La question peut paraître hallucinante. Pourtant... Les derniers développements laissent songeur. On sait que la famille Desmarais s’implique dans la nomination des chefs du parti Libéral. C’est un parti où on sait quand les intérêts d’en haut ont parlé et, comme militants, on seconde. Faire partie du parti Libéral, c’est admettre que, à titre de “regroupement d’intérêts”, on veut accoucher d’un gouvernement dévoué à des groupes préférentiels. Quand, tout à coup, même les libéraux ultra fédéralistes déclarent qu'ils ne trouvent pas de chef potentiel dans leur zoo, c'est que ça brasse dans la galère fédéraliste.
Eu égard à la proximité idéologique des éditorialistes du journal La Presse avec le propriétaire, on doit s’étonner des propos récemment tenus. Madame Gagnon constate le manque de talents dans les rangs libéraux et le peu de nouvelles têtes chez les jeunes militants. André Pratte admet le peu d’attrait exercé par son parti chez les francophones.
Dans une réponse à Pierre Paquette, madame Gagnon admettait que ledit “fédéralisme renouvelé” n’était pas une option et que les Québécois avaient le choix entre l’indépendance ou le statu quo. Généralement, les cogitations des scribes des pages éditorialistes du journal La Presse sont symptomatiques de ce qui circule ou circulera comme plan d’attaque au sein des troupes.
On peut donc dire d’après ce qu’on a lu, que les troupes prennent acte du désaveu de la population et qu’elles envisagent la défaite dans trois ans. Qu’est-ce à dire? Peut-être en sont-ils venus à souhaiter un troisième référendum comme une planche de salut.
Le parti Libéral n’obtient plus depuis très longtemps que des succès fragmentaires au sein de l’électorat québécois de souche. Il donne à ses candidats vedettes des comtés avec de bonnes assises, une manière détournée de dire que le vote dit ethnique y est en quantité suffisante pour faire passer n’importe quel sbire. Si un événement pouvait provoquer un tassement de l’opinion francophone derrière le statu quo, le tableau changerait totalement pour le parti Libéral.
D’abord, on pourrait s’attendre à ce que le gouvernement québécois signe la Constitution Canadienne sans condition. On pourrait s’attendre à ce que le gouvernement québécois accepte pour seule avenue évolutive des ententes administratives qui n’excèdent en rien toutes les conditions d’appartenance au Canada de la "province". Ce serait le rêve pour le parti Libéral qui a toujours voulu faire admettre à la population du Québec que les possibilités qui étaient consenties par la fédération canadienne constituaient son horizon limite.
Jusqu’à présent, faute de pouvoir se présenter sans fard, les fédéralistes ont toujours gagné les référendums en faisant miroiter un changement statutaire pour le Quebec. Les deux premiers référendums ont eu lieu sans la loi de Stéphane Dion qui promet tout un ordre de répercussions arbitraires à l’irlandaise advenant un “oui” et l’obligation pour les indépendantistes de défendre l’indépendance pure et simple, sans voie intégrative d’aucune sorte, comme la Corée du Nord et la Birmanie pratique leur souveraineté. Face à une telle “clarté”, les fédéralistes auraient bon espoir de défendre le statu quo et de le voir ratifier par l’électorat francophone, donnant à leur option un vernis de légitimité auprès des francophones.
Ce n’est pas que le parti Libéral ait été conduit à se questionner beaucoup sur les immenses réserves que suscitait l’appartenance au Canada tel qu’il est chez les francophones. Il est d’usage chez les Libéraux de répondre systématiquement que notre mise en boîte par le système développera en nous des qualités morales plus fines, une plus grande ouverture d’esprit, des traits dont ils se croient nécessairement pourvus puisqu’ils en font un objet de prédication. Toutefois, le parti Libéral, lequel rallie les mêmes militants autant au niveau fédéral que provincial, veut revenir au temps des années Trudeau quand leur parti s’imposait comme le parti naturel du pouvoir.
Le parti Libéral sait que, pour être légitime, il faut qu’il fasse admettre à l’ensemble du Québec, pas seulement aux immigrants, les règles foncières du pouvoir canadien. Ces règles sont au-dessus de la démocratie québécoise, et c’est à la démocratie québécoise de les justifier et non pas d’essayer de les contrarier. André Pratte du journal La Presse le répète souvent dans ses éditoriaux, contredire les règles canadiennes, c’est “stérile”.
Le premier référendum a mené à l’annexion constitutionnelle du Québec. Le deuxième référendum a mené à une loi qui stipule de façon implicite les préséances du Canada sur la démocratie québécoise et des droits de propriété diffus du Canada sur le Québec. Si, dans un troisième référendum, on pouvait étirer la signification d’un “non” au point d’y voir une acceptation par le Québec de toutes les règles établies par le Canada unilatéralement, ce serait la touche finale au tableau. Aussi est-il bien possible que lors d’un troisième référendum nous voyions pour la première fois des fédéralistes défendre le statu quo dans ce contexte particulier où planent de nouvelles menaces.
En tout cas, madame Gagnon a lancé la serviette dans une chronique où elle désespère de pouvoir voir le parti Libéral gagner dans trois ans. Elle n'a certainement pas lancé la serviette quant à un troisième référendum... monsieur Desmarais et compagnie non plus.
André Savard
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