À quoi servent les riches?

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Il y a des mythes vraiment plus tenaces que d’autres. L’un d’entre eux, c’est l’idée que les riches ne paient pas d’impôt ou qu’ils en paient trop peu. C’est pourtant tout à fait faux. Nous sommes en présence d’une authentique légende urbaine.


En fait, les contribuables à revenus élevés paient beaucoup plus d’impôt sur le revenu que les autres, leur fardeau fiscal est significativement plus élevé. Assez pour que cela puisse jouer un rôle important dans le financement de l’État et pour soulager les contribuables moins fortunés.
C’est vrai depuis des lustres. Mais comme c’est un clou qu’il faudra continuer à enfoncer tant que persistera la légende urbaine, les statistiques fiscales les plus récentes, celles de 2005, dont faisait état vendredi mon collègue Michel Girard dans La Presse Affaires, montrent de façon très claire que notre régime fiscal est très progressif. Les comparaisons de la situation québécoise avec celle de l’Ontario et de l’Alberta illustrent par ailleurs de façon limpide en quoi la présence de contribuables plus riches peut constituer un atout.
Au Québec, selon ces statistiques, 2,9% des citoyens peuvent être définis comme riches, en déclarant des revenus qui dépassent 100 000$ par année. Malgré leur petit nombre, ces contribuables déclarent 16,5% de tous les revenus sur lesquels le gouvernement perçoit de l’impôt. Et ils paient 28,9% de tous les impôts. En gros, leur effort fiscal est donc 10 fois plus élevé que celui de la moyenne de la population.
Cela, il ne faut pas le déplorer, bien au contraire. C’est parfaitement normal et éminemment souhaitable. Les gens qui gagnent plus d’argent ont la marge de manœuvre qui leur permet de supporter une ponction fiscale plus lourde, et ils ont les moyens d’aider les autres et de faire profiter la société de leur prospérité. C’est le principe même de la progressivité, qui consiste à demander davantage de ceux qui en ont les moyens pour redistribuer la richesse.
Mais on peut pousser la logique plus loin en se demandant si, collectivement, nous nous porterions encore mieux s’il y avait davantage de contribuables à revenus élevés. Et ma réponse sans équivoque, en comparant le Québec aux provinces plus riches que sont l’Ontario et l’Alberta, c’est oui.
En Ontario, il y a beaucoup plus de contribuables qui déclarent plus de 100 000$ qu’au Québec. Ils représentent 4,9% des contribuables, et concentrent 26,2% des revenus de la province. L’effort fiscal que l’on exige d’eux est un peu moins intense qu’au Québec, mais ils paient, en fin de compte, 43% de tout l’impôt sur le revenu. En gros, la contribution de ces nantis au Trésor public est une fois et demie plus élevée qu’au Québec.
Le phénomène est encore plus marqué en Alberta, où 6,8% des contribuables déclarent plus de 100 000$ par année et où ceux-ci paient 49,7% des impôts, soit pratiquement la moitié.
La présence de ces contribuables plus riches a deux conséquences sur la fiscalité et les finances publiques. Deux impacts collectivement bénéfiques.
Le premier de ces impacts, c’est le fait que la présence en plus grand nombre des contribuables au haut de l’échelle, dont l’apport fiscal est plus significatif, permet aux gouvernements de ces provinces de relâcher la pression sur les citoyens moins fortunés, de moins écraser les classes moyennes. Au Québec, les gens qui déclarent entre 10 000$ et 30 000$, qui ne roulent certainement pas sur l’or, sont quand même assez sollicités par l’État. On leur demande de payer 8,8% de tous les impôts, même s’ils ont du mal à joindre les deux bouts. En Ontario, on les épargne davantage, puisqu’ils n’y paient que 5,1% du total. En Alberta, ce n’est que 4,1%, deux fois moins qu’au Québec.
Les classes moyennes, ceux qui déclarent entre 30 000$ et 50 000$, paient 24,2% des impôts versés au Québec, soit bien plus que la contribution en Ontario, 15,6% et en Alberta, 13,2%. Autrement dit, la présence des riches permet aux autres de respirer.
Le second phénomène est plus global. Parce qu’il y a plus de riches, l’assiette fiscale est plus large, et les gouvernements ne sont pas obligés de presser autant sur le citron pour récolter les fonds dont ils ont besoin. Si les Québécois sont si imposés, ce n’est pas tant parce que leur gouvernement est plus gourmand, que parce que les Québécois sont moins riches.
Conclusion. Il faut arrêter de voir la présence de riches comme un problème. Mais cela ne doit pas pour autant nous détourner de ce qui devrait être notre objectif premier, que les Québécois, dans leur ensemble, puissent voir leur niveau de vie augmenter.


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