Éthique et culture religieuse: la grande propagande

ECR - Éthique et culture religieuse

La sortie de Pierre Curzi contre le cours d’Éthique et culture religieuse (ÉCR), qu’il souhaite remplacer par un cours d’histoire, est un signe supplémentaire du changement de ton qui s’opère non seulement au sein du Parti Québécois, mais également dans la population. Sur un sujet aussi controversé que l’imposition du multiculturalisme comme dogme absolu dans nos écoles, on a enfin l’impression qu’il est possible de s’exprimer et de clamer son refus de se voir disparaître dans la mélasse d’une confusion identitaire sans pour autant se faire traiter de racistes ou de xénophobes.

L’étude publiée hier par la sociologue Joëlle Quérin est sans appel: le cours d’Éthique et culture religieuse est un outil de propagande cherchant non pas à éduquer nos enfants afin qu’ils adoptent des comportements issus de la réflexion, mais plutôt à imposer les comportements qu’on considère comme socialement acceptables, avec les accommodements raisonnables en première ligne. Quérin explique magistralement de quelle façon on a voulu créer ce cours dans l’optique de favoriser la diversité culturelle et de s’approprier l’opinion des minorités au détriment du ciment unificateur d’une culture forte et homogène. « L’implantation [du cours d'Éthique et culture religieuse] était déjà présentée à l’époque comme une obligation morale sur laquelle la population n’était pas en droit de se prononcer » peut-on y lire. En clair: le multiculturalisme constitue un dogme tout-puissant et au lieu d’aider l’enfant à prendre conscience de sa position identitaire dans le monde, on l’invite à renier encore davantage ses origines pour adhérer aux valeurs de l’autre. On lui enseigne l’à-plat-ventrisme et le déni de son identité.
De la même manière, l’étude démontre de quelle façon le cours d’Éthique et de culture religieuse camoufle cette identité derrière la conception surréaliste d’un Québécois ne faisant pas partie d’un tout au niveau de la langue ou des valeurs, mais se définissant simplement selon des notions juridiques. Bref, selon ce cours, est Québécois qui respecte la Charte québécoise des droits et libertés! L’auteure se demande: les touristes sont-ils Québécois parce qu’ils respectent cette charte? Où se trouve la culture, la langue, l’histoire commune? « Le cours d’ÉCR consacre une conception du Québec comme nation strictement civique, définie non pas à partir de son histoire et de ses spécificités culturelles, mais uniquement à partir de sa Charte des droits ». En somme, il suffit d’être ici, de considérer la culture québécoise comme étant inexistante d’un sens anthropologique, de célébrer les origines de tous les immigrants (mais pas la nôtre, non, non, méchant xénophobe va!), et on devient Québécois. Plus suicidaire que cela, tu te promènes avec une corde autour du cou.
Toute cette contamination du cours d’Éthique et culture religieuse par des objectifs politiques de valorisation du multiculturalisme appelle une question importante: à quoi sert l’éducation? L’école doit-elle constituer une machine à former des individus selon la soupe idéologique du jour, camouflant la réalité, occultant des faits, vampirisant la pensée naissante des citoyens de demain, ou ne devrait-elle pas plutôt façonner des individus libres et informés non seulement sur les autres, mais aussi et surtout sur eux-mêmes, sur leur culture, leurs valeurs, leurs ancêtres?
Or, ce n’est pas en enfonçant le clou rouillé et difforme du multiculturalisme dans la tendre cervelle de nos rejetons qu’on réussira à leur apprendre l’ouverture. L’ouverture, la véritable ouverture, c’est avant tout la capacité à remettre en question les dogmes officiels. Être ouvert, c’est avoir un esprit suffisamment formé non seulement aux idées largement véhiculées et considérées comme acceptables dans la société, mais également comprendre et s’intéresser aux idées que la société a choisi de rejeter. Si l’éducation se contente d’être le reflet des valeurs courantes de la collectivité, on se condamne à faire du surplace et on empêche la nécessaire évolution des idées.
Ainsi, en refusant de s’intéresser à l’évolution historique et culturelle du peuple québécois, en choisissant d’occulter le lien direct entre les choix politiques et religieux de nos ancêtres et ce que nous sommes aujourd’hui, en faisant primer l’apprentissage des comportements de nos chérubins sur la nécessité de leur inculquer un esprit vif et critique, capable par lui-même de juger des avantages ou des inconvénients à adopter le dogme du multiculturalisme, nous sommes en train de créer des individus amorphes, en crise identitaire, profondément dépourvus d’outils pour comprendre la place historique qu’ils occupent dans le monde. De futurs adultes à l’identité schizophrénique, écartelée entre des racines réelles qu’on a voulu déraciner et les racines imaginaires qu’on a voulu créer en eux.
À force de vanter le « rapprochement entre les différentes communautés du Québec » (dixit la ministre Courchesne) passant par la survalorisation du multiculturalisme, on oublie peut-être la chose la plus importante: la sauvegarde de la seule communauté capable de réellement accueillir toutes les autres et pouvant leur donner envie de vouloir s’intégrer dans un vivre-ensemble porteur d’avenir.
Une société plus cohérente et ouverte passe peut-être donc par la revalorisation de la nation québécoise et par le message, sans ambiguïté, que le peuple du Québec possède une histoire, une culture et une langue communes et que nous sommes prêts à accueillir quiconque désire se joindre à notre destin commun dans le respect des valeurs qui nous sont chères.
Car à trop chercher à se rapprocher des autres, on oublie peut-être le principal: ont-ils envie, eux, de se rapprocher d’un peuple sans culture, sans histoire, sans passé, sans fierté, sans futur? Un peuple dont les plus hautes aspirations sont de se fondre dans tous les autres?


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