CO2: un seuil symbolique est franchi

À 400,03 ppm, la concentration de gaz carbonique dans l’air a outrepassé, jeudi, le niveau nécessaire pour parvenir à limiter le réchauffement climatique

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Géopolitique — pétrole et gaz

Au moment où le ministre canadien Joe Oliver complétait sa tournée de promotion des sables bitumineux en Europe, l’Agence américaine océanique et atmosphérique a révélé vendredi que l’air de la planète vient de franchir un seuil historique de concentration de CO2 - un signe incontestable que la Terre se dirige vers des bouleversements climatiques aux conséquences désastreuses pour l’humanité.
Selon ce qui ressort des relevés effectués à l’observatoire Mauna Loa d’Hawaï, la concentration de dioxyde de carbone a atteint 400,03 parties par million (ppm) jeudi. Or, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat est formel : pour parvenir à limiter le réchauffement climatique entre 2 °C et 2,4 °C par rapport à l’ère préindustrielle, il faudrait que la concentration de CO2 plafonne entre 350 et 400 ppm. Les prévisions des scientifiques indiquent toutefois que la concentration de CO2 devrait atteindre 450 ppm d’ici quelques décennies.
De plus en plus d’organisations, dont la Banque mondiale, prédisent que l’inaction internationale nous conduit vers une hausse qui pourrait atteindre 4 °C dès 2060. Une telle situation « déclencherait une cascade de changements cataclysmiques, dont des vagues de chaleur extrême, une chute des stocks alimentaires et une montée du niveau de la mer frappant des centaines de millions de personnes », selon la Banque mondiale.

Responsabilité humaine
Quoiqu’en pensent les climatosceptiques, il semble bel et bien acquis que l’activité humaine est liée à l’augmentation des taux de CO2. Depuis les premières mesures, établies à 316 ppm en 1958, la courbe croît sans cesse. Jusqu’à la révolution industrielle, menant au recours massif aux énergies fossiles, ce taux n’avait pas dépassé les 300 ppm durant au moins 800 000 ans, selon des prélèvements dans la glace polaire.
« La dernière fois que la planète a connu une concentration de plus de 400 ppm de CO2, c’était il y a environ trois millions d’années, quand la température globale était deux à trois degrés plus élevée qu’à l’ère préindustrielle », a souligné Bob Ward, directeur des communications de l’Institut de recherche Grantham sur le changement climatique et l’environnement de la London School of Economics and Political Science, à l’Agence France-Presse (AFP).
« Les calottes polaires étaient plus petites et le niveau des mers était environ 20 mètres plus haut qu’aujourd’hui. Nous sommes en train de créer un climat préhistorique dans lequel notre société va devoir faire face à des risques énormes et potentiellement catastrophiques », a-t-il ajouté.
Selon Michael Mann, spécialiste du climat à l’Université de Penn State, le principal problème est la vitesse avec laquelle les concentrations de CO2 augmentent. « Il n’y a aucun précédent dans l’histoire de la Terre où on a assisté à une augmentation aussi abrupte dans les concentrations de gaz à effet de serre », a-t-il dit à l’AFP. « Il a fallu à la nature des centaines de millions d’années pour modifier les concentrations de CO2 à travers des processus naturels, comme l’enfouissement du carbone. Et nous, nous le déterrons, mais pas sur 100 millions d’années. Nous le déterrons et le brûlons sur une échelle de 100 ans, un million de fois plus vite », a aussi dit M. Mann.
Concrètement, il faudrait s’attaquer au secteur énergétique. Actuellement, environ 60 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le monde sont liées au CO2 de l’énergie. Mais les négociations en vue de parvenir d’ici 2015 à un nouvel accord contraignant de réduction des GES piétinent. Et le gouvernement Harper a tout simplement jeté à la poubelle le protocole de Kyoto.


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