Nous ajoutons cette semaine trois ensembles de données au modèle électoral fédéral Qc125: la mise à jour habituelle de Nanos et des sondages des firmes Innovative Research et Campaign Research.
Voici les sondages fédéraux des douze derniers mois. La liste complète des sondages est disponible sur cette page.
Nous mesurons cette semaine un resserrement significatif des intentions de vote au pays et, comme nous le verrons plus bas, les chiffres du Québec ne font pas exception.
Voici la projection fédérale Qc125 du 17 février 2019.
La projection du vote populaire
Avec ces nouvelles données ajoutées au modèle, nous obtenons une égalité statistique en tête des intentions de vote entre le Parti libéral du Canada (35,0%) et le Parti conservateur du Canada (34,7%). L’écart qui sépare les projections moyennes de ces deux partis, soit 0,3%, est considérablement plus petit que l’incertitude de cette projection. Donc, si une élection avait lieu et que ces chiffres étaient les derniers disponibles, il serait impossible d’identifier un clair favori pour remporter le vote populaire.
Voici les projections du vote populaire au niveau fédéral avec les intervalles de confiance de 95%:
La projection de sièges
Avec ces niveaux d’appuis, voici les projections de sièges pour chacun des partis:
Le Parti libéral du Canada obtient une moyenne de 160 sièges, soit sous le seuil de la majorité à la Chambre des Communes (170 sièges). En moyenne, le PLC remporte 135 sièges dans les provinces de l’Atlantique, au Québec et en Ontario… et donc seulement une vingtaine de sièges du Manitoba jusqu’en Colombie-Britannique.
Le Parti conservateur du Canada grimpe à une moyenne de 147 sièges. Selon les données de cette projection, le PCC fait des gains au Nouveau-Brunswick, en Ontario et dans chacune des provinces de l’Ouest canadien.
Comme nous pouvons le constater ci-dessous, les intervalles de confiance du PLC et du PCC se croisent considérablement. Nous avons donc également une égalité statistique entre ces deux partis en ce qui a trait à la projection de sièges.
De son côté, le Nouveau Parti démocratique continue de stagner avec une moyenne de seulement 16 sièges au pays.
Le Parti vert du Canada, dont la seule élue est la cheffe Élizabeth May, peut espérer enregistrer des gains modestes sur l’Île de Vancouver en Colombie-Britannique.
Et le Bloc québécois? Nous y reviendrons plus bas.
La projection du vainqueur
L’avance dont jouissaient les Libéraux à l’automne 2018 a fondu comme neige au soleil. En effet, le PLC remporte le plus grand total de sièges dans seulement près de six simulations sur dix, soit son plus bas total depuis le création du modèle fédéral Qc125 à l’automne dernier. D’après les données, le scénario d’un gouvernement minoritaire est statistiquement fort probable, mais, à quelques fractions de point près, à la fois le PLC et le PCC pourraient atteindre la barre des 170 sièges.
La projection au Québec
Ce qui nous mène à la situation au Québec. Quatre sondages de quatre firmes différentes, publiés au cours des deux dernières semaines, ont mesuré une hausse des appuis au Bloc québécois – hausse qui coïncide avec la nomination du nouveau chef bloquiste Yves-François Blanchet.
Voici les appuis au Bloc tels que mesurés par les firmes en question:
Mis à part le sondage Léger/Journal de Montréal (dont l’échantillon québécois était de 1007 répondants), les firmes Innovative, Campaign et Nanos ont toutes mesuré des variations qui, considérant la taille des sous-échantillons, pourraient être considérées comme des fluctuations statistiques normales – du simple «bruit» dans les données.
Toutefois, le fait que toutes ces firmes aient détecté un mouvement des appuis au Bloc dans la même direction (en hausse), et ce, peu après l’arrivée d’un nouveau chef, peut difficilement n’être qu’une coïncidence. Évidemment, si le Bloc est réellement en hausse au Québec, les chiffres des prochaines semaines nous le confirmeront, mais il est n’est pas prématuré de lancer l’hypothèse que le creux de la vague au Bloc québécois soit bel et bien derrière lui.
Voici les projections moyennes du vote populaire au Québec comparées avec celles de la semaine dernière:
Et voici les projections moyennes de sièges au Québec. Les Libéraux sont toujours loin devant, mais leur projection moyenne chute de cinq sièges après l’ajout des chiffres publiés dans la dernière semaine:
Avec une moyenne de plus de cinquante sièges au Québec, ce qui serait une première pour le PLC depuis 1980, nous constatons ici que ce sont d’abord les Libéraux qui se nourrissent des restes du NPD au Québec. En effet, les projections actuelles des Conservateurs et du Bloc, soit 12 et 10 sièges respectivement, correspondent avec leurs totaux québécois de 2015.
En conclusion
Depuis la création du Bloc québécois en 1991, il y a eu trois gouvernements minoritaires à la Chambre des Communes: les Libéraux de Paul Martin en 2004, puis les Conservateurs de Stephen Harper en 2006 et 2008. Bien que moult discussions ont eu lieu à l’époque sur la possibilité d’un gouvernement de coalition (y compris la défunte entente entre Stéphane Dion, Jack Layton et Gilles Duceppe après l’élection de 2008…), dans aucun de ces cas une coalition formelle n’a vu le jour. Ainsi, lors du dépôt de chaque projet de loi proposé par le gouvernement, lors de chaque budget présenté en chambre, le gouvernement devait obtenir le support d’au moins un parti d’opposition – ou espérer qu’un nombre suffisant de députés de l’opposition ne s’abstiennent du vote.
En cette année électorale, il est fort probable que ni Justin Trudeau, ni Andrew Scheer n’osera discuter de la possibilité bien réelle de l’élection d’un gouvernement minoritaire – et d’une potentielle et hypothétique coalition avec un ou des partis d’opposition. Toutefois, en regardant les chiffres actuels, nous constatons qu’il est possible que le Bloc québécois détienne la balance du pouvoir dans un gouvernement minoritaire, qu’il soit libéral ou conservateur. Comme ce parti n’aspire évidemment pas au pouvoir à Ottawa, ne serait-ce pas le scénario rêvé pour Yves-François Blanchet et son équipe?
Certes, le scénario rêvé d’un parti est le cauchemar d’un autre. Parions que MM. Trudeau et Scheer ne sont pas particulièrement friands à l’idée de diriger le Canada avec le Bloc dans les pattes (ou même, dans une moindre mesure, le NPD).
Nous verrons dans les prochaines semaines si ces variations récentes font partie de nouvelles tendances ou ne sont que de simples fluctuations. C’est à suivre.