Une gigantesque mascarade de la part d'un gouvernement immoral et illégitime ...

Déjà le mouvement étudiant appelle à relancer la mobilisation. Appuyons-les !

Tribune libre 21 mai 2012


C'est maintenant officiel: il y aura une loi spéciale qui sera déposée par le gouvernement Charest pour essayer de casser par la force le mouvement étudiant. On ne sait pas encore si le dépôt se fera demain, jeudi 17 mai, ou après demain, mais cela sera fait.
Mardi, c'étaient les grandes manoeuvres théatrales de la part de ce gouvernement. Celle qui devait annoncer sa démission comme vice-première ministre et ministre de l'éducation, de même que comme députée, madame Beauchamp, disait vouloir ainsi faire faire "une concession ultime", en espérant que cela soit aussi reçu comme une sorte d'électro-choc dans la population.
Celle qui allait toute de suite après la remplacer, madame Courchesne, affirmait tout de go, le même jour, vouloir maintenir le dialogue avec les étudiants.
Et puis, hier, 16 mai, on apprenait finalement que le gouvernement Charest s'apprêterait à faire adopter une loi spéciale pour, dans un premier temps, "interdire la désobéissance civile", et ensuite pour forcer les professeurs à accepter de manière unilatérale des changements à leurs calendrier de cours, de manière à sauver la session scolaire actuelle, alors que c'est le gouvernement qui, par ses gestes et son entêtement au delà de toute logique, l'a mis en péril. La session, dans les établissements touchés par la grève, serait d'ici là suspendue.
En partant, un constat s'impose. Comment un gouvernement peut-il en effet "interdire la désobéissance civile" ? On ne connaît pas encore les modalités de la loi à cette égard, D'entrée de jeu, il y a de toute manière un non sens. Par définition, la désobéissance civile consiste précisément à refuser de suivre les règles fixées par un gouvernement qui, de part ses gestes et actions, se met lui-même dans une situation d'extrême illégitimité. C'est un droit fondamental, appartenant à tous les peuples, nulle part véritablement reconnu dans les Constitutions, mais qui ne saurait en même temps se voir interdit. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut encadrer ou interdire d'un point de vue légal; c'est un droit qui se prend. Dans la rue. Et un point c'est tout ! Et Jean Charest pourra bien décréter tout ce qu'il veut, cela ne changera rien quant au fond.
Mais passons outre à cette autre incohérence extrême. C'est le genre de choses que ce gouvernement se plait de plus en plus à collectionner par les temps qui courent.
J'ai pour ma part le très net sentiment que tous les événements d'hier n'étaient au fond qu'une gigantesque mascarade. Se pourrait-il que le remplacement de Line Beauchamp par Michèle Courchesne n'ait finalement été organisé que pour mieux couvrir un éventuel retour de madame Beauchamp, le jour où Jean Charest sera forcément battu, lors des prochaines élections, et qu'il faudra bien qu'il y ait des prétendants à sa succession, à la tête du parti libéral ?
Impossible, direz-vous ? Peut-être. Cela pourrait aussi faire partie des plans cachés des stratèges du parti libéral, d'autant que cela permettrait ultimement de présenter une femme contre la chef actuelle du PQ de manière à mêler encore plus les cartes ...
Soyons plus que jamais solidaires ! On peut encore faire reculer ce gouvernement ! Jusqu'aux prochaines élections, il devrait y avoir un moratoire sur les frais de scolarité. Lors de ces élections, alors le peuple tranchera. Cela serait la manière la plus démocratique de régler le conflit actuel.
Il faut par ailleurs se rappeler, à ce sujet, que madame Courchesne a déjà annoncé qu'elle ne se représenterait pas lors des prochaines élections. Que son nom soit ultimement associé, tout comme celui de Jean Charest, à l'adoption de cette fameuse loi spéciale inique n'aurait finalement, et à cause de cela, qu'un impact réduit sur l'avenir des choses.
Line Beauchamp, pourrait ensuite, et de son côté, prétendre qu'elle était contre une telle avenue et que cela est pour cela qu'elle avait finalement préféré démissionner. Déjà, hier, dans les journaux, on laissait entendre qu'elle était effectivement plutôt contre l'idée d'une loi spéciale, comme si on voulait déjà préparer le terrain.
