Quelques cas représentifs rencontrés, des succès, des échecs

Des gens venus d'ailleurs qui tentent de s'intégrer à notre société

La rencontre concrète avec l'autre ouvre les yeux sur la nature humaine

Tribune libre


Au risque de blesser ma modestie naturelle, qu'il soit dit qu'on m'a honoré à deux reprises pour mon inlassable travail de bénévolat et d'implication sociale au sein de la communauté québécoise. Une première médaille me fut remise par Son Excellence la Gouverneur Générale du Canada, la seconde par la ministre actuelle de la Solidarité sociale, Mme Agnès Maltais, lors de cérémonies officielles.

Voyez-vous, l'amour de son peuple passe par l'action concrète, par l'implication sociale, par le don de soi. C'est le poète Pierre Reverdy qui affirmait : « il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour ». Autrement dit, l'amour ce n'est pas qu'un état exaltant et enivrant, ce ne sont pas que des mots, ça se démontre surtout par des actes accomplis par dévouement, par un engagement dans la durée, par du temps précieux consacré au bien-être de l'autre. Et c'est peut-être ce qui compte le plus en bout de ligne. L'amour du prochain, l'esprit de sacrifice sont des vertus à développer, voire à remettre au goût du jour en ces temps matérialistes et hédonistes.

Mon milieu d'implication communautaire actuel est formé d'un groupe d'une soixantaine d'hommes de 20 à 60 ans qu'on pourrait dire en processus de réinsertion sociale. Étant une bonne oreille et empathique par nature, il s'avère que je suis l'intervenant préféré de tout le groupe, le premier à qui viennent se confier ceux qui en ressentent le besoin. Cela me permet ainsi de connaître le caractère et les motivations de chacun.

Parmi eux, il y en a un certain nombre qui sont venus d'ailleurs. Ce contact direct ne trompe pas et permet d'évaluer les capacités d'intégration de chacun. Mais force est de constater que cela varie beaucoup d'un cas à l'autre. J'aimerais vous en présenter quelques-uns, avec des prénoms fictifs.

– Abdulah est Tunisien. C'est un travailleur infatiguable que tous apprécient, petit, mince et d'un naturel sérieux. Il a été accepté ici sur la base de la connaissance du français, mais en réalité il ne le comprend pas vraiment. On doit tout lui montrer par gestes et il fait pareil. Il apprend très vite et donne entière satisfaction. Il s'amuse à dire tab... comme les autres, sans vraiment savoir ce que ça signifie. Il m'a pris en affection, car j'ai été le premier à lui parler et à l'accueillir humainement. Seul bémol, sa femme ne peut sortir seule de la maison lorsqu'il est au travail... Mais tope-la Abdulah pour l'effort!

– Jerry est anglophone né à Québec (1% de la population). Il est parfaitement intégré à son milieu où il a toujours vécu. Calme, affable et blagueur, seul son léger accent un peu cassé révèle ses origines. Je ne l'ai jamais entendu parler en anglais et cela ne semble pas le déranger le moins du monde. Tope-la Jerry!

– Nick est né au Rwanda mais a été adopté bébé lors du génocide. Tout le monde le considère comme Québécois, il parle comme tout le monde. Malgré cela, il s'identifie au monde du rap, s'habille dans le style, et arrive parfois dans un état « enfumé ». Mais il est attachant, pratiquant l'auto-dérision sur ses faiblesses. Tope-la Nick!

– Didier est français et possède un casier judiciaire. Il fait son possible pour bien s'entendre avec les autres mais on sent qu'il peut se fâcher pour un rien et chacun garde un peu ses distances. On a l'impression qu'il s'est réfugié au Québec par réflexe de survie, pour fuir, et non par désir profond de s'amalgamer.

– Ahmed 1, 2 et 3 sont africains du même pays, venus à 3 moments différents. Ils s'exprimaient très bien en français. Mais de l'avis général, ils étaient tous traîne-la-patte et devaient être continuellement stimulés à travailler, s'arrêtant dès que le responsable avait le dos tourné. Un Québécois, Reynald, qui a du cœur au ventre au travail, excédé de les voir le regarder travailler, déclara de découragement : « je n'avais jamais été raciste de ma vie, mais à les voir aller, je suis en train de le devenir ».

– Elvir est arrivé de Bosnie avec sa famille à l'âge de 8 ans. Rendu à 20 ans, rien ne le distingue apparemment des autres garçons de son âge. Sauf qu'il est excessif, décrocheur, boit sa paye ou se drogue, va aux danseuses, se bataille, a le crâne rasé à la skinhead, et défie les figures d'autorité. On peut mettre sans doute tout ça sur le compte de son enfance perturbée par la guerre. Mais si on sait le prendre du bon bord, on constate qu'il est réchapable, s'il pouvait seulement développer une relation d'identification fils-père satisfaisante avec un adulte responsable. Tope-la Elvir!

