« On veut voir les bandits en prison, pas à la télévision. » C’est ce que répétaient sans cesse Jacques Dupuis et Robert Dutil, tour à tour ministres de la Sécurité publique de Jean Charest, pour s’opposer à la tenue d’une commission d’enquête sur la construction. Pour lutter contre la corruption, disait-on, il fallait s’en remettre aux enquêtes policières. C’est ce qui a mené à la création de l’Unité permanente anticorruption (UPAC). Puis, les temps ont passé. Le gouvernement Charest a été forcé de mandater la commission Charbonneau. Comme pour donner raison aux anciens ministres, celle-ci n’a effectivement pas donné les résultats escomptés, n’adressant aucun blâme dans son rapport final, de toute façon discrédité par la dissidence du sous-commissaire Renaud Lachance. Les libéraux ont fait peu de zèle du suivi de ses recommandations. Du côté de l’UPAC Restait à voir si les choses se passeraient mieux du côté de la voie policière. Sept ans après sa création, il faut admettre que le bilan de l’UPAC a de quoi laisser sceptique. Un dossier du Bureau d’enquête du Journal démontre en fait que des dizaines de municipalités attendent toujours un retour d’appel des limiers. Des perquisitions ont eu lieu. Dans certains cas, des acteurs de la collusion ont reconnu leur responsabilité en consentant volontairement à un remboursement des sommes perçues indûment. Mais du côté de l’UPAC, plus rien. Rien de glorieux Admettons quand même qu’il y a eu quelques succès. On a notamment réussi à écrouer, très brièvement, l’ex-maire de Laval Gilles Vaillancourt. On a enfin porté des accusations concernant l’ancien maire de Terrebonne Jean-Marc Robitaille, mais après un si long délai que même lui s’est dit soulagé de se faire mettre les menottes aux poignets. Reste que le procès de Nathalie Normandeau et de Marc-Yvan Côté piétine et que la fichue enquête Mâchurer concernant le premier ministre Jean Charest ne semble pas près d’aboutir. Cela s’ajoute à une séquence qui n’a rien de glorieux pour l’UPAC. Elle débute avec l’obsession affichée par l’ex-commissaire Robert Lafrenière pour trouver « le bandit » à l’origine des fuites médiatiques entourant cette dernière enquête. Elle a mené à l’arrestation étrange du député Guy Ouellette, contre qui aucune accusation n’a été portée. Les trois protagonistes qui avaient alors tenu une conférence de presse pour justifier cette opération, disant s’appuyer sur « un dossier béton », ont dû partir dans des circonstances plus ou moins troubles. Un rapport publié en décembre dernier a également démontré que le climat de travail au sein de l’Unité était malsain. Puis, les mandats de perquisition lancés dans l’affaire Ouellette ont été invalidés par les tribunaux. Quelques jours plus tard, alors que les Québécois se rendaient voter, le commissaire Lafrenière démissionnait, sans donner de motifs. Il prétend aujourd’hui vouloir se reposer. On le lui souhaite. Inspecteur Gadget « Ce qu’on veut, c’est voir les bandits en prison, pas à la télévision », disaient les libéraux. L’opposition répondait alors que ce n’était là qu’une tentative de noyer le poisson. Quand on s’attarde au bilan des « Inspecteur Gadget » qu’on a nommés à l’UPAC, force est de constater que ce fut plutôt réussi.
UPAC: Noyer le poisson
La police libérale était mise en place pour protéger les magouilles de l'ère Charest
Claude Villeneuve137 articles
L’auteur est blogueur au Journal de Montréal et au Journal de Québec. Il a été président du Comité national des jeunes du Parti Québécois de 2005 à 2006 et rédacteur des di...
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L’auteur est blogueur au Journal de Montréal et au Journal de Québec. Il a été président du Comité national des jeunes du Parti Québécois de 2005 à 2006 et rédacteur des discours de la première ministre Pauline Marois de 2008 à 2014.