« Le Québec va mieux », a déclaré Pauline Marois à l’Assemblée nationale au terme de la présente session. Peut-être. Ce n’est toutefois pas le cas du gouvernement Marois, dont le taux d’insatisfaction est au zénith. La glissade du Parti québécois s’est poursuivie avec des intentions de vote chutant à 25 % dans un dernier sondage. Mais les indécrottables optimistes ne manquent pas dans l’entourage de la chef péquiste : ils notent qu’une fois au fond du baril, le gouvernement ne peut que remonter dans la faveur populaire. Ils prédisent même qu’en décembre, le PQ sera en territoire majoritaire.
Québec — Le gouvernement Marois n’avait pas mal commencé l’année avec la conclusion du Sommet de l’enseignement supérieur, le sommet de tous les dangers que le ministre néophyte Pierre Duchesne devait absolument mener à bien. « La crise est derrière nous », répétait Pauline Marois dans ses discours après le sommet. Or le gouvernement s’est empressé de remettre le printemps érable à l’ordre du jour en créant la Commission spéciale d’examen des événements du printemps 2012.
Le gouvernement Marois montre ainsi une de ses tares : un manque de cohérence stratégique. Si la crise est bel et bien derrière nous, pourquoi en parler encore ? Le ministre de la Sécurité publique, Stéphane Bergeron, en a même rajouté en nommant l’ancienne présidente de la CSN, Claudette Carbonneau, qui avait pris fait et cause pour les étudiants, membre de cette commission.
La même absence de cohérence est apparue quand la ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Agnès Maltais, convaincue que le tout passerait comme lettre à la poste, a annoncé en mars qu’elle serrait la vis aux assistés sociaux afin de les inciter à se trouver du travail. Or, au même moment, Québec dénonçait le resserrement des règles de l’assurance-emploi qu’Ottawa justifiait avec les mêmes arguments qu’Agnès Maltais.
Posant un geste de gouvernance souverainiste, le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et à la Gouvernance souverainiste, Alexandre Cloutier, annonçait la création d’une Commission d’examen sur l’assurance-emploi présidée par Gilles Duceppe et Rita Dionne-Marsolais. Il s’agissait d’une opération politique sur laquelle le gouvernement Marois tablait, mais qui s’avère un exercice parfaitement confidentiel.
Les libéraux en hauteur
De leur côté, les libéraux ont pris leur rôle d’opposition au pied de la lettre. Mais ils n’ont pas toujours su lier le plancher des vaches - les travaux parlementaires - avec les hauteurs où évolue leur chef Philippe Couillard. Ils ont trébuché avec leur défense d’« élections à date juive », pour reprendre le mot de Sébastien Bovet, d’ICI Radio-Canada. Habile, le ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Participation citoyenne, Bernard Drainville, a réussi à les faire mal paraître.
Leur opposition aux contrats de gré à gré pour les projets d’éoliennes a entraîné une levée de boucliers en Gaspésie : les libéraux bloquaient ainsi un projet issu des communautés micmaques de la Baie-des-Chaleurs, projet que le milieu appuie fortement. Ils ont dû faire marche arrière.
Le projet de loi 14 visant à renforcer le français au Québec n’a pas été la locomotive qu’espérait le gouvernement Marois dans l’opinion publique. La Coalition avenir Québec a forcé la ministre responsable de la Charte de la langue française, Diane De Courcy, à faire maints compromis. Son étude article par article, dont on ne sait si elle aboutira, a été reportée à l’automne dans l’indifférence quasi générale.
Pièce maîtresse de la stratégie économique, la Banque de développement économique du Québec n’a pu voir le jour, libéraux et caquistes s’étant opposés à l’adoption du projet de loi qui la mettait en place. Le ministre des Finances et de l’Économie, Nicolas Marceau, a toutefois mis en place un nouveau régime de redevances pour l’exploitation minière, beaucoup plus modeste que promis. La ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, a finalement déposé son projet sur les mines.
Vendredi, Pauline Marois a reconnu que son gouvernement avait présenté un trop grand nombre de projets de loi majeurs, que ses ministres avaient tiré dans plusieurs directions à la fois. Elle-même avait voulu se montrer volontariste et active. Elle affirme toutefois que ses ministres, qui, pour la plupart, n’avaient pas d’expérience ministérielle, sont aguerris. Le temps de l’hyperactivité brouillonne serait révolu.
Or l’automne s’avère très chargé, même si la première ministre vise la simplification du message gouvernemental. Bernard Drainville présentera son projet de charte des valeurs québécoises - charte qui n’en sera pas une mais plutôt une déclaration -, mais surtout ses propositions en matière de neutralité religieuse de l’État, dont l’interdiction faite à la plupart des employés de l’État de porter des signes religieux ostensibles. Certains au gouvernement voient d’ailleurs d’un mauvais oeil que les consultations sur ce sujet sensible se déroulent en même temps que l’étude du projet de loi 14 qui a déjà suscité sa part de débats. Quand on sait ce qu’un simple turban peut entraîner comme controverses, on peut croire que l’interdiction du hidjab dans les garderies ne passera pas inaperçue.
Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Réjean Hébert, tiendra des consultations concernant son Livre blanc sur l’assurance autonomie. Les sondages internes du gouvernement indiquent que l’idée est bien reçue. En revanche, la facture qui y est associée pourrait être plus difficile à avaler.
Dernière étape
L’automne, c’est la dernière étape en vue des prochaines élections qui, s’il faut en croire François Legault, qui est prêt à jouer son va-tout, auront lieu au printemps lors du dépôt du budget. Le gouvernement Marois aura quatre mois pour se remettre à flot.
Économie et identité seront les piliers du message gouvernemental. Pour ce qui est de l’économie, on croise les doigts en espérant qu’une croissance plus forte que prévu damera le pion à l’opposition. En matière de laïcité, le gouvernement croit que l’opinion publique est derrière lui, et les « bien-pensants », comme certains les désignent dans l’entourage de la première ministre, n’auront pas le dessus. Ne reste plus qu’à arrêter une stratégie.
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