Wikileaks: Quand Ottawa prédisait une victoire de Marois

Ottawa "prédisait" la victoire de Marois... sans s'en inquiéter. Imaginez aujourd'hui...

En avril 2009 le conseiller aux affaires québécoises du Conseil privé (le ministère du premier ministre Harper) Eric Ferguson, a expliqué à l’officier politique américain à Ottawa ce qui suit:


C'est écrit: Ottawa annonçait ma victoire !
La chef du PQ Marois est bien placée pour gagner la prochaine élection provinciale, car le premier ministre libéral Charest est au pouvoir depuis 2003 — une longue période en politique québécoise — les électeurs voudront donc un changement.
Ferguson a ajouté que Marois pourrait interpréter cette victoire comme un mandat pour promouvoir la souveraineté, mais affirme que pas plus de 30% des Québécois appuient l’indépendance complète.
Ferguson ajoute qu’un référendum est improbable à moyen terme, sauf si le gouvernement fédéral adopte une politique anti-Québec, ce qui est peu probable.

Voilà le genre de pépites d’information que l’on obtient lorsqu’on passe quelques heures à lire les dépêches diplomatiques américaines d’Ottawa, de Québec et de Montréal récemment mises en ligne par Wikileaks. Au sujet du Bloc québécois, on lit aussi ceci:

En coulisses, des députés du Bloc admettent qu’ils sont plus intéressés à obtenir plus d’autonomie et de droits pour le Québec que de diviser le pays, au moins pour le moment. [...] Le député conservateur Steven Blaney insiste pour dire à l’officier politique de l’ambassade que le Bloc n’est plus un parti souverainiste.

Cette longue dépêche, codée Confidentiel, est consacrée au Bloc québécois et est intitulée, en français: Toujours en place – The Bloc quebecois. L’auteur, Terry Breese, prévoit que le Bloc est là pour rester. On ne le critique pas, tout le monde le croyait à l’époque.
Quand Benoit Pelletier était surpris par le succès du “fédéralisme assymétrique”
Une intéressante dépêche du Consulat général de Québec en 2004 rend compte d’une entretien avec l’alors ministre des affaires intergouvernementales Benoit Pelletier, au lendemain de la signature de l’entente fédérale provinciale sur la santé avec le gouvernement fédéral de Paul Martin. Dans le communiqué de l’entente, l’expression “fédéralisme asymétrique” était employée, ce qui a causé un émoi au Canada anglais et la satisfaction des fédéralistes québécois.


Un des architectes de l’entente, écrit la Consule Générale Abigail Friedman,
Pelletier affirme être franchement surpris par toute l’attention que le fédéralisme asymétrique obtient. [...]
Pelletier est clairement content que le concept ait trouvé sa place lors du sommet sur la santé et ait été appuyé par tous les premiers ministres.
Mais il semble maintenant vouloir en réduire l’importance. Il a mis en garde contre la volonté d’appliquer le concept à chaque cas…

On retrouve là Pelletier-le-lucide, sachant que ce communiqué était un cas d’espèce, pas un précédent important.
Les dépêches placées ces temps-ci sur le site de Wikileaks ne bénéficient pas d’un classement de sécurité très élevé. Ces pourquoi on y trouve davantage d’informations sur l’opposition que sur le gouvernement. On suppose que les discussions avec les premiers ministres méritent un niveau de sécurité plus élevé, que Wikileaks n’a pas obtenu. (Ou pas encore…)
Au sujet de Jean Charest on trouve une dépêche qui le présente comme: “intelligent, amusant (witty) et déterminé”. Il sera heureux de l’apprendre.

Squared

Jean-François Lisée297 articles

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Ministre des relations internationales, de la francophonie et du commerce extérieur.

Il fut pendant 5 ans conseiller des premiers ministres québécois Jacques Parizeau et Lucien Bouchard et un des architectes de la stratégie référendaire qui mena le Québec à moins de 1% de la souveraineté en 1995. Il a écrit plusieurs livres sur la politique québécoise, dont Le Tricheur, sur Robert Bourassa et Dans l’œil de l’aigle, sur la politique américaine face au mouvement indépendantiste, qui lui valut la plus haute distinction littéraire canadienne. En 2000, il publiait Sortie de secours – comment échapper au déclin du Québec qui provoqua un important débat sur la situation et l’avenir politique du Québec. Pendant près de 20 ans il fut journaliste, correspondant à Paris et à Washington pour des médias québécois et français.





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