Ouch! Cette fois, le Canada se fait vraiment taper sur les doigts. «La plupart des pays développés sont en retard sur leurs objectifs, selon le protocole de Kyoto. Le Canada est un cas extrême», souligne le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) dans son rapport rendu public mardi.
Que cette brique atterrisse quelques jours après que le premier ministre Harper se fut définitivement dissocié de Kyoto est sans doute un hasard. Mais qu'elle arrive moins d'une semaine avant la conférence de Bali n'est pas une coïncidence. À cinq ans de l'échéance du protocole, il n'y a vraiment pas de quoi crier «mission accomplie». Les chefs d'État qui participeront au coup d'envoi sur les négociations de l'après-Kyoto feraient bien de garder ça à l'esprit.
On fait grand cas ici du désistement de Stephen Harper. Avec raison. De tous les chefs d'État gardiens des engagements de leur pays face au protocole, il est le seul à avoir tourné la page aussi ostensiblement. Cependant, rares sont ceux qui sont au-dessus de leurs affaires, rappelle le PNUD.
L'Union européenne a réduit ses émissions de moins de 1%. Si elle s'en tient à ses politiques actuelles, elle ne fera pas beaucoup mieux, alors que son objectif est de 8%, note le rapport. Quant au Japon, il s'achemine vers un écart d'environ 14% par rapport à ses objectifs.
Les habitants des régions les plus pauvres contribuent moins au réchauffement, mais ils sont les plus exposés à ses contrecoups. Ceux-ci pourraient même effacer les acquis du développement, affirme le PNUD.
Mais il ne faut pas s'illusionner. Les nations industrialisées ont beau être sensibles aux difficultés des pays moins favorisés, et avoir investi des milliards pour les aider à se développer, ça ne suffira pas à les convaincre de changer leurs habitudes.
Car pour l'instant, presque tout le monde trouve plus nuisible qu'avantageux de réduire les émissions. C'est ce qui explique que le gouvernement Harper soit si réticent à baliser l'exploitation des sables bitumineux, mais aussi que l'Europe ait repoussé ses objectifs de réduction pour les automobiles. Et c'est pour la même raison que l'Inde a violemment rejeté le scénario du PNUD suggérant aux pays en voie de développement de réduire leurs émissions de 20% d'ici 2050.
On a souvent décrit la lutte contre les changements climatiques comme le plus grand défi auquel l'humanité ait été confrontée. Toutefois, il faut bien se rendre compte que l'enjeu n'est pas technique, ni même moral. Le vrai défi, c'est de revoir notre mode de fonctionnement, c'est-à-dire d'agir en fonction d'un risque anticipé plutôt que d'une réalité immédiate. Une logique de conservation avec laquelle l'humanité n'a, somme toute, qu'une expérience limitée.
Les pays riches, malgré tout ce qu'on peut leur reprocher, ont un certain vécu dans ce domaine. Après avoir été forcés d'améliorer leurs méthodes de production pour préserver certaines ressources, comme l'eau et la forêt, ils sont aujourd'hui en mesure de témoigner des bénéfices.
C'est là-dessus qu'ils doivent s'appuyer pour jouer leur rôle de leaders dans les négociations avec les nouveaux pollueurs, comme la Chine et l'Inde. Mais pour ça, il faut aussi qu'ils s'attaquent à leurs propres émissions.
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