Le tribunal correctionnel de Gap a prononcé, jeudi 29 août, des peines de six mois de prison ferme contre trois responsables de Génération identitaire, après les actions antimigrants menées à la frontière franco-italienne par cette association d’extrême droite au printemps 2018. Le tribunal les a également condamnés à verser une amende de 2 000 euros et les a privés de leurs droits civiques, civils et de famille pendant cinq ans. Le mouvement est, lui, condamné à l’amende maximale de 75 000 euros.
Les prévenus étaient poursuivis pénalement pour des « activités exercées dans des conditions de nature à créer dans l’esprit du public une confusion avec l’exercice d’une fonction publique ». Leurs peines coïncident avec les réquisitions du procureur de Gap, Raphaël Balland, qui avait argué que « l’objectif était bien de dire : “Regardez, nous, on peut faire le boulot de l’Etat, surveiller les frontières, faire des enquêtes, appréhender les migrants lors de maraudes…” ».
Dans sa motivation, le tribunal considère que, « compte tenu de la nature extrêmement grave des faits, de l’importance du trouble à l’ordre public occasionné non seulement pendant leur période de commission mais de manière durable dans le département, de l’importance des valeurs protégées par les infractions reprochées et du passé pénal des prévenus », la prison ferme s’impose.
Des trois prévenus, le président de Génération identitaire, Clément Gandelin, le porte-parole, Romain Espino, et l’ex-directeur de la communication de la mairie de Beaucaire (à l’époque Front national), Damien Lefèvre, seul le premier avait assisté au procès. Il avait fait usage de son droit de garder le silence sauf pour dénoncer « un procès qui n’est rien d’autre que politique ».
A la suite de cette décision, Damien Lefèvre, qui se fait appeler Damien Rieu sur Twitter, a annoncé sur le réseau social qu’il allait interjeter appel et a regretté que l’Etat vienne « persécuter les jeunes Français qui osent prouver symboliquement et pacifiquement que défendre nos frontières est possible ». L’avocat des prévenus, Pierre-Vincent Lambert, a confirmé l’appel.
L’Etat a donc décidé de persécuter les jeunes Français qui osent prouver symboliquement et pacifiquement que défend… https://t.co/SSe49jkU7n
Le 21 avril 2018, Génération identitaire avait monté une vaste opération au col de l’Echelle, point de passage de migrants dans les Hautes-Alpes. Une centaine de personnes vêtues de la même doudoune bleue s’étaient mobilisées, avec deux hélicoptères, une banderole géante, et une « frontière symbolique » matérialisée dans la neige par des grillages en plastique.
Pendant deux mois, les militants du mouvement d’extrême droite ont expliqué, à grand renfort de communication sur les réseaux sociaux, « tenir » ou encore « surveiller la frontière », « quadriller le secteur », « patrouiller », « repérer les migrants », « stopper » leur arrivée et même mener un travail de « renseignement » sur les réseaux de passeurs… « Si l’Etat ne les démantèle pas, nous le ferons nous-mêmes », promettaient-ils.
Se mettant en scène dans des maraudes nocturnes filmées, ils enjoignaient les migrants qu’ils croisaient à rebrousser chemin ou les conduisaient auprès de fonctionnaires de police ou de gendarmerie. Cette action avait provoqué la colère des militants qui viennent en aide aux migrants et dont certains ont été poursuivis pour avoir, « par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée irrégulière en France d’étrangers ».