À tout prendre, ce gouvernement non seulement outrepasse ses pouvoirs, mais il tente aussi de nous prendre pour des imbéciles. Il reste en même temps une question : à combien Jean Charest a-t-il moyenné, auprès des autorités du parti libéral, ainsi que du Québec inc, le fait qu'il restera en poste au moins jusqu'aux prochaines élections, quitte à se faire planter ? On ne le saura peut-être jamais. Ce qu'on sait cependant, c'est que ce même Jean Charest aime l'argent, lui qui avait en effet exigé de son parti qu'on le paie, en sous-main, directement de la caisse du parti, une somme annuelle de 75 000$, en surplus du salaire officiel qu'il retirait et retire toujours en tant que député et premier ministre; on sait aussi qu'il s'était fait tiré l'oreille par plusieurs membres du Québec inc, avant d'accepter de faire le saut vers Québec -- c'était au début des années 2000 -- et que ces mêmes hommes d'affaires avaient alors été obligés de sortir pas mal d'argent pour le convaincre d'aller de l'avant dans ce sens ...
Au delà des hypothèses à propos de ce qui peut encore trotter ou non dans la tête de Jean Charest et de ses alcolytes, un fait demeure : la seule véritable sortie de crise doit passer, tels que le proposent déjà, avec beaucoup de bon sens, les centrales syndicales ainsi que bon nombre d'autres organismes populaire, par un moratoire sur les frais de scolarité, en se disant que ce sera ultimement la population qui devrait et pourra trancher, lors des prochaines élections.
Cette idée mériterait qu'un maximum de gens, partout, y compris sur les médias sociaux, en fassent leur propre revendication. Ce serait finalement la manière la plus démocratique de se sortir cette crise. Espérons que tout cela se terminera effectivement de cette manière.
Un cri du coeur ...
D'un côté, il y a les libéraux, appuyés par la CAQ, qui veulent toujours augmenter les frais de scolarité. De l'autre côté de la barrière, le PQ et Québec solidaire, sont contre et appuient conséquement les étudiants et les étudiantes. Québec solidaire va encore plus loin en reprenant les revendications de la CLASSE en faveur de la gratuité intégrale, jusqu'à et y compris au niveau universitaire, comme cela existe déjà dans plusieurs pays. Le PQ ne va pas aussi loin (il avait déjà, il y a plusieurs années, lui-même ouvert le débat en faveur d'un dégel de ces mêmes frais; il a depuis changé d'idées), mais il s'est par contre engagé formellement à annuler toutes les hausses décrétées par les libéraux, s'il est élu. C'est tout à son honneur. Espérons qu'il maintiendra d'ici là le cap sur cette promesse et n'osera pas renier à ce titre cette même promesse. On notera au passage que la plupart des sondages des derniers mois donnent le PQ gagnant, advenant de prochaines élections.
Sur un dossier connexe, on devrait s'objecter de la manière la plus forte possible à cette fameuse loi spéciale. Même chose pour le projet du maire Tremblay (un ancien libéral, faut-il le rappeler) pour interdire les manifestations, via un nouveau règlement municipal qu'il voudrait maintenant faire adopter. L'écrivain Victor Levy-Beaulieu s'est lui-même engagé, publiquement, à personnellement tout faire pour essayer de défaire devant les tribunaux un tel règlement, advenant que celui-ci finisse effectivement par passer.
Il faut rappeler que l'ex-maire de Montréal, Jean Drapeau, avait agi de la même manière que le maire Tremblay, au début des années 70, en pleine ébulition des luttes sociales, sauf que le geste de Jean Drapeau avait lui-même fini par être débouté en cour.
Les associations étudiantes, ainsi que les centrales syndicales, qui appuient les étudiants et les étudiantes dans leur lutte, devraient se commettre sur une éventuelle contestation de cette loi spéciale visant à interdire la désobéissance civile.
Tous ceux et celles, parmi la gente politique, qui appuieront d'autre part cette fameuse loi spéciale, devraient être pointés du doigt et devraient savoir que cela aura forcément un impact sur la suite des choses au niveau politique. Comme le soulignaient ce soir les principaux leaders étudiants en paraphrasant la devise du Québec : "les étuditants et les étudiantes n'oublierons pas !" À cela, on pourrait également ajouter que tous et chacun, au Québec, nous ne devrions pas non plus oublier.
On devrait également continuer à exiger, comme l'ont déjà fait plusieurs commentateurs et spécialistes des questions juridiques, que les accusations en vertu de loi loi anti-terroristes déposées, contre ceux qui ont déposées des bombes fumigènes dans le métro la semaine dernière, soient également abandonnées car elles sont tout à fait disproportionnées et sans lien véritable avec ce qui s'est vraiment passé ainsi que les motivations qui avaient pu amener ces jeunes à poser de tels gestes.
On peut certes questionner l'utilité réelle de tels gestes. Le même jour où ces gestes étaient posées, le gouvernement s'en servait déjà pour dramatiser outre mesure la situation, ainsi que pour se justifier dans la nécessité, à ses yeux, de durcir encore plus sa position. Mais compte tenu de l'état des lieux et du contexte actuel, il ne peut y avoir d'autres choix que de soutenir les droits démocratiques de ces mêmes jeunes et renvoyer la pression vers ceux et celles qui, à Québec, font tout ce qu'ils peuvent pour justement faire pourrir encore plus la situation.
