La pénurie enseignante ne date pas d’hier et ne semble pas à la veille de se résorber. Plusieurs propositions pour mettre fin à cette pénurie enseignante ont été mises de l’avant mais rien ne semble avoir piqué l’intérêt des décideurs. Régler cette pénurie à long terme se fera inévitablement par la relève enseignante, qui passera par nos rangs universitaires dans les prochaines années. Si on veut encourager une relève enseignante, il faut rendre le métier plus attrayant et les conditions de travail font certainement partie de l’équation. Par contre, il ne faut pas s’arrêter uniquement aux conditions de travail. Nettoyer la profession Il faudra cesser de répéter ad nauseam que notre tâche enseignante est trop lourde, trop difficile, etc. Comment peut-on espérer attirer de la relève avec un discours aussi négatif? Je ne nie pas la complexité du métier d'enseignant, je la vis tous les jours, comme mes collègues, mais il faudra un jour rehausser la barre quant à notre métier. Enseigner, c’est un métier qui vous rendra votre investissement au centuple. Je crois sincèrement qu’il n’y a pas de profession plus gratifiante et enrichissante. Afin de pouvoir vivre pleinement l’expérience enseignante, il faudra en revanche se débarrasser de toute cette pagaille bureaucratique et ramener la tâche enseignante à son essence, enseigner. Il ne faut pas se leurrer, enseigner n’est pas à la portée de tous. Il faut s’attaquer au discours absurde prétendant que n’importe qui peut enseigner. Peut-on rêver à une formation universitaire plus axée sur la pratique (didactique et stages), avec une dernière année axée sur la recherche et l'innovation menant à une maîtrise, transformant les enseignants de simples exécutants de prescriptions ministérielles en réels leaders pédagogiques? L’excellence en éducation est l’affaire de tous. Si nous demandons à nos élèves le meilleur d’eux-mêmes dans leur parcours académique et un soutien indéfectible des parents, ceux-ci sont en droit d’exiger le meilleur des enseignants. Il ne faut pas avoir peur de dénoncer ceux et celles qui nuisent à notre réputation professionnelle et encourager la poursuite de l’excellence au lieu de l’effort minimal. Les syndicats ont le devoir de défendre les profs, mais il est nécessaire plus que jamais d’avoir également une voix qui défend la profession enseignante car ce sont là deux enjeux complètement distincts. La création d’un ordre ou d’une association professionnelle ne devraient-ils pas faire partie des plans? Revaloriser Alors que dans certains pays scandinaves l’enseignement est perçu comme un métier noble, au même niveau que la médecine ou le droit, attirant l’élite académique, nous rabaissons constamment nos exigences pour y accéder ici au Québec. Une pénurie peut-elle vraiment justifier un tel relâchement? Croyez-vous que les facultés de médecine nivellent par le bas afin de diplômer plus de médecins de famille? Non. Le Barreau du Québec est-il moins exigeant envers ses membres vu les délais dans notre système de justice? Non. Peut-on penser à rehausser nos exigences pour l’enseignement? Le processus de revalorisation passe par les enseignants eux-mêmes avant tout. Il faut savoir reconnaître ceux et celles qui se dépassent chaque jour et qui s’élèvent au-dessus du lot. Je suis le premier à dénoncer le manque de rigueur dont nous faisons preuve envers nos élèves. L’effort, la persévérance et la poursuite de l’excellence doivent être des valeurs centrales chez les jeunes assis dans nos classes. Cependant, il en va de même aussi pour ceux et celles qui sont devant la classe. Exigeons le meilleur autant de nos enfants que de nos profs, et peut-être pourrons-nous finalement rebâtir tous ensemble un système d’éducation digne de ce nom.
PHOTO PIERRE-PAUL POULIN
Simon Landry, Enseignant, Montréal