La CAQ jubilait jeudi. Pensez-y: partir pour une pause parlementaire de deux semaines sur fond de grosses histoires d’intégrité dommageables pour le gouvernement. Et en plus, avec une recrue qui incarne la lutte pour l’intégrité, l’ancienne procureure de la commission Charbonneau, Sonia Lebel.
«Quand l’intégrité revient à l’avant-plan, le PLQ baisse et la CAQ remonte», se réjouissait-on dans les bureaux du parti qui veut nous donner Legault. En matière d’actualité politique, la relâche d’hiver est moins débranchée que les vacances de Noël; et encore moins que les estivales.
Ce n’est pas fini
Au surplus, les deux gros dossiers siamois de cette semaine, la crise au Service de police de la Ville de Montréal et le va-tout de l’entrepreneur déchu Luigi Coretti, n’ont pas fini d’embêter le gouvernement Couillard. Le fait qu’il ait senti le besoin d’intervenir en après-midi vendredi le montre bien.
On peut comprendre la réticence du gouvernement à créer une autre commission d’enquête publique, cette fois sur le SPVM: après Gomery, Johnson, Bastarache et Charbonneau, plusieurs sont désillusionnés face à ces exercices longs, fastidieux, coûteux et aux résultats souvent trop nuancés. On oublie aussi souvent que nous n’en sommes plus à la glorieuse époque des commissions des années 1970, celle des Cliche et CECO. Dans plusieurs jugements, la Cour suprême a durablement réduit l’aspect «inquisiteur» du rôle des présidents de commissions.
Bien qu’elle soit un outil émoussé, malgré ses défauts, la commission demeure une sorte de réflexe. D’ailleurs, un sondage nous apprenait vendredi que 81 % des Montréalais estiment que le gouvernement devrait déclencher une enquête indépendante sur l’ensemble du corps de police. Y a-t-il une autre option?
Autre formule
Le gouvernement s’est échiné toute la semaine, jusqu’à hier soir, à en définir une inédite. Pour diminuer le malaise de voir encore une fois la police enquêter sur la police – ici les Verts (la Sûreté du Québec) sur les bleus (SPVM)... à Val-d’Or, les couleurs étaient inversées –, Martin Coiteux a annoncé une sorte d’enquête lasagne gratinée quatre fromages: les «enquêteurs chevronnés» de la SQ mandatés auront plusieurs chaperons: un procureur du Directeur des poursuites criminelles et pénales, le commissaire à la déontologie, la GRC. Un autre fera le lien entre l’enquête et la commission Chamberland sur les sources journalistiques. Jean-François Lisée a proposé jeudi matin d’y adjoindre un observateur indépendant! Comme à Val-d’Or. Mais vendredi, Martin Coiteux a préféré convoquer tous les grands corps policiers du Québec et la patronne du Bureau des enquêtes indépendantes (BEI)!
L’ajout continuel de couches à cette enquête lasagne confine au ridicule et risque de coûter aussi cher qu’une commission d’enquête en bonne et due forme. Tout cela révèle surtout la grave carence en indépendance de la formule initiale: cette enquête de la SQ commandée en catastrophe par le patron du SPVM sans mandat écrit. Martin Coiteux aurait dû, dès mercredi matin, annoncer son intention de confier l’affaire au BEI. La loi le permet. La formation des enquêteurs, parmi lesquels il y a d’anciens policiers, aurait pu être ajustée. Cela eut assuré de meilleurs résultats que cette formule bricolée.
Un autre recul
Au lieu de cela, le gouvernement part en pause parlementaire en ayant lancé une enquête multicouche qui tournera, à l’image du SPVM, en invraisemblable panier de crabes.
Enfin, il s’agit d’un deuxième recul majeur en une semaine, le premier étant celui sur le crédit d’impôt en raison de l’âge. Les membres du gouvernement, dans les deux prochaines semaines, devront en profiter pour se détendre. Le printemps ne s’annonce pas reposant.
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