Alexandre Cloutier: le temps des séries

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Aussi insipide que du «tofu»





Dans le sport professionnel, le joueur d’impact est celui qui est capable de donner le meilleur de lui-même dans les moments importants.


Marquer le cinquième but dans une victoire de 5 à 0 ou le seul but dans une défaite de 4 à 1 ne démontre absolument rien.


Seul un groupie aveuglé par l’adoration – il y en a toujours dans les partis politiques – trouvera inspirante la campagne menée jus­qu’ici par Alexandre Cloutier.


M. Cloutier semble avoir pensé que sa deuxième place lors de la précédente course, combinée aux limites de ses adversaires, justifiait une campagne qui goûte le tofu.


Pari


La motivation première d’un député, et c’est parfaitement compréhensible, c’est sa réélection.


Les députés du PQ se sont, en majorité, rangés derrière M. Cloutier parce qu’il semblait être le plus payant électoralement. Peut-être, mais c’est très court.


Pour l’essentiel, M. Cloutier reste une énigme et un pari.


Est-il un orateur exceptionnel comme Lucien Bouchard? Non.


Est-il un intellectuel de premier plan comme Jacques Parizeau? Non.


A-t-il le parcours ministériel exceptionnel de Pauline Marois ou de Bernard Landry? Non.


Remarquez, ce n’est pas de sa faute si le PQ est dans l’opposition depuis 2003, sauf pour les 19 mois d’impuissance d’un gouvernement minoritaire.


Les apparences peuvent aussi s’avérer trompeuses. Paul Martin avait l’air d’un premier ministre en attente depuis le jour où il est entré en politique, mais il a terriblement déçu.


Justin Trudeau reste désespérément superficiel, mais il se révèle habi­le et pugnace.


On m’a fait remarquer que l’emballement pour M. Cloutier ressemblait à l’engouement de jadis pour André Boisclair. C’est injuste pour M. Cloutier: André Boisclair avait infiniment plus d’expérience ministérielle, mais il avait aussi des failles qu’il suffisait d’accepter de regarder et qui annonçaient la suite.


Dans les deux cas, il y a cependant ce désir d’une partie des péquistes de donner un coup de jeunesse au parti.


La jeunesse est sans doute la carac­téristique la plus insignifiante en politique.


Voici l’âge qu’avaient les chefs péquis­tes devenus premiers ministres au moment de leur accession à la fonction: René Lévesque, 54 ans, Jacques Parizeau, 64 ans, Lucien Bouchard, 58 ans, Bernard Landry, 64 ans, et Pauline Marois, 63 ans.


Mieux


Évidemment, si le PQ s’imagine qu’il faut s’inspirer du style Justin Trudeau, c’est que ça va encore plus mal que je pensais.


Justin Trudeau n’aspirait qu’à remplacer Stephen Harper. Le PQ, lui, aspi­re à changer de régime politique, ce qui nécessite un chef avec autrement plus de carrure.


En fin de compte, la victoire de M. Cloutier reste très probable, mais elle pourrait fort bien ne comporter aucun élan pour la suite des choses.


Il aura toujours en face de lui un PLQ qui mobilisera, comme dirait M. Parizeau, son «vote ethnique», imper­méable au PQ pour l’essentiel


depuis toujours et pour toujours, une CAQ qui jouera le tout pour le tout, et un Québec solidaire qui, heureusement, ne compte qu’à Montréal.


Le moment est venu pour M. Cloutier de montrer ce qu’il n’a pas encore montré jusqu’ici.




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