Dans un excès de nostalgie des grands hommes, du moins de ceux qui marquèrent à jamais l'histoire de notre nation, je regardais hier le documentaire Chartrand, le malcommode de Manuel Foglia. Un moment, il a ces mots qui résonnèrent dans ma tête : «l'indépendance c'est ben beau, mais y'a un paquet de pays qui ont leur indépendance pi qui sont dominés économiquement comme le Canada est un satellite des États-Unis».
Je veux dire à quoi bon faire du Québec un pays si c'est pour n'avoir de liberté que l'illusion de notre auto-détermination? Comme je l'ai dit dans un autre article, il n'y a que la nation comme structure valable de protection des peuples contre la loi du marché mondialisé qui peut être défendue. Dans cette optique, on peut se demander quelles sont les conditions de possibilité d'une nation souveraine. Je ferai ici intervenir la notion de droit régalien.
Historiquement, le droit régalien est ce qui désigne l'ensemble des pouvoirs qui fondent l'indépendance d'un État. À mon sens, la maîtrise de ces pouvoirs est, pour le Québec, une condition nécessaire d'accession à sa véritable liberté.
Le droit de légiférer
L'État doit pouvoir faire ses lois lui-même, par lui-même et pour lui-même. Rien ne doit lui être imposé à moins qu'il n'y ait précédemment consenti.
Le droit de paix ou de guerre
Un Québec souverain doit pouvoir décider librement de sa participation ou de sa non-intervention dans un conflit armé. Bien entendu, de là découle son droit légitime de lever une armée.
Le droit de douane
L'État doit pouvoir maîtriser ses frontières. C'est-à-dire que la libre circulation des marchandises, des capitaux et des hommes ne peut exister que s'il le permet seulement.
Le droit de battre monnaie
L'État doit pouvoir contrôler l'argent. C'est le point central. Un Québec indépendant soumit aux politiques monétaires de la Banque centrale canadienne (avec à sa tête d'anciens cadres de chez Goldman Sach...) ou à d'autres formes de domination monétaire, comme celle de l'Union européenne et de sa monnaie unique par exemple, ne saurait jamais être libre.
Évidemment, il ne s'agit pas de donner au gouvernement le pouvoir absolu, bien au contraire il s'agit de poser les conditions de possibilité de notre liberté en tant que peuple. Il revient à nous de décider ensuite quelle forme de pouvoir voulons-nous pour assurer le respect et l'application de ces droits (république, démocratie directe, etc.).
Est-ce que ces droits nous assurent de ne pas subir la domination économique dénoncée par Michel Chartrand ? Certainement pas! Mais sans eux, je crois que nous sommes condamnés structurellement, indépendants ou non, à la subir.
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8 commentaires
Archives de Vigile Répondre
15 décembre 2014J'adore ton argument sur la souveraineté! Je suis complètement du même point de vue, j'étais justement en train d'écrire quelque chose de semblable dans mon texte. Merci de l'inspiration :)
"Chartrand, le malcommode" c'est bon! Patrice Bouchard nous l'a fait écouter l'an passé!
:)
François Ricard Répondre
25 novembre 2014Si nous nous donnons enfin un pays, il faut que ce pays est une forme, une constitution.
Une constitution républicaine où le peuple est véritablement souverain.
Sinon, qu'aurons nous? Un dictateur? Pour combien de temps?
Un semblant de démocratie comme maintenant?
D'ailleurs c'est une question qui nous vient souvent quand on fait du porte porte'"Il aura l'air de quoi, votre pays?"
Chrystian Lauzon Répondre
25 novembre 2014M. Jean-Jacques Durocher,
Il me semble que vous vous soyez trompé d’article pour porter un tel commentaire, totalement contredit par la vidéo 40 de M. Jean-Jacques Nantel ( Voici la preuve que les Québécois sont des couillons!), que je vous invite à visualiser d'abord, puis à commenter… avec une bibliographie aussi fournie et détaillée que la sienne.
Pour « faire » l’indépendance, non plus théoriser sur elle, par une constituante (comme vous le souhaitiez en 1999, la désirez-vous toujours?) ou autrement, il faut d’abord s’appuyer bien les pieds et la tête sur Notre terre natale géopolitiquement. Puis, non plus subir une constitution « fantôme » comme une hantise discursive biaisée provenant de l’étranger fédéraliste de l’Ouest, mais créer des rapports de force « systématiquement », dossier par dossier, ressource par ressource vers une conscience nationale convaincante sur tous les plans.
Enfin, ne transgressez-vous pas la première règle et Loi à la base de la liberté d’un peuple, le Vôtre, de se fonder en pays et poser lui-même ses règles propres et ses valeurs (même monétaires): LE DROIT FONDAMENTAL DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION – une règle du Droit international, n’est-ce pas.
Les mots de votre commentaire ressemblent plus à un Canadian Law de faux-papier qu’à un Québec en autodétermination par conscience politique croissante, en vue de sortir d'une république de bananes couillardes, vers « votre » constituante de 99 ou autrement.
