L'élection du jeune Premier ministre libéral canadien, Justin Trudeau, ne cesse de faire des vagues chez le voisin étatsunien. Sa volonté de ne pas acheter, en fin de compte, 60 chasseurs F-35 agace, de même que son positionnement politique à gauche.
Selon Thestar.com, la plupart des journaux américains ont salué l'élection du libéral Justin Trudeau au Canada en «le googlisant pour reluquer les photos de lui torse nu».
Si certains magazines ont tout de même proposé des analyses politiques sur les enjeux et les conséquences de ce changement à la tête de l'exécutif canadien, la plupart des médias américains se sont plutôt régalés en mettant à la Une des images de Justin Trudeau en train de montrer ses muscles. A l'instar de NBC News qui a d'ailleurs titré : «Découvrez Justin Trudeau, le libéral canadien, boxeur, strip-teaseur et...Premier ministre».
© Capture d'écran sur le site TheStar.com
Un «Trudeau bashing» qui prouve surtout que les Américains ne sont pas très sereins de voir leur voisin et grand allié canadien confier les rênes du pouvoir à une nouvelle tête, qui plus est libérale, équivalent du centre-gauche en France.
Première pomme de discorde entre les deux amis, la question des avions de combat F-35. Le Canada de Stephen Harper avait en effet décidé, comme nombre d'alliés des Etats-Unis comme l'Australie ou encore la Grande-Bretagne, d'investir dans ce programme de construction de chasseurs ultra-modernes visant à remplacer dans un avenir très proche la flotte aérienne de ces pays.
Aussi en échange des 150 millions de dollars donnés par Ottawa, les Américains devaient leur vendre à un coût moindre 60 de leurs avions F-35.
Mais les révélations sur les piètres performances du chasseur dont le coût est exorbitant, cumulées aux retards de fabrication, ont fini de convaincre Justin Trudeau de passer commande ailleurs. Durant toute sa campagne, le libéral a donc martelé qu'il annulerait la commande de F-35 et qu'il réinvestirait l'argent ainsi économisé dans la modernisation de la flotte navale canadienne.
Parmi les chasseurs en lice pour remporter le nouvel appel d'offre lancé par Ottawa, on retrouve en pôle position le Rafale de Dassault (France), le Gripen monomoteur fabriqué par Saab (Suède) et l'Eurofighter Typhoon (Grande-Bretagne). Une nouvelle qui a évidemment agacé certains élus américains comme Orrin Hatch, un républicain de l'Utah et bailleur de fonds du programme F-35, qui a vertement tancé : «Ils ont le droit de faire ce qu'ils veulent, mais c'est stupide».
L'autre point de crispation entre les Américains et les Canadiens, mis en exergue par les journaux ces derniers jours, concerne le pipeline géant Keystone XL, dont l'extension suscite de nombreuses controverses. Critiqué par les associations de défense de l'environnement et les riverains expropriés, le projet était défendu bec et ongle par le conservateur Stephen Harper au Canada et les républicains aux Etats-Unis, obligeant même John Kerry, le secrétaire d'Etat américain, à expliquer que l'élection de Justin Trudeau «n'aura aucun impact sur la décision finale que doit prendre Barack Obama concernant Keystone».
Ainsi, cités par TheStar.com, deux experts des relations canado-américaines, Paul Frazer et Scotty Greenwood, un conseiller principal du Canadian American Business Council, ont estimé qu'il était trop tôt pour dire comment la relation va évoluer. «Bien sûr qu'il y aura des changements. Mais nous sommes dans une posture de "Attendons-de-voir-comment-ça-évolue", a déclaré Scotty Greenwood.
Finalement, aux Etats-Unis, les seuls à se réjouir ouvertement de cette victoire de Justin Trudeau sont les forces progressistes. Neil Sroka, porte-parole du mouvement pour la démocratie pour l'Amérique, a déclaré que lui et ses collègues avaient «vraiment applaudi» ce résultat canadien, qu'il considère comme la preuve qu'il existe un décalage vers la gauche, qui se manifeste aussi dans la primaire démocrate.
«Nos voisins du Nord ont non seulement mis fin avec succès au règne de l'équivalent de George W. Bush au Canada [Stephen Harper]. Mais Trudeau a aussi gagné en tirant le parti libéral à gauche. Et je pense que c'est le reflet d'une dynamique qui se passe partout dans le monde», a salué Neil Sroka.
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