Dans son article paru le samedi 1er août dans Le Devoir (« La médecine familiale dans la spirale du privé »), la journaliste Jessica Nadeau expliquait comment le privé étend ses tentacules dans notre système de santé. La situation n’est pas nouvelle, il s’agit d’un phénomène qui, avec ou sans loi 20, ne cesse de gagner en ampleur au Québec depuis de nombreuses années.
Au-delà de l’état des lieux, ce qui doit retenir l’attention et interpeller de manière urgente la population, c’est le constat établi par des experts autant dans le privé que dans le public : les acteurs du milieu ont cette impression partagée que Québec à un « plan non dit », soit celui de rendre la médecine de première ligne payante en procédant « à petit feu, sans trop le dire ».
Il s’agit là d’une rupture de contrat fondamentale. Le propre des régimes démocratiques modernes est de reposer sur ce que l’on peut qualifier de « contrat social ». Il ne s’agit bien évidemment pas d’un réel contrat écrit et aucune signature n’est apposée au bas du document. Néanmoins, notre société s’appuie bel et bien sur un contrat collectif. Il s’agit d’une entente sur les quelques valeurs et certaines orientations qui définissent une société. Le contrat social est ce qui permet à une collectivité d’établir un sens au vivre ensemble.
Dérive autoritaire
Or, en agissant effectivement de manière à ce que la médecine généraliste devienne privée, le gouvernement libéral procède à une dérive autoritaire. Un tel changement ne peut s’effectuer sans de larges consultations de la population. D’autant plus qu’il n’y a aucune raison valable pour privatiser ainsi un nouveau domaine de la santé (après la dentisterie dans les années 1980, comme nous le rappelle l’article).
Nous assistons au dépérissement du service public en faveur du marché. Nos gouvernements serviles des nouveaux maîtres du monde vont avec les courants dominants. Le citoyen cède le pas au consommateur, le patient au client. Jamais l’actuel gouvernement n’a reçu un mandat pour procéder à une privatisation, même partielle, de notre système de santé.
C’est en procédant ainsi que l’on accentue le cynisme et le désintérêt pour la chose politique. Les citoyens se retrouvent dans des systèmes politiques où ils sont de moins en moins consultés et où on leur dit que, de toute façon, « nous n’avons pas le choix » : ce sont les règles du marché qui doivent prévaloir. Un sursaut démocratique devra advenir si nous ne voulons pas perdre davantage nos services sociaux qui sont pourtant inscrits en lettres d’or dans notre contrat social que d’aucuns se proposent de biffer au nom de leur profit personnel.
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