Libre-Opinion: Il y a quelques jours, le gouvernement de Stephen Harper a sollicité l'avis de la population sur l'approche à adopter pour régler le déséquilibre fiscal qui affecte le Québec et les provinces. Seulement voilà, pour stimuler la réflexion des citoyens, les conservateurs ont énoncé des principes pieux qui n'ont rien à voir avec le coeur du déséquilibre fiscal, à savoir l'inadéquation qui existe entre les ressources financières du fédéral et les responsabilités qui sont les siennes en vertu de la Constitution.
L'avis de la population sur la reddition de comptes et la clarification des rôles et responsabilités de chaque ordre de gouvernement, la transparence budgétaire, la prévisibilité, l'intégration du commerce interprovincial et la collaboration entre les gouvernements ne permettra pas au gouvernement Harper de régler le déséquilibre fiscal.
Pour y parvenir, les conservateurs doivent cesser d'éviter le véritable débat. Ils doivent reconnaître que le déséquilibre fiscal est un déséquilibre budgétaire qui mène à des déséquilibres politiques et sociaux. En effet, alors qu'Ottawa multiplie les intrusions avec ses milliards de dollars de marge de manoeuvre, le gouvernement du Québec ne dispose pas des ressources fiscales autonomes pour mettre en oeuvre nos choix. Pendant ce temps, les intrusions n'améliorent en rien les services à la population et le tissu social se dégrade.
Bien estimer
Alors que le Québec est confronté à un manque à gagner annuel qui varie entre 3,9 et 4,5 milliards, les surplus fédéraux de 2005-06 sont estimés à 12 milliards. Et ce n'est pas en dépensant ces surplus que Stephen Harper va honorer sa promesse électorale.
Le gouvernement Harper veut assurer la transparence budgétaire ? Qu'il commence donc à cesser de sous-estimer de façon quasi indécente les véritables revenus du gouvernement fédéral. Le Bloc québécois demande depuis plusieurs années la mise en place d'un comité de prévision des finances. Si les conservateurs ont été en mesure d'acheter pour plusieurs milliards de matériel militaire, c'est justement en raison de la marge de manoeuvre que le déséquilibre fiscal procure au fédéral.
Au lieu de plastronner avec ses principes, le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, devrait soumettre à la population un véritable plan visant à corriger le déséquilibre fiscal, tel que celui du Bloc québécois, qui reprend les demandes du gouvernement québécois.
Nous estimons qu'il faut d'abord s'attaquer aux pressions financières subies par le Québec : relever les transferts pour l'éducation postsecondaire, les programmes sociaux et la santé de 1,7 milliard et bonifier la péréquation. Un calcul de la péréquation basé sur la règle des dix provinces, comprenant tous leurs revenus, notamment ceux du pétrole, représente une hausse des revenus de 2,1 à 2,8 milliards pour le Québec.
Il faut ensuite revoir le partage de l'assiette fiscale. Ottawa énonce le principe de prévisibilité : s'il veut le respecter, il doit permettre au Québec et aux autres provinces d'avoir des revenus prévisibles et non pas de simplement se fier au bon vouloir d'Ottawa quand bon lui semble. Nous sommes loin de la prévisibilité quand le gouvernement Harper annonce qu'il consentirait à partager une partie de ses éventuels surplus, si surplus il y a, nous avertit-il déjà.
Une véritable prévisibilité implique qu'Ottawa se retire de la TPS et cède au gouvernement du Québec ce champ de taxation, de même qu'une partie de l'impôt fédéral sur le revenu des particuliers, à hauteur des transferts fédéraux rehaussés, soit 8,8 milliards.
Finalement, Ottawa doit mettre fin au pouvoir de dépenser qu'il s'est octroyé au fil des ans. Ces propositions rejoignent les recommandations du rapport Séguin.
C'est seulement ainsi que le gouvernement conservateur pourra corriger le déséquilibre fiscal comme il s'y est engagé lors de la dernière campagne électorale.
Yvan Loubier
_ Député de Saint-Hyacinthe-Bagot et porte-parole du Bloc québécois en matière de finances
Déséquilibre fiscal : appel aux citoyens
Déséquilibre fiscal
Yvan Loubier15 articles
L'auteur est économiste et conseiller principal au cabinet de relations publiques National, à Québec.
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