Et le Canada?

Proche-Orient : mensonges, désastre et cynisme

Pendant très longtemps la place du Canada dans le monde a été définie essentiellement par trois choses: un soutien indéfectible au système des Nations unies qui se traduisait par une contribution majeure au développement du droit international et aux opérations du maintien de la paix, un programme d'aide au développement efficace et généreux et une appartenance, pour des raisons historiques ou géographiques, à une pléiade d'organisations internationales allant du Commonwealth à la Francophonie en passant par l'OTAN et l'OCDE, l'APEC et l'OEÀ sans compter le G-8 et les institutions financières internationales. Tout cela devait assurer au Canada une visibilité permanente et une place d'honneur à la table des nations mais le monde a changé et nous aussi.
Le système des Nations unies n'a pas connu l'âge d'or qu'on lui promettait avec la fin de la guerre froide, notre programme d'aide fait l'objet de critiques sévères (dernières en date, celles du Comité permanent du Sénat sur les affaires étrangères) et, dans toutes les régions du monde, ce sont des organisations différentes de celles auxquelles le Canada appartient, qui ont le vent en poupe. De nouveaux joueurs aussi sont apparus sur la scène internationale, et des joueurs importants. Notre poids relatif ne peut qu'en être affecté. Une vraie concurrence s'est installée non seulement au plan commercial mais aussi au plan politique. Pour des pays d'importance moyenne comme le Canada, le risque d'une marginalisation croissante est bien réel.
Pour exister sur la scène internationale et espérer peser dans les affaires du monde, il faut avoir des idées, des ressources humaines et financières et le courage de faire des choix. Il faut avoir des idées car l'important n'est pas d'avoir une place à table mais d'avoir quelque chose à dire. Cela suppose une capacité d'analyse indépendante et une vision stratégique de ce qui est possible et souhaitable pour soi et pour les autres. Il faut avoir un corps diplomatique affûté et doté des moyens nécessaires. Dans son dernier rapport annuel, la Vérificatrice générale est venue utilement rappeler les lacunes du Canada dans ce domaine. Il faut aussi avoir un gouvernement et, en particulier un premier ministre, que l'international intéresse. Les contacts personnels entre chefs d'État sont essentiels.
Il faut aussi accepter l'idée qu'une place dans le monde ça s'achète avec des budgets conséquents pour les affaires étrangères, pour le commerce international, pour le développement et pour la défense. On ne peut pas vivre indéfiniment sur un capital de sympathie accumulé au fil des ans. Surtout pas à l'époque actuelle où la compétition est féroce.
Il faut enfin avoir le courage de décider quels objectifs on poursuit. Si on croit que l'avenir du Canada est dans une intégration toujours plus poussée avec les États-Unis, il faut s'engager résolument dans cette voie et en assumer les conséquences. Si on croit que le Canada devrait plutôt cultiver de nouveaux alliés, il faut cesser d'indisposer inutilement la Chine et donner une suite énergique à nos projets d'accord avec l'Union européenne ou avec l'Inde. Si on croit que l'image du Canada dans le monde n'est pas celle qu'elle devrait être, il faut se donner les moyens de la changer. On ne peut pas, cependant, réussir à projeter une image forte et cohérente à l'étranger si, au plan domestique, il n'y a pas de consensus solide sur les objectifs qui sont les nôtres et les moyens dont on dispose pour les atteindre.
Des atouts
Le Canada dispose d'atouts exceptionnels et rien, en vérité, ne nous contraint à subir passivement la mondialisation ou le poids de notre unique et puissant voisin. Dans un monde assoiffé d'énergie et de matières premières, nos ressources naturelles nous mettent, au moins théoriquement, en position de force. Encore faut-il avoir une idée de la façon dont on entend se servir de ses cartes maîtresses. À cet égard, on est en droit d'attendre du gouvernement fédéral qu'il définisse une vision stratégique de la gestion de nos ressources naturelles à l'international et qu'il amène les provinces à y souscrire. À une époque où des pays d'une importance égale ou même supérieure à celle du Canada reconnaissent la nécessité de s'unir pour pouvoir faire face, il ne faudrait surtout pas donner aux provinces canadiennes des raisons de croire qu'elles réussiraient mieux à tirer leur épingle du jeu en partant au combat en ordre dispersé.
On a dans le monde non pas tant la place qu'on mérite que la place qu'on se donne.
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Marie Bernard-Meunier
Diplomate de carrière, l'auteure a été ambassa drice du Canada à l'UNESCO, aux Pays-Bas et en Allemagne. Elle vit maintenant à Montréal et siège au conseil d'administration du CERIUM.

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Diplomate de carrière, l'auteure a été ambassadrice du Canada à l'UNESCO, aux Pays-Bas et en Allemagne. Elle vit maintenant à Montréal et siège au conseil d'administration du CERIUM.





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