Derrière Justin Trudeau, le trudeauisme

211af07c373bb571fd91c7ce06a79f63

Avancez en arrière !





Justin Trudeau fascine. Dans les jours qui suivirent son élection à l’automne 2015, il a été coopté par le star-system mondial, à la manière du golden boy de la politique progressiste occidentale. L’homme semble avoir pour lui une légitimité dynastique. Et il a certainement le sens du théâtre. Il comprend spontanément les codes de la communication de notre temps, comme en témoigne sa passion du selfie. À notre époque, ce n’est pas un détail. Et il adhère à l’idéologie diversitaire dominante comme si elle allait de soi, sans même s’imaginer, manifestement, qu’on puisse penser autrement. C’est que cette idéologie se confond avec l’air ambiant et qu’il s’y trouve fort à l’aise. On se souvient de sa fameuse réponse : «parce qu’on est en 2015». C’est ce qu’on pourrait appeler l’argument chronologique. En gros, pour peu qu’on comprenne l’époque dans laquelle nous vivons, nous ne pouvons qu’être d’accord avec lui et s’y rallier dans l’enthousiasme. Ceux qui sont en désaccord avec lui sont présentés comme des retardataires historiques.


Mais il faut aller au-delà de son image léchée pour comprendre de quelle manière Justin Trudeau s’insère dans l’histoire de la politique canadienne. Le phénomène Trudeau, autrement dit, n’est pas qu’un phénomène de communication, mais un phénomène idéologique et politique majeure, qui mérite qu’on y réfléchisse. Certes, il a été porté au pouvoir par une puissante vague anti-Harper. Mais la signification de son élection va peut-être au-delà de ça. On pourrait dire qu’avec lui, l’idéologie canadienne de 1982, fondée sur la sacralisation de la diversité et l’idéologisation du multiculturalisme, se radicalise comme jamais. Trudeau porte une idée certaine du Canada et présente son pays comme le laboratoire de la modernité la plus avancée. Devant la planète entière, il présente le Canada comme un nouveau modèle politique, mieux adapté à la nouvelle époque, et devant tôt ou tard inspirer les autres pays, qui s’y convertiront. C’est ainsi qu’on renouvelle la prétention du Canada à être le meilleur pays du monde. On ajoutera qu’ils sont nombreux à croire à cette vocation canadienne. Nous ne pouvons pas le négliger.


En d’autres mots, il faut se pencher sur le trudeauisme pour comprendre ce qu’il représente. Ce sera l’objet du grand colloque annuel Quelque chose comme un grand peuple, organisé par l’Institut de recherche sur le Québec, auquel je suis associé intimement depuis près d’une décennie maintenant. Le titre du colloque : d’un trudeauisme à l’autre. Comment, du père au fils, de Pierre à Justin, le Canada a-t-il réinventé son identité collective en se dotant de ce qu’on pourrait appeler une idéologie officielle? Car le Canada, comme pays, prétend moins se définir à partir d’une culture commune qu’à partir d’une proposition philosophique inédite : le Canada est un pays-monde. C’est un pays d’une autre nature que les autres. À tout le moins, la fascination autour de Justin Trudeau n’est pas sans lien avec cette prétention. On le voit comme un politicien moins attaché au passé qu’aspiré par l’avenir.


D’un trudeauisme à l’autre, y a-t-il de profonds changement ou avons-nous simplement assisté à l’approfondissement d’une idéologie? Au programme de ce colloque, neuf conférences de grand calibre. Parmi les conférenciers : Guillaume Rousseau, Djemila Benhabib, Paul Journet, Christian Saint-Germain. On s’y intéressera à ce qu’est devenu le régime de 1982 aujourd’hui dans ses nombreuses facettes. De quelle manière la constitution canadienne a-t-elle façonné le Québec et de quelle manière le façonne-t-elle encore? On proposera aussi un premier bilan du gouvernement Trudeau. Enfin, on cherchera à comprendre comment évolue l’identité québécoise dans le cadre canadien contemporain. Toutes ces questions convergent vers une question plus globale : de quoi Justin Trudeau est-il le nom? Du trudeauisme au néotrudeauisme, qu’est-ce que le Canada est devenu? Ceux qui voudraient y assister peuvent s’inscrire ici.




Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé