À quoi joue la Fed ?

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Économie américaine «Une situation catastrophique»

La presse atlantiste nous sert chaque jour que l’économie américaine se porte on ne peut plus bien, en invoquant par exemple des indices sur la “confiance” des consommateurs. Mais en y regardant de plus près, on constate au contraire que la situation aux États-Unis est catastrophique et ne présage rien de bon après une énième rencontre de la FED à propos de la hausse des taux d’intérêt.



FED et Nippon Ginko : l’échec du Quantitative easing


Après trois Quantitative easings (assouplissements quantitatifs) de la FED, censés relancer l’économie après la crise de 2008, nous constatons que la situation, loin de s’être améliorée, s’est au contraire détériorée. Preuve, s’il en fallait encore une, qu’une création monétaire massive sans support réel dans la production de biens et de services est une calamité. Nous comprenons mieux alors pourquoi les responsables de la Bundesbank ont joué au bras de fer avec la Banque centrale européenne pour faire avorter le projet de Q.E européen[1], sans succès malheureusement.


Nous notons la même situation au Japon où la monnaie nationale, le Yen, ne vaut réellement plus rien ou presque. En effet, alors que le pays a un des taux de natalité les plus bas au monde et que par conséquent la population vieillit, diminuant la proportion de travailleurs, la Banque centrale japonaise n’a cessé d’imprimer massivement des billets via la politique du Q.E. Ce qui fait que la masse monétaire augmente sans réel soutien économique derrière étant donné que la production baisse. Un des indicateurs de la mauvaise santé de l’économie japonaise est que la population est contrainte de puiser dans ses épargnes pour consommer.


La vraie situation aux USA


Au-delà des sondages réalisés sur un échantillon de 500 personnes et dont la presse raffole, nous nous proposons plutôt d’analyser les indicateurs macroéconomiques aux États-Unis. Nous constatons une explosion des emprunts étudiants pour assumer les frais de scolarité exorbitants des universités américaines qui se chiffrent en dizaines de milliers de dollars. Tout en sachant que beaucoup de personnes doivent toujours rembourser leur prêt étudiant plus de 20 ans après la fin de leurs études. Nous pouvons alors craindre l’explosion d’une bulle qui n’en finit plus de gonfler surtout que le nombre d’emplois à pourvoir est en chute et que le nombre de faillites lui est en constante augmentation.


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Indicateurs macroéconomiques aux USA

Source : zerohedge.com


Au même moment, la dette fédérale américaine n’en finit plus d’augmenter et a déjà dépassé les 18.000 milliards de dollars. Notons que la dette s’élève à plus de 110% du PIB, c’est à dire qu’il faudrait plus d’une année d’activité (sans épargne et sans investissement) pour pouvoir la rembourser. Dans ce contexte, le Q.E sert d’écran de fumée afin de masquer la réalité de cette dette et de s’accorder un sursis avant que le dollar ne perde considérablement en valeur. Certains experts comme Laurence Kotlikoff, professeur à l’Université de Boston, estiment que la situation financière de l’Etat fédéral et de surcroit celle de la population américaine est pire que celle en Grèce. Notons également que la dette US s’élève à plus de 58.000 dollars par habitant contre plus de 35.000 dollars en France.


Par ailleurs, le revenu médian des ménages est en baisse constante depuis plus de 7 ans et le nombre de propriétaires s’est quant à lui littéralement effondré. Pas de surprise donc à voir le nombre de timbres alimentaires augmenter dans un contexte de paupérisation de la population. On ne saurait alors savoir d’où vient la toute puissance des États-Unis et leur PIB toujours aussi élevé alors que l’économie réelle est en mauvaise santé. Il faut savoir que la majeure partie des richesses produites par les États-Unis est en réalité fictive et relève de produits financiers ou bancaires. Le pays ayant connu une désindustrialisation féroce au profit des pays asiatiques en général et de la Chine en particulier.


Pas de hausse des taux en vue


Après des battements de tambours et des agitations sur les marchés, la patronne de la Fed a annoncé que la hausse des taux d’intérêt n’était pas pour maintenant [2]. Cette décision est motivée par une situation mitigée en Chine d’après ses dires. En réalité, les nombreuses réunions de la Réserve fédérale à propos de la hausse des taux démontrent que le Q.E est un échec cuisant. Les trois précédents assouplissements n’ont pas permis de redresser l’économie, nous l’avons vu plus haut. La Fed décide donc de conserver ses taux proches de zéro ce qui signifie que la courbe du chômage va aller en augmentant et que les faillites (déjà nombreuses) ne vont faire que s’accentuer.


La conclusion s’impose d’elle-même.


En décidant de ne pas rehausser les taux d’intérêt, la Fed ouvre la voie à un 4ème Quantitative easing. Par la même occasion et étant donné que l’Eurozone se satisfait très bien d’un euro faible qui dope les exportations, on peut également penser que pour soutenir un euro faible la Banque centrale européenne ait recours elle aussi à un 2ème plan d’assouplissement -ou du moins à la prolongation du premier. Or nous l’avons vu avec l’exemple nippon et américain : le Q.E n’a aucune utilité lorsqu’il n’est pas soutenu par l’économie réelle.


On se demande alors : à quoi joue la Fed ?


Abdou Rasmouki


[1] : Begrüßungsrede anlässlich des 18. Kolloquiums des Instituts für bankhistorische Forschung (IBF) Papiergeld – Staatsfinanzierung – Inflation, par Jens Weidman, Deutsche Bundesbank. 18 septembre 2012


[2] : Fed won’t hike interest rates, citing China turmoil, low inflation, par Kevin G. Hall, McClatchy. 18 septembre 2015



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