Malgré ses imperfections, le Réseau électrique métropolitain (REM) pourrait dynamiser l’organisation des transports collectifs dans la grande région de Montréal. À la condition de parfaire le projet.
Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) n’y va pas de main morte dans son rapport d’enquête sur le REM. L’organisme se dit incapable de cautionner le projet de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) en raison d’un manque flagrant d’information. Un rapport reçu comme une gifle.
Le premier ministre Philippe Couillard a déjà fait son nid. Peu importe ce qu’en pense le BAPE, Québec ira de l’avant avec le REM, un projet évalué à six milliards de dollars. Les gens d’affaires et le maire de Montréal, Denis Coderre, l’appuient sans réserve.
Les libéraux n’apprécient guère le travail du BAPE, qui pourrait avoir « outrepassé son mandat » en s’intéressant à la rentabilité économique du projet, aux rendements historiques des placements de la Caisse, à la convention d’actionnaires et même à la structure du projet (un partenariat public-privé).
Pour les non-initiés, les 16 principes du développement durable sur lesquels s’appuie le BAPE incluent l’efficacité économique, la subsidiarité, l’internalisation des coûts, et même l’équité et la solidarité sociale. Ces principes permettent au BAPE d’entretenir une conception plutôt envahissante du développement durable.
Bien sûr, le BAPE ne serait d’aucune utilité s’il s’intéressait strictement aux ruisseaux malades, aux marais asséchés et aux grenouilles boiteuses. Dans le dossier du REM, un minimum de retenue aurait mieux servi la cause du BAPE. Le rapport de l’organisme de consultation prête flanc aux attaques parce qu’il s’est intéressé d’un peu trop près aux variables économiques du projet.
Cette incartade est bien dommage, car elle occulte le travail remarquable du BAPE pour relever les fissures du projet. L’extraordinaire potentiel du REM ne devrait pas nous aveugler et nous interdire d’en faire l’examen.
Dans son empressement à mettre le projet sur les rails, la Caisse de dépôt ne s’est pas souciée de l’intégration du REM avec les autres services de transport de la région métropolitaine. Au moment de l’audience publique, elle n’avait toujours pas fourni d’étude d’achalandage, ce qui empêchait ses principaux partenaires (les sociétés de transport de Montréal, de Laval et de Longueuil) d’évaluer les répercussions sur leurs réseaux respectifs. Un joueur qui fait cavalier seul aura un impact négatif sur la planification, déjà complexe, des transports collectifs dans la communauté métropolitaine.
Selon les études fournies par CDPQ infra, la part du transfert modal de l’automobile vers le REM serait minime. D’où proviendront les usagers du REM ? Des autres sociétés de transport, selon toute vraisemblance. Malgré tout le battage entourant le REM, les 67 kilomètres de rail qui seront ajoutés sur le réseau ne permettront pas à la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) d’atteindre son objectif, qui consiste à hausser de 23 % à 30 % la part modale des déplacements effectués en transport en commun à la période de pointe du matin d’ici 2021.
En toute logique, un projet qui ne contribuera pas à l’accroissement du transport en commun sera aussi dépourvu d’impact quant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. La réduction anticipée des GES attribuable au REM (16 800 t. éq. CO2/an) correspondra à un famélique 0,15 % du bilan de la CMM. Ces gains pourraient être plus importants si le REM entraîne un accroissement de l’achalandage.
Il y a lieu de se demander à quoi servira un investissement de six milliards de dollars dans les transports collectifs s’il ne génère qu’un impact marginal sur leur utilisation. La Caisse de dépôt ne sera jamais une société d’exploitation des transports publics. Elle s’intéresse beaucoup moins aux enjeux de mobilité qu’à la captation de la plus-value foncière sur les projets immobiliers qui naîtront le long des tracés dans l’ouest de l’île et dans l’axe du pont Champlain.
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RAPPORT DU BAPE
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