L'hôpital du Sacré-Coeur négocie avec la clinique privée Rockland MD pour y transférer des chirurgies d'un jour, a-t-on appris cette semaine. Ce contrat, le premier du genre au Québec, soulève beaucoup de questions. À juste titre. C'est pourquoi il faut dépasser le stade des inquiétudes et des réponses théoriques pour aller au fond des choses. Il faut explorer cette possibilité comme un projet pilote, avec toute la rigueur et la transparence que cela suppose.
Sacré-Coeur, comme beaucoup d'autres établissements, ne manque ni de chirurgiens ni de salles d'opération, mais de personnel infirmier pour les faire rouler. Résultat: les patients attendent leur intervention élective trop longtemps et les chirurgiens fulminent de ne pouvoir les opérer. Solution proposée pour sortir de l'impasse: envoyer les médecins opérer leurs patients à la clinique Rockland, qui fournirait non seulement les salles, mais le personnel infirmier et les inhalothérapeutes. Condition essentielle: le patient n'a rien à débourser et l'État ne verse pas plus d'argent que si l'opération se faisait à l'hôpital. À la clinique de s'organiser pour dégager un profit.
Sacré-Coeur parle d'un projet pilote de trois ou quatre mois pour explorer la formule, déterminer quelles interventions peuvent être transférées, et à quel tarif. Il faut en profiter pour réaliser un examen indépendant de la chose, et rendre ces observations publiques.
Plusieurs facteurs devront être mesurés. D'abord, le quantitatif. Est-ce que cette collaboration public-privé réduit vraiment l'attente des patients? Est-ce que les coûts sont contrôlés comme on nous le promet? Ensuite, le qualitatif. Que pensent les médecins de l'environnement que leur propose la clinique? Les patients sont-ils satisfaits de l'expérience?
Il faudra aussi surveiller l'apparition d'effets secondaires indésirables dans le système public. L'entente interdit à Rockland de débaucher le personnel de Sacré-Coeur, mais la clinique recrute en ce moment des infirmières expérimentées en salle d'op, de réveil ou d'endoscopie. D'autres établissements perdront-ils du personnel à cause de cette entente? Il faudra également s'assurer que le délestage des chirurgies les plus légères ne nuit pas à Sacré-Coeur.
Si tout se déroule comme prévu, Rockland obtiendra un contrat de clinique associée. Là encore, un suivi étroit sera de mise, car l'entente servira de modèle à d'autres partenariats du genre.
Mais avant de multiplier les contrats, le ministère doit réfléchir à la façon de les attribuer. Sacré-Coeur a procédé de gré à gré parce qu'il n'y avait pratiquement pas d'autres établissement capables de répondre à ses besoins sur-le-champ. Ce cas doit rester une exception.
Rappelons qu'il s'agit de contrats gouvernementaux de cinq ans, dotés d'un volume d'affaires intéressant. Québec ne doit donc pas se limiter aux fournisseurs disponibles à court terme, mais ouvrir des appels d'offres auxquels les promoteurs sérieux pourront également participer. Oui, expérimentons le privé. Cependant, faisons-le intelligemment, en donnant toutes les chances au système public d'en tirer profit.
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