En flagrant délit

Option Canada

La publication du livre Les Secrets d'Option Canada signé par Normand Lester et Robin Philpot arrive à un bien mauvais moment pour les libéraux de Paul Martin en ce qu'il vient raviver le scandale des commandites à l'esprit des électeurs. Les révélations de ce livre appellent des réponses de la part de ceux qui ont créé Option Canada en 1995 et justifient la tenue d'une enquête.
Ce livre est embarrassant pour Paul Martin du fait que sa sortie arrive au moment où sa campagne électorale se découd par morceaux. Alors qu'il pouvait espérer reprendre l'offensive grâce au débat des chefs, il est à nouveau forcé de défendre un bilan éthique négatif. Les révélations de ce livre confirment hors de tout doute que le gouvernement fédéral a créé secrètement Option Canada pour contourner la loi québécoise sur les référendums.
Option Canada est né tout juste quelques jours avant la tenue du référendum de 1995. Il s'agissait de doter le Conseil pour l'unité canadienne d'un paravent pour faire campagne pour le NON. Le ministère du Patrimoine lui a versé tout près de cinq millions de dollars dont une large partie a été dépensée pendant la période référendaire en contravention avec les règles sur les lois québécoises auxquelles Option Canada était soumis ayant son siège social à Montréal. Résultat : le NON, dont les dépenses, comme pour le camp du OUI, étaient limitées à cinq millions, a pu dépenser beaucoup plus grâce à cette caisse occulte parallèle. L'équilibre du jeu démocratique prévu par la loi référendaire a donc été faussé.
L'existence d'Option Canada a été tenue secrète et, lorsqu'elle aura été connue en 1997, il ne fut jamais possible de savoir comment l'argent reçu d'Ottawa fut dépensé. Le Directeur général des élections du Québec et le Vérificateur général du Canada tentèrent d'enquêter, mais se butèrent alors à une véritable conspiration du silence. Aujourd'hui, plusieurs de ceux qui ont nié avoir été liés d'une façon ou d'une autre à Option Canada sont pris en flagrant délit de demi-vérités ou de mensonges tout simplement. Ainsi, il est maintenant bien difficile de croire le président dit honoraire d'Option Canada, Claude Dauphin, lorsqu'il nous dit n'avoir rien su de ce à quoi servait cet argent, alors que lui-même était rémunéré pour sa participation aux activités de cet organisme. Les chèques qu'il a encaissés sont là pour le prouver. Il n'est pas le seul dont la crédibilité est gravement entachée.
Le secret dont Option Canada était entouré servait à préserver la façade de légalité derrière laquelle les gouvernements libéraux qui se sont succédé à Ottawa ces 35 dernières années se sont cachés pour mener la lutte au mouvement souverainiste. On se souviendra que, dans les années 1970, les «plombiers» de la GRC n'hésitaient pas à commettre des gestes criminels. Avec Option Canada, le gouvernement Chrétien se garda d'aller aussi loin, situant néanmoins son action en dehors des lois et des règles.
Le ministre Jean Lapierre a réagi sommairement au nom du gouvernement Martin hier à ces révélations en disant qu'il appartiendrait au Directeur général des élections du Québec et au Vérificateur général du Canada de faire enquête. C'est le moins puisque ceux-ci ne pourront éviter de revenir sur le sujet maintenant qu'ils auront à leur disposition les documents sur lesquels Lester et Philpot ont mis la main. Leur enquête ne pourra toutefois être complète puisqu'ils n'ont pas à leur disposition tous les outils pour aller au fond des choses.
S'il voulait faire preuve de totale transparence dans cette affaire, Paul Martin ferait deux choses. Tout d'abord, il prolongerait le mandat du juge Gomery et lui demanderait de se pencher sur le fonctionnement d'Option Canada. Ce serait un complément logique à son enquête sur le programme des commandites puisqu'existe un lien direct entre les deux. Puis il prendrait l'engagement que désormais le gouvernement fédéral se battra visière levée contre les souverainistes et qu'Ottawa respectera les lois québécoises lors d'un prochain référendum. Mais, l'homme, on le sait, est hésitant. Il dira plutôt une chose et son contraire tout à la fois. Il dira qu'il faut respecter les règles, mais qu'il fera tout pour empêcher la réalisation de la souveraineté du Québec.


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