
Hugo Landry Répondre
29 mai 2023Il faut éviter de mélanger "races" et "ethnies"! Le métissage au Québec avec les immigrés d'avant 1971 n'a pas du tout le même impact que maintenant, où les Québécois de souche sont parfaitement inondés d'immigrés de races totalement incompatibles ! Certes, dans le passé, on a reçu une vaste immigration forcée d'Écosse et d'Irlande, pour ne nommer que ceux là, dites "ethnies compatibles" et vous avez certainement raison de dire que le 95 % de souche française est peut-être plus de l'ordre de 75 %. Toutefois, le dilemme actuel est plus relié à la disparition du Blanc plutôt que de savoir à quel degré chaque Blanc qui compose ce qu'on appelle le "Québécois de souche" contient de sang purement français.
De toute façon, on n'a qu'à se promener à Montréal ou ailleurs dans les grandes villes du Québec pour voir clairement que la population change rapidement et drastiquement, alors que dans plusieurs quartiers, les Blancs sont déjà en minorité. Pourtant l'équation est simple, mais aussi évidente : ( taux de fécondité des Blancs ) - ( taux de fécondité des immigrés incompatibles + taux de fécondité des enfants d'immigrés incompatibles de générations suivantes + taux de métissage erroné + Immigration incompatible / année, massive et ascendante ), donne un résultat très négatif et en net défaveur des Blancs !
La loi du nombre ne ment jamais, même si vous avez un taux de natalité élevé d'une population autochtone, mais que celle-ci est soumise à un taux encore plus élevé venant d'immigrés incompatibles qui en plus ont un taux de natalité encore plus élevé, le peuple autochtone sera minorisé quand même. En fait, c'est pas la quantité qui compte, mais bien le ratio !
De mon côté, toutes les études sérieuses et professionnelles sont unanimes et elles révèlent tous le même constat : vers 2050, la population dite "Québécois de souche" sera au plus à 50 % de la population totale. Mais la réalité est plus dure, car plusieurs facteurs sont externes à vos chiffres et statistiques que peu de démographes peuvent comprendre ou prédire, ce qui fait que le % réel pour 2050 risque plus d'être autour de 40 % ou 45 % +- !
Les quelques facteurs qui peuvent altérer la vitesse de l'éradication d'un peuple sont :
1- le taux de mortalité plus élevé d'une frange de la population dû à sa plage d'âge à risque dans le futur.
2- le niveau d'immigration accéléré dans le temps. (comme le projet de Trudeau - 100 millions de population au Canada, dont au moins 20 millions pour le Québec et au plus tard pour 2100 !
3- le taux de natalité du peuple autochtone qui décline en deçà du taux moyen ou tendanciel actuel.
4- le taux du métissage erroné, entre le peuple autochtone et les immigrés incompatibles.
5- les données erronées ou tronquées qui altèrent la sévérité de la situation.
6- le niveau de décrépitude de ce même peuple autochtone.
En résumé les chiffres sont des guides approximatifs, mais la réalité sur le terrain ne ment pas : le changement est très rapide et très drastique et faut être aveugle pour nier que le tout dégénère rapidement.