Après deux décennies d’aggravation des guerres, de perturbations climatiques et de dictature des marchés, il y a plus de vacarme que jamais dans la furie du monde. Il suffit de prononcer « Trump » pour qu’aux multiples motifs d’indignation s’ajoute maintenant le vertige des menaces. La démocratie, la paix, le climat — tout est en jeu.
Dans ce capharnaüm, les ennuis du Québec paraissent bien modestes. Pourtant, les désordres sociaux et économiques qui ont conduit aux bouleversements d’ailleurs sont aussi à l’oeuvre ici, à notre petite échelle.
Sous un calme apparent, de profonds malaises affectent notre société. Mais avant de les aborder, une évidence s’impose : le monopole prolongé du pouvoir par le PLQ exerce un blocage qui accentue ces malaises. Rarement avons-nous eu une telle impression d’enlisement dans l’histoire contemporaine du Québec.
Nous avons récemment décrit le chantier de réflexion que Québec solidaire a mis en branle pour un renouveau politique, dans le but d’examiner quelles sont les convergences sociales et politiques nécessaires pour sortir du blocage néolibéral.
La tâche peut apparaître ardue et les vents contraires, pour reprendre les termes de présentation du livre que vient de publier le mouvement Faut qu’on se parle ! Mais au terme d’une consultation populaire sans précédent, ce collectif de rêveuses et rêveurs pragmatiques pose un regard lucide qui n’obstrue pas l’élan généreux d’espoir qui vient d’en bas.
Commençons à réfléchir ensemble, puisqu’on nous invite à marcher pour trouver les chemins d’un véritable renouveau politique.
Privilège des riches
D’abord, il nous faut constater que le Québec n’est pas épargné par tout ce qui a fait le lit de Trump et de l’extrême droite ailleurs dans le monde. Depuis au moins deux décennies, du « déficit zéro » de Lucien Bouchard à la « rigueur budgétaire » de Philippe Couillard, le pouvoir public a plutôt servi à maintenir les tares de notre système et à en accentuer les injustices pour protéger le privilège des riches.
La corruption des élites, la soumission des politiciens aux forces économiques, la mondialisation se manifestent de diverses façons dans notre quotidien. L’État perd de sa souveraineté. L’austérité s’installe à demeure et nos services sont peu à peu démembrés. Les inégalités augmentent et les règles confuses du vivre-ensemble alimentent l’intolérance et le racisme qui prennent aujourd’hui la couleur de l’islamophobie. La quête d’égalité des femmes stagne, l’école publique est malmenée, le français recule et la culture est oubliée par les pouvoirs publics. Notre économie se comporte en climatosceptique et s’enfonce dans l’énergie fossile. Même la démocratie de carte électorale ne vit pas des jours glorieux.
Les solutions ne passent pas toujours par la politique. Mais notre société peut difficilement avancer lorsque l’horizon politique est ainsi bloqué. Or, s’il faut écarter le PLQ du pouvoir, comment faire pour que cela produise un renouveau politique ? Le PLQ a été chassé du pouvoir en 2012, mais qui peut sérieusement prétendre qu’un changement véritable s’est produit ? Il est aujourd’hui aisé de s’en rendre compte : un renouveau est illusoire sans rupture avec le néolibéralisme qui a dicté la conduite des cinq gouvernements qui se sont succédé après la démission de Jacques Parizeau.
On ne peut donc pas se contenter d’un changement de gouvernement. Il ne peut y avoir de renouveau politique sans changer le système économique. Le transformer assez pour qu’une différence se produise dans la vie des gens, dans le sort de notre société, dans le désir qui peut alors en surgir de se donner un pays.
Devant une telle ambition, des stratégies de coulisse et des ententes électorales entre partis politiques ne peuvent constituer une réponse suffisante. L’ambition d’un renouveau politique qui dépasse l’horizon d’une nième gestion de l’austérité, qui débouche sur un projet de société et celui d’un pays, n’est réalisable que si elle est partagée par une vaste convergence des forces sociales progressistes et indépendantistes.
Un appel aux militants
Cette attente placée dans les forces sociales n’est pas irréaliste. Le mouvement social forme un courant majoritairement ancré à gauche et souvent traversé par un fort penchant indépendantiste. Surtout, il est animé par des militants aguerris qui sont interpellés par l’avenir du Québec. C’est à eux que nous nous adressons. La dernière expression d’un tel mouvement est bien Faut qu’on se parle, dont la dynamique combative est suffisamment forte pour donner corps à un puissant courant progressiste et indépendantiste capable de dépasser les partis politiques correspondants.
Ce n’est pas tout. Contrairement à ce que l’issue globale des élections laisse entendre, une lecture attentive des enquêtes d’opinion sur des enjeux majeurs qui permettent d’établir les orientations fondamentales de notre société (impôts, éducation, santé, services sociaux) donne à croire qu’une forte majorité de notre population partage des valeurs progressistes.
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