Lise Millette - Le débat sur l'interdiction de la burqa a été relancé une fois de plus. Des pressions s'exercent pour que le Canada enjoigne le pas à la France sur la voie du bannissement du voile intégral.
Au cours des derniers jours, le chef libéral Michael Ignatieff s'est inscrit en faux contre la détermination de la France. Il estime que la Canada ne doit pas suivre le courant et tenter de bannir le port de la burqa.
Cette déclaration a fait sursauter l'auteure du livre «Ma vie à contre-Coran». Djemila Benhabib, qui a vécu une vingtaine d'années dans un pays musulman, estime que le port de la burqa n'a rien à voir avec la religion.
«J'ai vécu 20 ans dans un pays musulman et je n'ai jamais vu, en Algérie, des musulmans s'habiller de cette façon. Ce vêtement n'est pas greffé dans l'Islam», a maintenu Djemila Benhabib.
D'un ton assuré, elle a affirmé ne pas comprendre et ne trouver aucun motif pour justifier le port de la burqa, ni la croyance, ni la tradition, ni la culture. Ce signe, elle le perçoit d'abord comme un geste politique.
La prise de position du chef libéral faisait écho à une demande du Congrès musulman canadien (CMC) qui considère que la notion du multiculturalisme telle que véhiculée au Canada devrait être mieux encadrée pour éviter d'accommoder les glissements des courants religieux extrémistes.
Cette idée est reprise par Mme Benhabib qui estime qu'il faut lutter contre l'intégrisme. L'auteure considère qu'au XXIe siècle les femmes n'ont aucune raison de s'effacer et de cacher leur identité pour marcher dans la rue.
«Les politiciens canadiens sousestiment le danger de l'intégrisme musulman et qu'ils n'y portent pas toute l'attention qu'ils devraient. Les démocraties respectent la liberté de conscience issue des luttes collectives. La burqa n'est pas liée à la liberté de croire ou de ne pas croire», a ajouté Mme Benhabib.
Au cours des derniers jours, le chef libéral a énoncé qu'il croyait «profondément dans la liberté de la religion et la liberté de la croyance». Il a fait état du nécessaire respect des choix, tout en attribuant à la société un rôle qui permet aux femmes d'être appuyées, si elles désirent échapper à l'emprise de leur foi.
Ces propos, aussi nuancés que possible, n'apaisent pas Djemila Benhabib. Elle dit souscrire à cette liberté, mais avoue préférer à la liberté religieuse la liberté de conscience. Elle insiste, la burqa est réductrice tant pour l'homme que pour la femme. Le premier étant relégué à un statut d'éternel prédateur et la seconde perçue comme éternelle tentatrice.
«C'est une question qui regarde tout le monde et qui touche à la dignité des hommes et des femmes. Nous devons nous débarrasser de ce schéma stérile, infantilisant et animal», insiste-t-elle.
En France, le sort de la burqa n'en est pas encore jeté. Le premier ministre François Fillon a demandé au Conseil d'État d'étudier les possibles solutions juridiques qui lui permettrait d'interdire ce voile dans les services publics et les lieux d'accueil du public.
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