– Colin est un colosse français qui a un faible pour la dive bouteille. Il empeste toujours l'alcool à 2 mètres. Il trime dur et ne se plaint jamais. Tout le monde le veut dans son équipe. Il entend à rire et est intarissable sur sa passion des jeux vidéos et des vins. Tope-la Fabrice!

– Stéphane est un jeune orphelin venu de Roumanie qui a grandi ici balloté d'un centre d'accueil à l'autre. Il a le regard fuyant lorsqu'on lui parle, essaie d'en faire le moins possible et chipe tout ce qui lui passe sous la main. En lui confiant certaines responsabilités valorisantes, son comportement s'est grandement amélioré et cela augure bien à long-terme. Tope-la Stéphane!

- Thierry, français d'origine, est établi au Québec depuis 25 ans et s'est parfaitement intégré. Vocabulaire québécois, intérêts identiques à ceux de tout le monde, jamais de références du genre "chez nous, on fait comme ceci". Un modèle à suivre. Tope-la Thierry!


La différence que je perçois entre les uns et les autres sur le plan des chances d'intégration est que certains acceptent de bon gré les règles de vie en usage ici et ne demandent pas mieux que de devenir et de faire comme tout le monde, alors que d'autres semblent réticents à s'amalgamer aux autres, comme si l'ensemble de nos modalités de fonctionnement social, d'échanges, de rapports humains, ne leur convenaient pas, ne rimaient à rien pour eux, ou leur semblaient incompréhensibles, indéchiffrables, impossibles à décoder correctement.

Pour que le Québec conserve son identité distincte, il est de toute première importance de bien évaluer les chances d'intégration des candidats qui se présentent en grand nombre à nos portes, autant pour leur bien que pour le nôtre. La capacité d'adaptation de tout individu a ses limites, la chose n'est pas à démontrer.
Ajoutons à cela qu'une mentalité ne change guère plus une fois l'âge adulte atteint, et on doit en tenir compte lors des évaluations d'entrée. Les chances de succès sont clairement augmentées en fonction du nombre de points communs, des affinités avec notre société à la base. Plus les deux mondes sont éloignés, plus les risques d'échec dus au choc des cultures et à l'incompatibilité foncière sont à prévoir. Il s'avèrera donc plus sage de ne pas créer des conditions qui nuiront tôt ou tard à l'harmonie sociale.
Réjean Labrie, de Québec

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Réjean Labrie est natif de Québec. Il a fait une partie de sa carrière dans la fonction publique provinciale.

Il tire la plus grande fierté d’être un enraciné de la 11ème génération en sol natal. Son élan nationaliste se porte sur la valorisation de la culture québécoise et sur la préservation de l'identité culturelle québécoise et de sa démographie historique.

Il se considère comme un simple citoyen libre-penseur sans ligne de parti à suivre ni carcan idéologique dont il se méfie comme des beaux parleurs de la bien-pensance officielle.

L'auteur se donne pour mission de pourfendre les tenants de la pensée unique, du politiquement correct, de la bien-pensance vertueuse, toutes ces petites cliques élitistes qui méprisent le bon peuple.

Près de 900 articles publiés en ligne ont été lus un million et demi de fois par tous ceux qui ont voulu partager une réflexion s'étendant sur une période dépassant 15 ans. À preuve que l'intérêt pour une identité nationale québécoise affirmée ne se dément pas, quoi qu'on en dise.





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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    19 février 2013

    Dernier papier de Mme Porter ,dans le journal LE DEVOIR, sur la problématique de l'arrivée de réfugiés Népalais à Québec:
    "Depuis 2009, Québec est la ville qui a accueilli le plus gros contingent de réfugiés népalais au Canada, soit plus de 1000 personnes. Malgré leur volonté de réussir, ces réfugiés éprouvent des difficultés d’adaptation majeures."
    http://www.ledevoir.com/politique/ville-de-quebec/371240/nepalais-3
    Article malheureusement verrouillé.

  • Archives de Vigile Répondre

    18 février 2013

    Pour ma part, je me suis impliqué, bénévolement, pendant quelque 6 ans, dans l’accueil de nombreux réfugiés Colombiens chez nous. J’ai tendance à dire que la majorité de ces gens-là sont bien intégrés et bien adaptés.
    Bien sûr qu’il y a beaucoup plus d'atomes crochus avec le monde québécois de la part de réfugiés Colombiens qu’avec des réfugiés Bouthanais-Népalais. La journaliste Isabelle Porter, du DEVOIR, a publié une série de 3 articles sur les difficultés d’intégration des récents réfugiés Bouthanais-Népalais à Québec. Son premier article s’intitule:”Quel avenir pour les 1000 Népalais de Québec”.L’article est verrouillé.
    http://www.ledevoir.com/politique/ville-de-quebec/371225/des-refugies-deracines-des-camps
    En résumé l’expérience est pénible d’autant plus qu’un bon nombre de ces Népalais sont analphabètes dans leur propre langue. Et chez les jeunes, qui ont appris l’anglais dans les camps de réfugiés, plusieurs ont pris le bord du ROC parce qu’ils trouvent très difficile d’apprendre le français.