Enfin, comme vous le dites, et cela s'applique à vos humains propos aussi sans doute : "En passant, il ne faut pas prendre pour du cash tout ce que l’on dit." Spécialement quand cela provient de l'ENNEMI fédéral. J'ajouterai : il ne faut rien prendre pour "acquis" de fait et de vérité non plus. L'argent n'est qu'une monnaie d'échange, sans valeur en elle-même, pas à prendre pour du "cash" justement : 40 milliards de faillite bullaire organisée par le Haut en Caisse de dépôt volée. Et le Québec, encore debout financièrement malgré ce choc inconcevable, se fait présentement sans cesse saigner par eux, les fédérastes libéraux appauvrisseurs du Québec, plus que jamais au pouvoir absolu, sans gardiens de ces fous.
En effet, OÙ sont les Juges, les Vrais légalistes? pour re-prendre ce fric comme Notre "cash"? Celui de l'État, du peuple dépossédé? Les déposants qui se sont suicidés pour ça (pris au sérieux de leur "cash"), n'ont pas suivi ou compris votre conseil, M. Durocher, âmes trop sensibles sans doute. Et la sacoche de Monique Jérôme-Forget ne s'est pas ouverte à temps pour les consoler, ni les épargner. Elle a fui, tel un Couillard qui fait "fuir" financièrement les bourses d'Hydro-Québec vers l'Ontario et les Desmarais.
Amicalement, d’un patriote à un autre, j’imagine.
Chrystian Lauzon
Archives de Vigile Répondre
24 novembre 2014@M. Durocher:
«Il est généralement accepté en droit international pour les pays ’civilisés’ que le libre passage des marchandises entre état se fait sans droits.»
Si le passage est libre de droit, je doute que les marchandises le soit. Selon l'ASFC:
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L'Agence des services frontaliers du Canada perçoit des droits et des taxes sur les marchandises importées au nom du gouvernement du Canada.
Des droits de douane sont exigibles sur les marchandises importées au Canada. Les taux de droit sont établis par le ministère des Finances du Canada et peuvent varier considérablement selon l'accord commercial conclu avec le pays d'origine.
======
Malgré les accords de libre-échange, il y a encore de nombreuses exceptions qui sont sujets à des droits de douane. Pour les pays avec lesquels nous n'avons pas d'accord, nous sommes parfaitement en droit d'exiger tous les droits de douane que l'on veux.
"Pour ce qui est du Saint-Laurent, il est considéré ’international’, son libre passage est donc obligatoire, y compris pour les navires militaires des pays qui l’utilisent ou de ceux que ces pays reçoivent."
Le St-Laurent n'est-il pas des "eaux intérieures", tel que définit par Wikipédia?
Si c'est le cas, notre souveraineté y serait totale. Ce qui n'exclut pas que l'on puisse avoir des ententes (conventions) avec d'autres pays qui leur en autorise l'accès. Pour ce qui est des navires militaires étrangers, il serait absurde que l'on ne puisse pas règlémenter, voire en interdire l'accès.
Archives de Vigile Répondre
24 novembre 2014Il est généralement accepté en droit international pour les pays 'civilisés' que le libre passage des marchandises entre état se fait sans droits.
Pour ce qui est du Saint-Laurent, il est considéré 'international', son libre passage est donc obligatoire, y compris pour les navires militaires des pays qui l'utilisent ou de ceux que ces pays reçoivent.
Admettre que le Québec doit se servir d'une béquille monétaire n'est pas une 'stratégie gagnante', l'adoption d'une devise secondaire encore moins.
On a trois choix réalistes (le Canada vas dire NON, avec raison):
Notre propre monnaie (mon choix)
Le dollar US
L'Euro
En passant, il ne faut pas prendre pour du cash tout ce que l'on dit. L'adoption du dollar canadien par Monsieur Parizeau étant un exemple frappant... Comme dans frapper sa monaie...
François Fournier Répondre
23 novembre 2014Merci pour vos commentaires constructifs.
Je ne soulevais que des options de régimes pour montrer qu'il n'y a pas de fatalité, on peux chosir.
Democratie dirrect c'est intéressant. Même le tirage au sort à la Étienne chouard peut être envisagée
Danièle Fortin Répondre
22 novembre 2014-
Je suis absolument d'accord sur l'essentiel M. Fournier mais pourquoi présenter la république comme une option ? Quel autre régime le Québec pourrait-il se donner ? La "démocratie directe" peut très bien s'exercer à l'intérieur d'une république comme en Suisse !
Comment expliquer cette frilosité qu'affichent régulièrement les indépendantistes québécois à l'égard du régime républicain ?
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Jean-Claude Michaud Répondre
22 novembre 2014Article intéressant M. Fournier. Battre monnaie québécoise serait une bonne option pour être vraiment indépendant économiquement. On pourrait peut-être utiliser le dollar canadien au début et ensuite faire une transition vers notre propre monnaie une fois assurée la crédibilité financière d'un nouvel État souverain du Québec.
Sur le droit de douane, j'ajouterais aussi comme le dit souvent ici monsieur Nantel, un péage pour les bateaux qui passent sous nos ponts et un péage des camions qui viennent du reste du Canada et usent nos routes.