Khalid A. Al-Falih - Au cours des décennies à venir, la demande énergétique mondiale connaîtra une énorme croissance. L'Agence internationale de l'énergie prévoit une augmentation d'environ 40?% d'ici 2030, ce qui porterait la demande à l'équivalent de 17 milliards de tonnes de pétrole.
Deux principales tendances sont à la base de cette croissance. La première est démographique?: d'ici le milieu du XXIe siècle, il y aura sur notre planète environ deux milliards d'humains de plus qu'aujourd'hui... et chacun d'entre eux sera un consommateur d'énergie dont les besoins devront être satisfaits. La deuxième tendance est la hausse du niveau de vie des gens habitant dans les pays en voie de développement. De nos jours, un être humain sur trois a un accès direct aux formes modernes d'énergie pour réchauffer, refroidir et éclairer sa maison. Un tiers de l'humanité n'y a pas du tout accès, tandis qu'un dernier tiers n'y a qu'un accès limité. Au fur et à mesure que le niveau de vie des gens augmente et qu'ils sont de plus en plus nombreux à réussir à sortir de la misère noire, leurs modes de vie deviennent plus énergivores.
Ces tendances ne changeront pas au cours des prochaines décennies, et notre capacité collective à les influencer semble limitée, dans le meilleur des cas. Il nous faudra donc répondre à cette croissance de la demande énergétique de la façon la plus responsable possible.
Nous allons continuer à dépendre des combustibles fossiles traditionnels pour la majeure partie de nos besoins en énergie au cours des prochaines décennies, alors que ces sources d'énergie - à savoir le charbon, le pétrole et le gaz naturel - fourniront 80?% de la consommation d'énergie. Si la part des combustibles fossiles peut diminuer avec le temps, la quantité absolue d'énergie provenant de ces sources continuera à augmenter à cause de la hausse importante de la demande énergétique totale.
Parallèlement, il est important que l'offre d'énergie provenant de sources non conventionnelles augmente afin que celles-ci puissent aussi faire leur part et répondre à la hausse de la demande. Nous devrions assurément encourager à la fois le développement de sources d'énergie renouvelable et celui de technologies moins énergivores. Mais il faut aussi reconnaître que cela risque de prendre du temps et de se faire de façon inégale à cause de différentes questions d'ordre technologique, économique, environnemental, ainsi que de problèmes liés à l'infrastructure et au consentement des consommateurs, et aussi parce que l'utilisation à grande échelle de ces sources d'énergie demeure un défi de taille.
Les biocarburants offrent désormais une perspective moins intéressante à cause de l'augmentation du prix des aliments, de la quantité d'émissions de CO2 qu'ils produisent et des problèmes éthiques liés à l'utilisation de terres, d'eau et d'énergie pour faire pousser des plantes qui serviront de carburants plutôt que de nourriture. À cause de leur coût élevé et de leur nature intermittente, le vent et le soleil sont des sources d'énergie qui doivent faire partie d'un système plus large et stable fondé sur des sources traditionnelles d'énergie. Quand il est question d'énergie nucléaire, on retrouve toujours des préoccupations concernant la sécurité des centrales et le traitement des combustibles usés. Dans le domaine des voitures hybrides rechargeables et des voitures électriques, il reste encore à régler des problèmes liés au temps de rechargement, aux distances qui peuvent être parcourues, au prix initial du véhicule ainsi qu'au besoin d'utiliser de l'électricité provenant de sources renouvelables et acceptables sur le plan environnemental.
Il y a aujourd'hui environ un milliard de véhicules à moteur sur les routes. Lorsque les sources d'énergie renouvelable deviendront réellement utilisables, il faudra encore longtemps pour remplacer toutes les voitures actuelles. Et pour tous les véhicules plus lourds, comme les autobus, les camions, les trains, les avions et les bateaux, il n'existe aucune perspective de ce genre à l'horizon.
Pendant que l'on cherche de nouvelles solutions, il faut continuer à investir pour améliorer l'accès aux hydrocarbures et améliorer leur performance, étant donné leur rôle prédominant dans un avenir proche.
Les choix que nous devrons faire en matière d'énergie peuvent paraître décourageants, mais ils peuvent être bien faits si on adopte une approche pragmatique et réaliste.
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Khalid A. Al-Falih
Président-directeur général de Saudi Aramco, l'auteur est un des conférenciers au Congrès mondial de l'énergie qui se déroule à Montréal cette semaine.
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