Finalement, tous ceux et celles qui ont vraiment à coeur l'avenir du Québec devraient éviter de tomber dans le panneau des grands démagogues de droite, tel Mario Dumont, ou encore des politiciens comme Raymond Bachand, qui font actuellement tout en leur possible pour essayer de nous ramener en arrière, comme dans les pires moments du mcarthysme, dans les années 50, et qui appelent maintenant à chasser partout les " méchants rouges". Le Québec n'a pas besoin de cela.
La récente sortie du député du PQ de Sainte-Marie St-Jacques, Martin Lemay, contre les étudiants et la présence grandissante des idées d'extrême-gauche en leur sein, était, de ce point de vue, hautement condamnable et aurait dû être sanctionnée par la chef du PQ, Pauline Marois. Celui-ci aurait été un libéral ou un membre de la CAQ qu'il n'aurait pas pu mieux faire.
Qu'il ait cherché à justifier son action en pointant notamment du doigt un petit groupe ultra-gauchiste et souvent décrié par le reste de la gauche québécoise, soit le PCR, dont l'influence de toute manière sur le mouvement étudiant est, sommes toutes, très marginale ne peut être une excuse. Sans doute cherchait-il en même temps à écorcher au passage Québec solidaire puisque Sainte-Marie St-Jacques est une des circonscriptions où Québec solidaire est le plus fort et où il y a en même temps beaucoup d'étudiants et d'étudiantes. Certains diront que c'est de bonne guerre. Mais dans le contexte actuel de conflit ouvert avec le gouvernement, c'était surtout complètement déplacé, d'autant plus que le PCR dénonce Québec solidaire et n'a aucun lien avec cette formation et qu'ils ont même plutôt tendance à dénoncer tout ce qui est à gauche mais ne pensent pas comme eux.
L'initiative prise par le PQ, quelques jours avant l'annonce du gouvernement de déposer une loi spéciale, et qui consista à présenter à l'Assemblée nationale une motion d'urgence demandant aux étudiants et aux étudiantes de respecter les termes des injonctions, démontrait un manque de jugement tout aussi flagrant, d'autant plus déplorable que cela venait alors de la direction du PQ. Seul Québec solidaire refusa alors de voter pour cette motion. Une telle motion revenait à faire une fois encore le jeu des libéraux et semble indiquer un certain glissement de la part de la direction du PQ dans le dossier des étudiants. Comme si le PQ n'était plus tout à fait sûr de l'attitude à suivre par rapport à tout cela.
Au moment d'écrire ses lignes, le PQ dénoncait assez durement le recours à la loi spéciale. Espérons que cette opposition se maintiendra.
Face à un gouvernement qui durcit le ton et fait ainsi en sorte de faire monter les enchères, on n'a pas d'autres choix -- c'est même plus que jamais une obligation -- que de resserrer les rangs, tous et toutes, derrières les étudiants et les étudiantes qui portent encore et fièrement le carré rouge. Il faut se dire: "tous et toutes ensemble !". Il faut faire front commun et continuer à se tenir debout.
Soyons plus que jamais solidaires ! Faisons le plus largement possible savoir à ce gouvernement qu'il n'a pas la faveur populaire et que nous ne sommes pas d'accord. On peut encore faire reculer ce gouvernement. Montrons le !
D'une certaine manière, avec cette loi spéciale, le gouvernement se retrouve à faciliter le travail de mobilisation puisque tous les cours au Québec sont maintenant suspendus. Si on se fie à ce qui a jusqu'ici transpirer dans les médias à propos de cette loi spéciale, il ne sera peut-être plus nécessaire de continuer à bloquer les entrées des CEGEP et des universités puisqu'il n'y aura plus de cours jusqu'à la fin de l'été. Cela devrait du même coup rendre caduque les injonctions qui se multipliaient depuis quelques semaines et qui visaient à forcer un peu partout un retour en classe.
Cela devrait permettre de plus facilement se concentrer sur les objectifs de mobilisation à caractère plus directement politique, contre ce gouvernement.
Déjà le mouvement étudiant appelle à relancer la mobilisation. Appuyons-les !
(*) André Parizeau est le chef du Parti communiste du Québec (PCQ) et ce texte est aussi disponible sur le site Internet du PCQ au [www.pcq.qc.ca->www.pcq.qc.ca] .

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Chef du Parti communiste du Québec (PCQ), membre fondateur de Québec solidaire, membre du Bloc québécois, et membre de la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal (SSJBM)





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